Un tribunal albanais a condamné Fredi Beleri, un Albanais d’origine grecque et maire élu de la ville d’Himara, à deux ans de prison pour avoir acheté des votes, le 5 mars, dans une décision qui a déjà exacerbé les tensions avec la Grèce voisine.
M. Beleri a été élu maire d’Himara bien qu’il ait été arrêté avant les élections locales du 14 mai 2023, accusé d’avoir acheté des voix. La détention pendant des mois du maire élu a suscité de vives critiques de la part de la Grèce, ce qui a envenimé les relations entre Tirana et Athènes, qui a menacé d’entraver le processus d’adhésion de l’Albanie à l’UE à cause de cette affaire.
Athènes a demandé à plusieurs reprises que M. Beleri puisse prêter serment en tant que maire d’Himara. Bien qu’il ait remporté les élections, il n’a pas pu prêter serment tant qu’il était en état d’arrestation.
Les responsables grecs ont averti depuis des mois que l’Albanie – pays candidat depuis 2014 – risquait de compromettre ses progrès en matière d’adhésion à l’UE si M. Beleri n’était pas libéré.
Toutefois, les responsables politiques albanais, dont le Premier ministre Edi Rama, insistent sur le fait que la justice doit suivre son cours par l’intermédiaire du système judiciaire.
M. Beleri a qualifié la procédure judiciaire de « simulacre de procès », a rapporté eKathimerini. Il a critiqué le manque de preuves et de témoins, et a promis de continuer à se battre pour laver son nom.
« Avec un faux casier judiciaire, sans preuve, sans autre témoin que celui qui a été soudoyé par la police, avec un juge ‘nommé’, dans une cage de verre sans communication avec mon avocat, le tribunal albanais m’a condamné aujourd’hui à deux ans de prison », a déclaré Beleri dans un communiqué cité par eKathimerini.
« Mon crime est que mes concitoyens m’ont élu maire contre les plans du Premier ministre albanais Edi Rama », a-t-il ajouté
Le ministère grec des Affaires étrangères a également condamné le verdict, déclarant qu’il soulevait des inquiétudes quant à l’objectivité de la procédure et à la présomption d’innocence. Le ministère a déclaré que la peine était disproportionnée par rapport à l’infraction présumée.
« La condamnation prononcée aujourd’hui par un tribunal albanais à l’encontre du maire élu d’Himara, Fredi Beleri, renforce les inquiétudes quant à l’objectivité de la procédure », a déclaré le ministère dans un communiqué publié sur son site web.
« L’application sélective des décisions de justice et le rejet des décisions de justice ne sont pas conformes aux principes de l’État de droit. Le gouvernement grec suivra de près l’affaire et attendra un jugement juste et objectif au deuxième niveau de juridiction. »
Beleri est devenu une cause célèbre en Grèce, ses partisans se mobilisant sur les médias sociaux avec le hashtag #freeBeleri.
Le verdict a également été largement discuté et vivement critiqué dans la presse grecque. Un article virulent de eKathimerini écrit que l’Albanais Rama a « choisi de couper les liens avec Athènes ».
La Grèce a déjà eu l’occasion d’utiliser sa position de membre de l’UE dans ses relations avec ses voisins. Le pays anciennement connu sous le nom de Macédoine a vu ses tentatives d’entamer des négociations d’adhésion à l’UE rejetées à plusieurs reprises par Athènes, qui s’opposait à l’utilisation du nom « Macédoine », qui est également le nom d’une province grecque. La question a finalement été résolue lorsque le gouvernement de Skopje a changé le nom du pays en « Macédoine du Nord » en 2019 à la suite de la signature de l’accord de Prespa en juin 2018.
Avant l’arrestation de Beleri, l’Albanie et la Grèce entretenaient des relations relativement bonnes grâce à leurs liens historiques et culturels, et à leur appartenance commune à l’OTAN et à d’autres institutions internationales, malgré des problèmes occasionnels liés à la minorité grecque en Albanie. Avant l’arrestation de Beleri, la Grèce avait défendu la candidature de l’Albanie à l’UE, et l’Albanie a finalement obtenu le statut de candidat pendant la présidence grecque du Conseil de l’UE en 2014.
