La France appelle l’Azerbaïdjan à respecter ses engagements internationaux après l’aménagement d’un check point azéri sur le corridor de Latchine

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Le 23 avril, soit la veille de la journée anniversaire du génocide des Arméniens de 1915, commémorée dans de nombreux pays, dont la France, les troupes azerbaïdjanaises durcissait le blocus imposé depuis le 12 décembre aux Arméniens du Haut-Karabagh en aménageant un check-point sur le corridor de Latchine, seul axe reliant le territoire arménien contesté à l’Arménie et au reste du monde. La coïncidence n’aura échappé à personne, sauf peut-être au président américain Joe Biden qui, s’il a bien cette année encore, dans son message du 24 avril, honoré le souvenir du million et demi d’Arméniens victimes du génocide perpétré par les autorités de l’Empire ottoman, s’est bien gardé d’évoquer ‘Azerbaïdjan, dont la politique belliqueuse et haineuse à l’encontre des Arméniens, au Karabagh comme en Arménie, s’inscrit dans le droit fil de ce génocide, dont le blocus du Karabagh fait planer la menace, comme le prélude à ce nettoyage ethnique contre lequel les Arméniens ne cessent de mettre en garde une communauté internationale trop accaparée par la guerre en Ukraine pour y prêter attention. A Stepanakert comme à Erevan, les Arméniens ont condamné ce nouveau palier franchi par le régime de Bakou pour resserrer son étau sur le Karabagh, que l’Azerbaïdjan tient pour sa propriété, mais leurs appels risquent de rester sans réponse. Ils peuvent néanmoins compter sur le soutien de la France, qui avec la Russie et les Etats-Unis, à la tête du Groupe de Minsk de l’OSCE, a œuvré pendant près de trois décennies à la recherche d’un règlement négocié du conflit arméno-azéri autour du Karabagh, efforts réduits à néant par la guerre qu’a livrée l’Azerbaïdjan, aidée de la Turquie, aux Arméniens du Karabagh durant l’automne 2020, à laquelle avait mis un terme le cessez-le-feu négocié le 9 novembre 2020 par Poutine. La guerre que livre depuis plus d’un an ce dernier à l’Ukraine a donné le coup de grâce à ces efforts communs, en faisant voler en éclat la troïka du Groupe de Minsk, tandis que la Russie, seule garante désormais sur le terrain des termes du cessez-le-feu, n’est plus en mesure de les faire respecter, tant la guerre en Ukraine l’a isolée et fragilisée. Les quelque 2000 soldats de la paix russes stationnés dans le Karabagh depuis novembre 2020 ont assisté sans réagir aux manœuvres de l’armée azérie qui aménageait un check point sur le corridor de Latchine dont ils sont pourtant censés garantir la libre circulation en vertu des termes du cessez-le-feu, Moscou se contentant d’appeler les deux pays du Sud Caucase à les respecter. Se gardant de dénoncer ouvertement l’Azerbaïdjan, la Russie a préféré s’en prendre à ces puissances occidentales qui chercheraient à tirer profit du conflit du Karabagh pour saper son influence au sud du Caucase. La France, qui n’a pas ménagé ses critiques à Poutine dont Macron a renoncé semble-t-il à rester l’interlocuteur privilégié en Europe, était bien sûr elle aussi visée. Les propos de Macron désignant la Russie comme un fauteur de troubles et d’instabilité de l’Ukraine au Caucase n’ont bien sûr pas été du goût du Kremlin, dont l’hostilité envers la France s’est accrue, ce qui fait aussi l’affaire de l’Azerbaïdjan, qui ne cesse de dénoncer les positions jugées pro-arméniennes de la France, et dont le président Aliev a annulé en décembre une rencontre sous l’égide de l’Union européenne avec le premier ministre arménien Nikol Pachinian car ce dernier demandait que Macron y soit associé. La France a néanmoins poursuivi ses efforts en vue d’amener l’Azerbaïdjan à mettre en œuvre des mesures provisoires concernant le corridor de Latchine, telles qu’elles avaient été préconisées par la Cour internationale de justice (CIJ) dans sa décision prise en début d’année et présentée comme contraignante par Paris. Le problème est que nombre de pays ne reconnaissent pas l’autorité de cette Cour de justice qui a émis il y a quelques semaines un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine, mettant dans l’embarras l’Arménie qui est tentée de reconnaître ce tribunal international, au risque de se mettre franchement à dos cette fois la Russie. Le 22 février, la