Comment ne pas vibrer à cette peinture romantique et tumultueuse ? Comment ne pas chavirer avec ces canots dans la tempête, ces aubes blêmes sur la baie de Naples, ces crépuscules à Venise, ces nuits de lune sur le port de Théodosia, en Crimée, au bord de la mer Noire, où il est né, où il a peint, où il est mort ? Pour Ivan Aïvazovski (1817-1900), peintre russe d’origine arménienne, le ciel, la mer, et la lumière surtout, une lumière qui semble sourdre de sous les flots, prennent toute la place. Très vite, ses maîtres repèrent son talent et l’inscrivent, à 16 ans, à l’Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg, d’où il sort avec la médaille d’or et une bourse de voyage. Il commence bien sûr par l’Italie où, à Rome, il subjugue le pape avec Chaos, un tableau inspiré de la Genèse. Ensuite, il séjourne en France, court les routes d’Espagne, découvre Londres, New York, les chutes du Niagara. Il se lie avec Delacroix, Turner, devient peintre officiel de la marine russe, peint énormément et connaît, partout, le succès et la fortune.
Pourtant, pour cette exposition qu’occasionne l’année de l’Arménie en France, Marjolaine Mourot, conservatrice au musée de la Marine, n’a trouvé, dans nos collections publiques, que deux de ses tableaux, au musée des Beaux-Arts de Brest. Les autres viennent surtout de la Galerie nationale arménienne d’Erevan, qui nous offre un joli voyage à l’intérieur de cette peinture pompière d’un petit maître du XIXe. Et une belle occasion de redécouvrir le musée de la Marine, et ce lieu magique qui fera rêver le petit garçon (la petite fille ?) sommeillant en chacun nous : derrière une vitre qui ne cache rien, l’atelier de réparation des maquettes…
Luc Le Chatelier
Jusqu’au 4 juin au musée de la Marine, palais de Chaillot, Paris 16e. Rens. : 01-53-65-69-69 ou www.musee-marine.fr. Ouvert tous les jours sauf mardi de 10h à 18h.
Luc Le Chatelier
Télérama n° 2980 – 24 Février 2007