Le génocide des Arméniens va-t-il devenir un thème électoral en Suisse ?

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Le conseiller national Andreas Gross publie, dans un ouvrage collectif, un bilan critique de l’UDC depuis 2003. Avec les mêmes questions sur la démocratie et la concordance. En espérant cette fois un débat.

BERNE

FRANCOIS NUSSBAUM

Asept semaines des élections fédérales, Andreas Gross, conseiller national socialiste zurichois, revient à la charge. Opposé en 2003 à l’élection de Christoph Blocher au Conseil fédéral, il a demandé à 40 personnalités de brosser, à travers 25 thèmes sur lesquels l’UDC s’est illustrée, un bilan analytique de la législature. Un livre appelé à relancer le débat.

Votre but est-il d’empêcher la réélection de Christoph Blocher, le 12 décembre?

C’est d’abord de provoquer le débat sur ce point. Notre contribution consiste à analyser, avec sérieux et compétence, 25 thèmes comme la norme sur le racisme, le génocide arménien, la criminalité des jeunes, mais aussi l’Etat social ou la fiscalité, c’est-à-dire des thèmes qui ont permis à l’UDC de s’illustrer durant la législature, notamment dans les médias. Les éditeurs du livre (mais pas tous les auteurs) concluent qu’il est préférable, à la fois, de ne pas réélire Christoph Blocher et de gouverner sans l’UDC. Il faut trouver une forme de concordance réduite, puisque le chef du Département fédéral de justice et police refuse la concordance et qu’il incarne, à lui seul, la quasi totalité de son parti.

Peut-on évincer le plus grand parti?

C’est une grande erreur de croire que le Conseil fédéral est un petit parlement, où toutes les grandes tendances doivent être représentées. Les membres d’un gouvernement sont censés s’entendre pour formuler des propositions cohérentes, et non perdre leur temps à se tirer dans les jambes. Une concordance réduite peut trouver des majorités au Parlement et devant le peuple. Il n’y a pas de norme constitutionnelle sur la concordance, mais il y a exigence d’une «lecture concordante» de la Constitution. Cela signifie que dans chaque situation concrète, tous les articles doivent être également respectés, un principe qui s’applique entre les membres du gouvernement. Christoph Blocher, lui, discrédite le pays en méprisant la Constitution, le Tribunal fédéral, les droits de l’homme.

Vous dites espérer un débat à ce sujet. Pourquoi peine-t-il à démarrer?

Il y a plusieurs raisons. D’abord Christoph Blocher et son influence font peur pratiquement à tout le monde dans les rangs bourgeois. Il faut dire que, tant chez les radicaux que chez les démocrates-chrétiens, une importante minorité est largement «blochérisée». Et on veut éviter les conflits, même civilisés (si on s’attaque à l’UDC, il n’y aura quand même pas mort d’homme!). Mais j’entends souvent des radicaux, mais aussi des socialistes, dire que si on parle trop, rien ne changera. Il vaudrait donc mieux travailler en coulisses. Comme si la maturité politique consistait à éviter le débat public. Je suis peut-être infantile mais je maintiens que, dans une démocratie (directe, de surcroît), les grandes questions doivent être débattues ouvertement.

Votre parti ne semble pas vous suivre massivement…

Au PS, la crainte est que l’éviction de l’UDC ne change rien à la «majorité structurelle» des radicaux. Ce qui se comprend du côté alémanique, mais beaucoup moins du côté romand. Le pays serait donc déchiré. Mais peut-on s’arrêter à l’angoisse de quelques désavantages à court terme pour éviter un débat salutaire à long terme? En attendant, le président du PS s’attaque aux radicaux… Peut-être faudra-t-il que le signal vienne des partis du centre, même si leurs militants «non-blochériens» doivent se regrouper dans une nouvelle formation. Car ni la gauche ni l’UDC ne peuvent gouverner seuls: le centre sera toujours indispensable.

A vous entendre, on risque de rester dans l’impasse?

Il ne faut pas désespérer. Mais si on ne fait rien, on se résigne à l’hégémonie de l’UDC. Et à son discours totalitaire: Blocher dit clairement que si on ne le réélit pas, ce sera la catastrophe, et son parti parle de choix entre le ciel et l’enfer. Il faudra bien trancher, donc se battre. On ne gagne pas un match en restant au vestiaire. /FNU

Traduction en novembre

L’ouvrage présenté hier, de 320 pages, comprend des articles analytiques de 40 personnalités, dont cinq romands. Entre autres: les anciens conseillers fédéraux Otto Stich et Arnold Koller, les présidents de partis Ruth Genner (Verts), Ueli Maurer (UDC) et Christophe Darbellay (PDC), des parlementaires comme Dick Marty (rad /TI) ou Roger Nordmann (soc /VD), le syndic de Lausanne Daniel Brélaz.

Le livre est dédié à la conseillère nationale Liliane Chappuis (soc /FR), décédée en juin dernier avant d’avoir pu mener à terme sa contribution au livre. A noter qu’une traduction française arrivera début ou mi-novembre, avec un chapitre supplémentaire consacré à une première analyse des résultats des élections du 21 octobre.

Le journal du Jura

1er sept 2007

raffi
Author: raffi

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