Les 80 ans d’histoire de l’Union soviétique sont pleins d’épisodes sanglants, mais les pogroms de Sumgaït ont été sans précédents. Tout d’abord, les massacres ont eu lieu à une période tout à fait pacifique. Deuxièmement, la nature des massacres n’était pas politique. Troisièmement, ce n’est pas le pouvoir central de l’URSS qui a organisé lui-même les massacres comme ce fut le cas à Tbilissi. Par son inaction le Kremlin a fourni l’occasion à la classe ouvrière’ de perpétrer des massacres.
Sumgaït aurait pu devenir une « cruelle leçon » pour les autres peuples de l’Union soviétique, qui avaient aussi leurs exigences sur les questions nationales. Le 27 février, à midi, le deuxième secrétaire du Bureau politique de Sumgaït, Bayramova, a adressé aux participants des tueries le message suivant : « Il n’est pas nécessaire de tuer les Arméniens. Gorbatchev a dit qu’ils ne prendraient pas le Karabakh, le territoire a été et restera à l’Azerbaïdjan. Il faut autoriser les Arméniens à quitter librement l’Azerbaïdjan, et leur donner la possibilité de partir ».
Dans la matinée du 29 février, alors que les massacres se déroulaient à Soumgaït, le politburo s’est réuni à Moscou, présidé par Mikhaïl Gorbatchev.
Gorbatchev a informé l’élite politique soviétique : « Les mesures que nous avons entreprises, y compris les messages à l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont joué leur rôle. En ce moment, il n’y a pas moins d’un demi-million de personnes dans les rues d’Erevan. Au Karabakh suite à un accrochage survenu entre les Azéris et les Arméniens, deux personnes ont été tuées. Des tracts ont été distribués à Erevan disant : « Arméniens, arrêtez les réunions, prenez les armes et contrez les Turcs. Nous savons qu’il y a des éléments extrémistes. Mais je dois dire que quand bien même il y a 500.000 personnes dans les rues d’Erevan, tout se passe dans l’ordre et il n’y a rien d’anti-soviétique. Les manifestants avancent en tenant des portraits du bureau politburo. Le rattachement du Karabakh à l’Arménie a été évoqué dans tous les discours… « .
Le ministre de la Défense, Dmitri Yazov, a suggéré la mise en place de la loi martiale à Soumgaït. Mikhaïl Gorbatchev a informé les membres du politburo qu’il y a déjà 14 victimes à Soumgaït, et beaucoup d’hospitalisation, il a ajouté : « Maintenant, il est important d’impliquer la classe ouvrière dans la lutte contre ceux qui violent l’ordre public. »
À son retour de Moscou le 28 février, le chef du parti communiste de Soumgaït Jahangir Muslimzade assuré la population rassemblée dans le centre ville que le Karabakh serait jamais rattachée à l’Arménie. Toutefois, cette garantie n’a pas suffi à la foule. Ils ont dit à Muslimzade que les Arméniens devaient être autorisés à quitter librement Soumgaït.
Selon les chiffres officiels, 29 Arméniens et 6 Azéris ont été tués suite aux massacres de Sumgaït, près de 400 Arméniens ont été blessés, et que le nombre de réfugiés s’élève à 18.000. Seule une petite partie des Arméniens de Soumgaït est partie vers le Karabakh ou l’Arménie.
Un responsable du Comité Central, Grigori Kharchenko, a été troublé par un fait : la plupart des Arméniens de Sumgaït ont demandé à émigrer en Russie. « Aucun Arménien à qui nous avons parlé n’a exprimé le désir de partir pour l’Arménie. Tous demandaient de les laisser aller à Krasnodar, Stavropol et dans la région de Rostov.
Tatoul Agopian, Radio Publique d’Arménie
Traduction GM
source: Radiolour
Traduction : http://eafjd.eu