Projet de restructuration rurale « Drakhtik, Petit Paradis en Arménie ».

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Mayis Margaryan a 33 ans et est diplômé de la faculté d’économie de l’université d’état d’Erevan. Il travaille dans le secteur des technologies et des services centrés notamment sur le développement des régions rurales de l’Arménie en étant fréquemment au contact de la jeune génération des villages qui désire se maintenir et créer les conditions d’un avenir local. Il s’est fait connaître notamment grâce au projet de Drakhtik, petit village de la rive Est du Lac Sevan, devenu un laboratoire de ce que peut être un village labellisé dans le cadre du développement rural à travers un contexte économique actuel très rude.

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NAM : Comment est né votre projet, quelle est la mission que vous portez et pourquoi le village de Drakhtik en particulier ?

Mayis Margaryan : Ce projet est né avec un groupe d’amis en allant à Drakhtik. En voyageant et en ayant constaté les nombreux stéréotypes répandus comme quoi il n’y a pas d’avenir dans les villages aujourd’hui, nous voulions prouver le contraire. En cela, Drakhtik offrait un terrain de choix avec plusieurs critères problématiques. Tout d’abord, le village a un passé très difficile mais un nom qui apporte de l’espérance (« Petit Paradis » en arménien). Les habitants de Drakhtik sont des réfugiés d’Ardzvashen (enclave arménienne formée dans l’Azerbaïdjan soviétique et vidée de ses habitants) ainsi que du nord de l’Artsakh (région de Shahoumian occupée, de l’autre côté des monts Mrav). Ce sont des gens qui ont tout perdu et ont tout laissé derrière eux, y compris leur climat plus doux, pour venir à Drakhtik. Nous devions faire quelque chose pour changer cette situation en prenant en compte la réalité. Nous nous sommes donc concentrés sur 4 axes : Le tourisme, l’éducation, l’écologie, le développement communautaire. Bien que notre équipe de volontaires se soit réduite au cours du temps, nous n’avons jamais été découragés.
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NAM : Qu’avez-vous mis en œuvre sur ces 4 axes ?

Mayis Margaryan :Tout d’abord, pour l’éducation, nous avons fait ouvrir une bibliothèque à libre accès dans le village puis nous avons pu ensuite faire ouvrir un laboratoire Armath (technologies cybernétiques et robotiques) où des talents de la jeune génération s’illustrent. Nous avons également participé et invité l’attention sur le village afin de faire rénover les classes de l’école qui étaient en très mauvais état tout en créant des aires de jeux pour les enfants. Concernant l’écologie, nous avons accompli de grands pas dans la sensibilisation des villageois en conviant des groupes de discussion et en installant des poubelles et des écriteaux dans le village. Comme le village a également sa partie inférieure qui se situe en bordure du lac Sevan, nous avions beaucoup à faire dans cette zone qui était infestée d’ordures. En effet, nous avons nettoyé la plage de Drakhtik qui est aujourd’hui une des seules sur le Lac Sevan à être gratuite et propre. Par ailleurs, nous avons planté avec les villageois plus de 4000 arbres dans toute la région grâce notamment à un fond alloué par l’ONU. En profitant également des ressources en notre disposition, notre focalisation sur le tourisme fut surtout dans l’élaboration de tours dans le village (randonnées à pied, en jeep ou à cheval, dégustation d’oie, visites des points de vue et des sources d’eaux minérales), la création d’une écurie de chevaux (Yeramak) et de plusieurs chambres d’hôtes et d’une auberge pour se restaurer. Pour contribuer à dynamiser les flux vers Drakhtik, nous avons également installé un Camping sur la rive du lac Sevan ainsi qu’une aire de « Coworking » où les participants de milieux professionnels venant de la ville peuvent travailler ensemble tout en profitant des atouts du village. Nous organisons également un festival de Vartavar qui amène chaque année plus de 200 visiteurs dans le village. Prochainement, nous souhaitons rénover le sentier de randonnée Drakhtik-Kalavan qui amènera les flux de Kalavan, un autre village qui s’est beaucoup illustré dans l’écotourisme, vers Drakhtik. L’état, quant à lui, souhaite rénover l’Axe Varténis-Dzovagyugh (rive Est du Lac Sevan) en l’asphaltant entièrement, ce qui contribuera à faire sortir Drakhtik de l’isolement et lui donnera une position centrale sur cet axe alternatif Nord-Sud. Le village est déjà pas mal sorti de l’isolement grâce au renforcement des liens sociaux et des travaux de groupes réalisés entre tous. Les jeunes villageois sont dorénavant tous sur Internet et expriment ouvertement leurs idées en caractères exclusivement arméniens, ce qui n’était pas le cas il y a deux ou trois ans et ce qui fait progresser l’esprit d’initiative.

