Le débat sur la transformation de l’Irak en un Etat fédéral a été lancé mardi 26 septembre 2006 au Parlement irakien, en dépit des craintes que ce bouleversement futur n’entraîne une partition du pays ou n’avive les conflits entre les diverses communautés.
Les députés ont écouté la première lecture du projet de loi, aux termes de laquelle les limites et les attributions des 18 provinces actuelles pourront être modifiées.
Les députés vont désormais discuter de ce projet, fermement soutenu par le principal groupe parlementaire chiite, avant d’écouter une seconde lecture le 1er octobre, et de procéder au vote – à la majorité simple – dans les quatre jours suivants, soit à la fin de la semaine prochaine.
Selon un compromis intervenu dimanche entre chiites et sunnites, cette loi sur le fédéralisme ne pourra s’appliquer que 18 mois après son adoption.
La modification des structures administratives et politiques du territoire irakien inquiète les sunnites, qui craignent d’être isolés parce que leurs régions, situées essentiellement dans l’ouest du pays, sont largement désertiques et privées de pétrole.
En revanche, les neuf provinces chiites du sud du pays sont immensément riches en pétrole. Quant aux Kurdes, ils ont tranquillement organisé leurs trois régions autonomes depuis 1991, disposent de richesses pétrolières et sont naturellement favorables au projet de fédéralisme.
Les chiites voient dans le fédéralisme une protection contre le retour d’un pouvoir dictatorial centralisateur à Bagdad, comme celui de Saddam Hussein qui a favorisé les sunnites.
Ensembles, l’Alliance chiite (128 députés) et la coalition kurde (53 députés) disposent de 181 des 275 sièges du Parlement, soit une solide majorité pour faire passer le projet de loi sur le fédéralisme.
Pour tenter de trouver une formule qui n’implique pas seulement les chiites et les kurdes, les députés ont approuvé dimanche un compromis visant à rassurer les sunnites: ils ont accepté de préparer une révision de la Constitution à travers laquelle les sunnites entendent bien faire passer des règles mettant des limites au fédéralisme.
Ce succès sunnite s’est concrétisé dès lundi avec la mise en place de la commission chargée de préparer la révision de la Constitution.
Le calendrier a été soigneusement étudié: la révision de la Constitution doit être prête en un an, et le fédéralisme ne s’appliquera pas avant 18 mois.
Si tout se déroule comme prévu, le fédéralisme s’appliquera donc une fois la loi fondamentale révisée.
La Constitution irakienne, adoptée en octobre 2005, prévoit que la structure de l’Etat soit fédérale, avec la possibilité pour les provinces de se regrouper en régions autonomes. C’est ce mécanisme de formation des régions autonomes que la nouvelle loi devra préciser.
Les sunnites s’efforceront notamment d’obtenir que la Constitution plafonne le nombre de provinces actuelles qui pourront demain se regrouper pour former une région fédérale, l’objectif étant d’empêcher la création d’une super-région chiite unique à laquelle répondrait probablement une grande région kurde. L’Irak se trouverait alors divisé en trois régions – chiite, kurde, sunnite -, ce qui mettrait en péril son unité et risquerait d’exacerber les divisions communautaires actuelles.
Les sunnites désirent également que le fédéralisme respecte un partage équitable des richesses nationales – en premier lieu le pétrole – ce qui implique que le pouvoir central continue à avoir un pouvoir de décision.