ENTRETIEN – La Turquie s’apprête à lancer une opération militaire en Syrie, dans l’optique de faire reculer les forces kurdes. En difficulté à un an de l’élection présidentielle, Recep Tayyip Erdogan cherche à raviver le sentiment nationaliste, explique Fabrice Balanche.
LE FIGARO. – Depuis plus d’une semaine, Erdogan menace d’une nouvelle offensive en Syrie, qui, selon le président turc, permettrait de viser les combattants kurdes qu’il qualifie de terroristes. Comment l’interpréter ?
Fabrice BALANCHE. – Le principal objectif de la Turquie en Syrie, depuis son rapprochement avec Moscou en août 2016, n’est plus la chute de Bachar al-Assad, mais de détruire le projet d’autonomie kurde. Ankara considère qu’un proto-Etat kurde dans le Nord de la Syrie constitue une menace pour l’intégrité territoriale de la Turquie, car Erdogan a peur que cela n’encourage le séparatisme des Kurdes de Turquie. Qui plus est, l’Administration Autonome du Nord et de l’Est de la Syrie (AANES) est protégée par la milice YPG qui possède des liens étroits avec le PKK. Ces mêmes YPG constituent la colonne vertébrale des Forces démocratiques syriennes, principal allié de la Coalition Internationale contre Daech en Syrie, sans qui la libération du Nord-Est syrien n’aurait pas été possible. Cette guerre contre le terrorisme, toujours en cours, a coûté à la vie à 11.000 combattants kurdes, permettant ainsi à la Coalition Internationale de préserver ses hommes. En échange les Kurdes espéraient être soutenu dans leur revendication nationale. Cependant, lorsque la Turquie a envahi le district kurde d’Afrin en 2018 et ensuite ceux de Ras al-Aïn et de Tel Abyad, en 2019, les Occidentaux ont laissé faire. Ces deux offensives se sont faites en concertation avec la Russie qui en échange a obtenu pour le régime de Bachar al-Assad des compensations territoriale au détriment des rebelles à Idleb.
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