La Commission des Affaires Etrangères du Parlement européen a adopté un projet de résolution de Mme Lydie Polfer (Luxembourg, ALDE, Alliance des Libéraux et des Démocrates Européens) sur le Sud-Caucase, après avoir voté 203 amendements qui s’y référaient.
– Pour le conflit du Haut-Karabakh, la résolution « réitère son fort soutien au Groupe de Minsk », mais « regrette l’absence de progrès substantiels » et appelle « au retour dans leurs foyers de tous les réfugiés ». Elle « réitère son respect et son soutien à l’intégrité territoriale et aux frontières internationalement reconnues de l’Azerbaïdjan, comme de l’Arménie », « note que la contradiction entre les principes d’autodétermination et d’intégrité territoriale contribue à la perpétuation des conflits dans le Sud-Caucase », pour appeler à des négociations sur la base de l’Acte Final d’Helsinki. Elle condamne enfin « les tentatives d’abuser de la question du Kosovo de manière à créer des difficultés supplémentaires dans les négociations sur les conflits du Sud-Caucase ». « Nous attendions de cette résolution une contribution constructive qui aide à la résolution des conflits du Caucase ; au lieu de cela, la Commission des Affaires étrangères brouille les cartes et rend illisibles les moyens de leur règlement. En disqualifiant le droit à l’autodétermination, principe équilibrant l’« intégrité territoriale », le projet de résolution viole l’article 1 de la Charte des Nations unies » a expliqué Hilda Tchoboian, Présidente de la Fédération Euro-Arménienne. « C’est une attitude déséquilibrée et unilatérale : elle dénote un retard de 10 ans sur l’acquis des négociations ; elle met le Parlement européen en porte à faux avec l’OSCE, alors que cette organisation, en charge du règlement du conflit du Karabagh, est en droit d’attendre un soutien sans faille de l’Europe » a regretté Hilda Tchoboian. La Fédération rappelle que les organisations internationales, l’OSCE, la Commission européenne, le Conseil européen, et même le Parlement européen ont depuis longtemps adopté les deux principes d’ « intégrité territoriale » et de « droit à l’autodétermination » comme bases des négociations du conflit du Karabagh.
– Concernant les efforts de l’Arménie, le texte provisoire « salue les réformes internes politiques et institutionnels menées » dans le contexte de la politique de voisinage et encourage les autorités arméniennes à continuer de « progresser dans le renforcement des structures démocratique ». Il rappelle que les législatives de mai 2007 étaient « largement en accord avec les engagements internationaux » et en attend autant des présidentielles de 2008.
– Par ailleurs, le projet de résolution appelle « tous les acteurs-clés de la région à jouer un rôle constructif dans la résolution des conflits gelés et à prendre des initiatives pour normaliser leurs relations avec leurs voisins ». Le texte appelle également la Commission et le Conseil européens à « aborder l’ouverture de la frontière turque avec l’Arménie dans le cadre des négociations d’adhésion ».
– Le texte voté par la Commission des Affaires étrangères (AFET) appelle « la Turquie à engager des efforts sérieux et intensifs […] incluant une discussion franche et ouverte sur les évènements du passé » et « les gouvernements turc et arménien à commencer un processus de réconciliation pour le présent et pour le passé ». « Il faut lire entre les lignes pour comprendre qu’il s’agit du Génocide des Arméniens ; il est étonnant de voir que pour les membres de la Commission AFET, un génocide ne mérite qu’une demande de discussion franche et ouverte !! Une telle phraséologie en lieu et place d’un appel à la reconnaissance du génocide des Arméniens par la Turquie, fait glisser le Parlement européen inexorablement vers une posture qui n’est pas la sienne, à savoir celle de se plier à l’exigence des autorités turques de faire du Génocide des Arméniens un tabou absolu en Europe » a fait remarquer la Présidente de la Fédération.
Enfin, la résolution salue la ligne de chemin de fer Baku-Tbilissi-Kars ; cependant elle « note que le projet contourne la ligne existante et pleinement opérationnelle passant en Arménie » et relève d’une politique « à courte vue et à motifs politiques qui viole les principes de la Politique européenne de voisinage ». « Nous savons tous que l’Union européenne a refusé de participer au financement de ce chemin de fer, précisément en raison de l’objectif conjoint de la Turquie et de l’Azerbaïdjan d’isoler l’Arménie et de l’exclure des voies de communications régionales ; il est donc inopportun de saluer ce projet de l’exclusion » a déclaré Hilda Tchoboian.
Au final, en dépit des corrections importantes apportées par des « compromis » à la version initiale, la résolution votée sur le Sud Caucase suscite bien des inquiétudes à propos du rôle de l’Union européenne dans la résolution des conflits de cette région. « La Commission des Affaires étrangères du PE a manqué une occasion de se rendre utile et d’avoir une contribution positive, certes minime – compte-tenu de son statut consultatif, à la résolution des conflits de la région ; nous le déplorons vivement. Nous invitons l’ensemble des parlementaires européens à corriger ces choix arbitraires lors de la plénière de Janvier 2008 » a conclu Hilda Tchoboian.