Une cour d’assises d’Ankara a acquitté mercredi 10 mai 2006 deux universitaires turcs de renom poursuivis pour un rapport controversé appelant à l’élargissement des droits des minorités en Turquie, pays qui souhaite adhérer à l’Union européenne (UE).
Les professeurs Baskin Oran et Ibrahim Kaboglu risquaient chacun jusqu’à cinq ans de prison pour « insulte à la justice turque » et « incitation » à la haine » dans un procès ouvert en février.
Le juge Avni Mis a estimé qu’il n’y avait pas lieu de pénaliser les deux défenseurs des droits de l’Homme après qu’un procureur eut demandé leur acquittement jugeant que les propos figurant dans le rapport incriminé devaient être considérés dans le cadre de la liberté d’expression.
Les deux hommes, membres d’un conseil sur les droits des minorités dépendant des services du Premier ministre, ont dévoilé en octobre 2004 devant le conseil un rapport qui a suscité un vif débat en Turquie et provoqué la colère des milieux nationalistes.
Le document, qui n’a jamais été publié par le gouvernement, proposait des amendements constitutionnels et législatifs en faveur des minorités qui viendraient s’ajouter aux réformes pro-européennes déjà adoptées par le parlement turc.
Le rapport qualifiait de « paranoïa » la menace, souvent agitée par les nationalistes, d’une partition du pays en cas d’octroi de nouveaux droits aux minorités, notamment aux Kurdes.
Les deux intellectuels ont par la suite quitté leur poste au sein du Conseil qui ne s’est plus réuni depuis février 2005.
Ce procès contre l’auteur du rapport, M. Oran, et le président du comité, M. Kaboglu, était jugé comme un nouveau test de la volonté des autorités turques d’élargir la liberté d’expression dans un pays qui a entamé en octobre des négociations d’adhésion à l’UE.
L’UE demande de longue date à Ankara d’octroyer des droits culturels à la communauté kurde ainsi qu’aux minorités religieuses dont les chrétiens orthodoxes.