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NAM :Quels sont les résultats concrets dans le ralentissement de l’exode rural ?

Mayis Margaryan :Grâce à ces développements, une quinzaine de personnes sont rentrées à Drakhtik pour développer les projets dans le secteur du tourisme ou de l’éducation et ce mouvement doit continuer. Nous avons fait de Drakhtik une marque connue dans toute l’Arménie. Le même modèle de développement est aujourd’hui mis en place dans d’autres villages de la région comme Semyonovka. Ces développements ouvrent les yeux de nombreux jeunes partis des villages vers Erevan qui ont de plus en plus de moyens et d’inspiration pour faire des investissements dans leurs villages natals. A Drakhtik, le prix de l’immobilier a augmenté de 30% ces dernières années. Nous sommes situés à 1h30 d’Erevan dans une région fortement prisée par les citadins initialement grâce au Lac Sevan. D’ici une dizaine d’années, l’urbanisation de la capitale pourrait se retrouver ralentie et de nombreux citadins quitteront la ville pour s’installer à la campagne : nous faisons ce pari.

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NAM :Ces développements ont-ils un impact positif ou négatif sur le lien originel avec la terre à Drakhtik ?

Mayis Margaryan :Nous souhaitons que tout ce que nous entreprenons soit fortement enraciné et soit une prise de conscience. Nous faisons la promotion de nos activités en insistant que toute terre est une richesse et a des ressources. De même, dans le domaine de l’agriculture, il faut continuer à véhiculer l’idée qu’il est possible de créer de la valeur ajoutée avec l’élevage ou les autres cultures. Nous menons plusieurs séminaires afin d’aider les habitants à se lancer eux-mêmes dans des projets et des affaires dans le domaine de l’agriculture. Ce que nous faisons en réalité, c’est de rapprocher les citadins de la terre tout en faisant comprendre aux villageois certaines richesses des villes qui peuvent contribuer à ce que leur exode soit enrayé en apprenant comment exploiter les ressources existantes.

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NAM :Quelles sont les catégories d’arméniens qui sont intéressés aujourd’hui par vos projets et qui sont susceptibles de vouloir découvrir Drakhtik ?

Mayis Margaryan :Principalement les personnes proches de la nature et qui ont conscience de sa valeur exprimée à travers les arbres, l’eau, les animaux. Dans l’imaginaire urbain, le village est l’endroit où on vit dans la nature. Aujourd’hui, l’activité qui a la mieux contribuée à tisser ces liens est la randonnée, qui est de plus en plus pratiquée et proposée aux arméniens par de nombreux petits tours opérateurs locaux. L’Arménien moyen est en mutation. De plus, le Coronavirus a envoyé de nombreux citadins dans les villages car ces derniers ont le souci de la liberté, l’homme étant un produit de la nature. De toute évidence, avec 30 ou 40 influenceurs, nous pouvons changer la donne dans un petit état comme l’Arménie en véhiculant de nouvelles idées et de nouvelles tendances.

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NAM :Pensez-vous vous faire de la promotion pour le marché extérieur ?

Mayis Margaryan :Drakhtik n’est pas vraiment focalisée pour le moment sur le marché extérieur. Nous comptons beaucoup plus sur les flux intérieurs à l’Arménie et puis notre réalité ne colle pas encore au marché extérieur. Nous n’avons pas l’expérience de travail avec les étrangers à Drakhtik mais ça pourrait changer avec le « Coworking ». Une autre des barrières est celle de la langue car aujourd’hui, à Drakhtik, nous n’avons que 2 personnes qui parlent anglais. L’enseignement des langues est un autre défi.

Propos recueillis par
Aram Kayayan

La rédaction
Author: La rédaction

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