Plus de 25.000 personnes ont afflué jeudi 18 mai 2006 au mausolée de Mustafa Kemal Atatürk (1881-1938), fondateur de la Turquie moderne et laïque, dans un geste symbolique pour réprouver une attaque survenue la veille, visant le Conseil d’Etat et la laïcité, qui a coûté la vie à un juge.
Le cortège, conduit par les chefs des principales instances judiciaires du pays -Cour constitutionnelle, Conseil d’Etat, Cour de cassation- aux mines graves, a observé une minute de silence devant le tombeau du père fondateur de la République turque, musulmane mais strictement laïque.
Des juges, procureurs et avocats, portant leur robes, mais aussi des recteurs et de très nombreux citoyens, étudiants, hommes, femmes et enfants, arborant des photos d’Atatürk et le drapeau turc, se sont inclinés au cours de cette manifestation spontanée devant la tombe d’Atatürk, à Ankara.
« La Turquie est laïque et le restera », ont scandé des milliers de personnes réunies sur l’esplanade du mausolée.
Un avocat de 29 ans a fait irruption mercredi au Conseil d’Etat où il a tué un juge et en a blessé quatre autres dans un acte supposé de représailles à la fermeté avec laquelle la plus haute juridiction administrative du pays fait respecter le port du voile islamique dans la fonction publique et les universités.
Le gouvernement islamo-conservateur du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan est montré du doigt dans cette attaque car le Premier ministre, un ancien militant islamiste dont l’épouse et les deux filles portent le voile, s’en était publiquement pris à des décisions du Conseil sur le port du foulard.
Le port du voile, strictement interdit dans la fonction publique et les universités, est perçu par les milieux laïques, dont la puissante armée qui se considère comme la garante de la laïcité, comme un signe ostentatoire de soutien à l’islam politique.