Pachinian esquisse une autocritique ambiguë concernant ses déclarations relatives à Shoushi

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Il y a tout juste 101 ans, entre le 20 et le 23 mars 1920, alors que la République d’Arménie exsangue, défendait seule ses frontières imprécises, menacées, du Zanguezour au Karabagh, par les forces azéro-turques pressées de faire sauter ce verrou de l’Arménie méridionale pour opérer la jonction tant espérée par les idéologues du panturquisme, entre la Turquie encore en gestation dans un Empire ottoman à l’agonie et la République turcophone d’Azerbaïdjan, la ville de Shoushi, capitale historique du Karabagh, allait être le théâtre de l’un des derniers épisodes, et non des moins sanglants, de ces guerres arméno-tatares qut embrasaient depuis deux décennies le Sud Caucase, à l’intigation de certaines puissances, d’Orient et d’Occident, grisées par les vapeurs des pétroles de Bakou. Pendant trois jours, les forces azéro-turques vont s’acharner sur cette ville qui fut l’un des foyers de la culture arménienne dans le Caucase, réduisant en cendres les quartiers arméniens, avec leur riche patrimoine, et sonnant le glas d’une ville qui ne s’en remettra jamais, même sous l’autorité des Russes qui, sous la bannière bolchévique, allaient reprendre quelques mois plus tard le contrôle d’une région que Staline préféra attribuer en 1924, en partie pour complaire à Atatürk, à l’Azerbaïdjan, plutôt qu’à l’Arménie, tous deux soviétisés à la fin 2020. Cet épisode tragique, hélas trop peu connu, de l’histoire de l’Artsakh, a été rappelé de façon insistante à Stepanakert comme à Erevan, à l’occasion de cet anniversaire d’autant plus triste que Shoushi, qui avait été promue capitale culturelle par les autorités arméniennes de l’Artsakh qui avaient déployé tous leurs efforts pour la faire revivre et restaurer son patrimoine, chrétien comme musulman, est retombée, à l’issue de la dernière du Karabagh, sous l’autorité des Azerbaïdjanais, qui l’avaient désignée comme la capitale de « leur » Karabagh et la tiennent pour lors comme un « trophée » de guerre.

Ce rappel historique ne pouvait laisser indifférent le premier ministre arménien Nikol Pachinian, qui a jugé utile de revenir sur certaines déclarations qu’il avait faites concernant Shoushi, provoquant l’indignation d’une grande partie de l’opinion arménienne. J’ai été mal avisé quand j’ai fait concernant Shoushi une déclaration que je ne devais pas faire, a déclaré N.Pachinian dans ce qui pouvait passer pour une sorte d’autocritique des propos qu’il avait tenus quelques mois avant dans le Parlement arménien, à laquelle il s’est livré lors d’une visite dans province d’Aragatsotn, au centre de l’Arménie, samedi 20 mars. “Aujourd’hui, les gens qui m’ont critiqué pour ma déclaration sont devenus les plus grands défenseurs, prétendument, de Shoushi. Mais qui a visité Shoushi en 2020? « s’est exclamé Pachinian, qui en a profité pour décocher des fleches à l’opposition. « Qu’ont fait les Arméniens à Shoushi au cours des 30 dernières années? » a poursuivi le premier ministre, au risque d’indigner tous ceux qui se sont investis dans le développement de cette ville qui portait certes encore les lourds stigmates des guerres arméno-tatares du début du 20e siècle et de la guerre arméno-azérie de la fin du 20 siècle, mais qui cherchait à se relever de ses ruines, à l’ombre de Stepanakert, qui l’avait éclipsée. « Oui, j’ai fait une déclaration erronée, dans la forme, mais sur le fond, je n’ai rien dit de faux, parce que, pour ces gens, Baden-Baden méritait plus d’être visitée que Shoushi au Karabagh. Ils ont construit des lieux comme Shushi partout dans le monde, mais le plus loin possible de Shoushi”, a ajouté Pachinian, dans une allusion hasardeuse, on l’imagine, au peu d’engouement qu’aurait suscité Shoushi chez les Arméniens fortunés, auxquels il semble reprocher à demi mots de ne pas avoir développé une ville qui comptait moins de 10 000 habitants, il est vrai, avant que les forces azéries ne s’en emparent. Et Pachinian de poursuivre d’ailleurs, en citant l’exemple d’un citoyen qui lui aurait fait remarquer que Ruben Hayrapetyan (un riche Arménien) avait construit une maison à Shoushi, à qui il aurait répondu: “Oui, c’est sûr, un oligarque s’est fait avoir et a été conduit là bas et a été poussé à construire une maison, ou peut-être ne s’est-il pas fait avoir, je ne sais pas. C’est la réalité”.

Allez comprendre les propos de Pachinian ! La justification est en tout cas peu convaincante. Lors d’une séance de questions au gouvernement du Parlement le 20 janvier dernier, Pachinian avait déclaré : “Je voudrai attirer votre attention sur le fait que, avant la signature, 90% voire plus de la population de Shoushi était azérie. Alors, vous voulez dire que la ville de Shoushi , comptant une population de 90% et plus d’Azéris, était une ville arménienne avec un tel statut?” On retiendra que Pachinian ne conteste pas le fond de sa déclaration, et tend donc à donner raison au régime de Bakou quand il exalte le statut national azéri de Shoushi, au mépris de l’histoire arménienne de cette cité, que les forces turco-azéries se sont employées à effacer dans un bain de sang, il y a 101 ans, et une fois encore, il y a moins de six mois.

Garo Ulubeyan
Author: Garo Ulubeyan

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