CIJ avait ordonné au gouvernement azerbaïdjanais de “prendre toutes les mesures à sa disposition pour garantir la liberté de mouvement des personnes, des véhicules et des biens le long du corridor de Latchine dans les deux directions ”. L’Arménie a fait savoir lundi 24 avril qu’elle en appellerait à la CIJ sur la question du checkpoint azéri sur le corridor de Latchine. Dans sa déclaration du 23 avril, le ministère français des affaires étrangères avait souligné que l’aménagement par l’Azerbaïdjan d’un checkpoint à l’entrée de la nouvelle route du corridor de Latchine “contredit les obligations” assumées par Bakou en vertu de l’accord de cessez-le-feu négocié par la Russie en 2020 et “endommage le processus de négociations ”. Paris appelle à la restauration de la libre circulation des biens et des personnes le long du corridor de Latchine, ainsi qu’à l’approvisionnement continu de gaz naturel et d’électricité, a souligné le ministère français. Peu avant, les Etats-Unis aussi s’étaient dits “profondément préoccupés par l’aménagement par l’Azerbaïdjan d’un checkpoint sur le corridor de Latchin qui sape les efforts en vue d’établir la confiance dans le processus de paix ». “Nous réaffirmons qu’il doit y avoir une liberté de circulation des personnes et du commerce sur le corridor de Latchine et appelons les parties à reprendre les pourparlers de paix et à s’abstenir de toute provocation et d’actions hostiles le long de la frontière », a déclaré Vedant Patel, le porte-parole adjoint du Département d’Etat américain, dans un communiqué de presse publié dimanche. L’ambassadrice des Etats-Unis en Arménie, Kristina Kvien, a de son côté réaffirmé l’importance accordée par Washington au 24 avril en se recueillant au mémorial du génocide à Erevan à l’occasion du 108e anniversaire de ce génocide, sur les hauteurs de Erevan, où elle a évité de croiser l’ambassadeur de Russie, qui exprimait lui aussi la solidarité des Russes avec les Arméniens en ce jour de deuil et de souvenir. “Comme les Etats-Unis l’ont souligné hier, nous sommes profondément préoccupés par la décision de l’Azerbaidjan d’aménager un checkpoint sur le corridor de Latchine. Nous trouvons cela dommageable au processus de paix. Et ce sur quoi nous nous concentrons aujourd’hui, c’est de faire en sorte que les parties à se parler à nouveau, de trouver des solutions mutuellement acceptables, et nous continuerons à soutenir le processus de paix en vue de le faire avancer” a déclaré Kvien. Elle a souligné que les Etats-Unis estiment que « tout recours à la violence ou tout acte de provocation est préjudiciable au processus de paix ”. Les autorités azéries nient imposer un blocus au Karabagh, en prétendant, avec la mauvaise foi qui les caractérise, qu’elles ne font que soutenir les militants écologistes autoproclamés qui bloquent le corridor de Latchine depuis le 12 décembre sous le prétexte que les mines exploitées par les Arméniens du Karabagh causeraient des dommages à l’environnement. Elles font valoir aussi que les représentants du Comité international de la Croix rouge n’ont pas été empêchés d’acheminer de l’aide humanitaire aux quelque 120 000 Arméniens assiégés dans le Haut-Karabagh, non plus que les véhicules du contingent russe de paix, qu’elles accusent pourtant régulièrement d’aider les Arméniens du Karabagh à s’approvisionner en armes et en effectifs depuis l’Arménie, justifiant ainsi les actes de violence perpétrés contre des Arméniens du Karabagh aux abords du corridor de Latchine et la nécessité d’un blocus qui relève bien d’une politique délibérée d’étranglement du Karabagh dont elles doivent d’autant plus assumer la responsabilité depuis l’aménagement du checkpoint. Dans un communiqué publié dimanche, le ministère azerbaïdjanais des affaires étrangères a justifié l’aménagement d’un nouveau checkpoint sur ce que Bakou considère comme le territoire souverain de l’Azerbaïdjan et a indiqué que des “conditions nécessaires ” seront créées pour “le passage transparent et ordonné des résidents arméniens vivant dans le Karabagh, région de l’Azerbaïdjan” à travers le checkpoint dans les deux directions. Bakou a souligné que le contrôle de ce mécanisme sera mené en coopération avec les forces de paix russes.

Garo Ulubeyan
Author: Garo Ulubeyan

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