4 mai : de la colère à la détermination

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La communauté arménienne est en colère. Ainsi, la loi pénalisant la négation du génocide des Arméniens a été massivement rejetée par le parti au pouvoir mercredi 4 mai. Un vote qui ne surprendra que les incorrigibles optimistes. Pourquoi en effet le gouvernement UMP qui a bloqué cette loi pendant presque 5 ans au Sénat allait-il du jour au lendemain changer d’avis sur ce même sujet ? Ca aurait été prêter de bien grandes vertus au parti socialiste que de penser que la seule magie de son initiative du 4 mai eût suffi à modifier la doctrine gouvernementale en la matière. De même, croire que l’anti-turquisme affiché de l’Elysée induit automatiquement une arménophilie procède d’une identique naïveté. En réalité, la posture des autorités sur cette question découle essentiellement de leur islamophobie. Et ce sentiment, ancré traditionnellement dans l’idéologie de droite peut d’autant plus se traduire aujourd’hui dans certaines orientations politiques, qu’il correspond au ressenti d’une partie de l’opinion. D’où ce niet tonitruant à l’entrée de la Turquie en Europe. On comprendra cependant qu’un tel positionnement ne saurait constituer pour autant un formidable gage d’intérêt pour la défense des droits de l’homme. On serait même tenté de penser exactement le contraire.

Le pouvoir n’a obéi dans l’affaire du 4 mai qu’à des considérations de Realpolitik. Si sa posture de fermeté apparente à l’égard de la Turquie le gratifie d’une certaine popularité, elle est supposée néanmoins avoir un coût pour les entreprises qui travaillent avec ce pays. C’est du moins l’idée que tente de vendre Ankara, qui voudrait faire croire que la France a plus besoin de la Turquie que le contraire. Et le moyen le plus simple de compenser ce coût est sans doute de sacrifier « un peu » les droits des Arméniens. Une manière de se racheter à bon compte une conduite auprès des dirigeants turcs qui considèrent la « lutte contre les allégations de génocide » comme un fondement de leur Etat.

Certes, une telle attitude ne comporte pas que des avantages. Et elle risque notamment de se traduire par l’alimentation d’un foyer de mécontentement dans la communauté arménienne. Mais le pouvoir dispose à travers ses élus, dans les Bouches-du-Rhône ou même en région parisienne, de relais suffisamment puissants et aguerris pour calmer le jeu. Quelques beaux discours par ci, quelques subventions par là, et on passera vite à autre chose. Sans compter que le fond du débat politique pour les échéances électorales à venir, à supposer qu’il y ait un « vote arménien », a toutes les chances de s’articuler autour d’enjeux qui auront tôt fait de balayer les reproches actuels.

Les Français d’origine arménienne se voient donc renvoyés à leurs propres limites. En France, le négationnisme pourra continuer à s’exprimer sans retenue. Les quelques chiens qui aboieront n’empêcheront pas la caravane du Sarkosysme de passer en 2012.

Faudrait-il pour autant baisser les bras ? Considérer comme une fatalité qu’on ne puisse en France parler de quotas dans le football (heureusement), mais qu’il soit possible de nier sans entrave le génocide des Arméniens ? Il reste un an au gouvernement pour nous prouver le contraire et à la communauté arménienne pour passer de la colère à une véritable efficacité politique. Si l’échec est le fondement de la réussite, l’expérience du 4 mai ne doit pas être considérée autrement que comme un marqueur qui devrait permettre d’ajuster le tir pour les échéances à venir. En premier lieu, en ce qui concerne les engagements annoncés par le Garde des Sceaux (circulaire antinégationniste au parquet, coopération avec la communauté arménienne pour combattre le négationnisme). Et ce, indépendamment du combat pour cette loi qui, en tout état de cause, doit continuer.

Ara Toranian

La rédaction
Author: La rédaction

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