Adieu Patrick

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La nouvelle est tombée. Brutale. Patrick Devedjian, « touché par l’épidémie » comme il l’avait déclaré dans un tweet mercredi dernier, est décédé dans la nuit du 28 mars dans un hôpital des Hauts-de-Seine, le département dont il assurait avec brio la présidence depuis des années.

Avec sa disparition la France perd l’un de ses grands hommes politiques. Et le monde arménien la plus grande figure publique qu’il lui restait, après la mort il y a un an et demi de Charles Aznavour. La perte est immense. A la hauteur de l’émotion qui est en train de submerger la communauté. Car cet avocat de profession était l’un des plus grands défenseurs de sa cause, depuis les années 75 où il s’était porté volontaire pour plaider en faveur des premiers combattants emprisonnés : les membres de l’Opération Van, Max Kilndjian, Alec Yenikomchian, Mardiros Jamgotchian, Monté Melkonian. Tout en étant à l’époque le conseil de Jacques Chirac et du RPR ! C’est-à-dire, du pouvoir en place, de l’ordre national et international établi. Mais lorsqu’il était question du génocide – qui l’avait structuré avait-il dit dans une interview à Marianne-, Patrick Devedjian n’écoutait que son coeur arménien, qui le poussait à chaque combat à se porter en première ligne. Toujours volontaire. Toujours partant. Et avec quel talent ! Quelle intelligence ! Quelle finesse !

Les murs de l’Assemblée nationale résonnent encore de son discours du 29 mai 1998 lorsqu’elle a voté à l’unanimité la reconnaissance du génocide, dans une séance qui s’était terminée par de longs applaudissements. Ou lorsqu’il était une nouvelle fois monté au front, pour un combat qu’il pressentait comme extrêmement difficile, pour la pénalisation du négationnisme du génocide.

On ne reviendra pas en ces quelques lignes sur ses faits d’armes, qui lui avaient valu de recevoir il y a quatre ans la médaille du courage décerné par le CCAF. Ni sur son incroyable parcours politique, qui lui a permis, à une époque où il n’était pas évident de porter un patronyme comme le sien, d’être élu maire d’Antony, député, ministre et président du département le plus riche de France. L’on se souviendra avec émotion que sa dernière présence dans une manifestation arménienne remonte au diner annuel de cette institution, où il était assis à côté du Président de la République, le 29 janvier 2020. Et que tout dernièrement il s’était engagé, une fois de plus, pour la défense du Collège Mekhitarian à Sèvres, où il avait été interne.

Faut-il le préciser, Patrick Devedjian a joué un rôle décisif pour l’institutionnalisation des instances arméniennes dans la République, dont il était l’une des personnalités les plus respectées, à gauche comme à droite.
Il y aurait tant dire. Nous reviendrons très vite sur l’itinéraire exceptionnel de ce serviteur de la République, qui a tout fait pour permettre à la France qu’il chérissait plus que tout, d’adopter le combat pour la reconnaissance du Premier génocide du XXe siècle, qui est devenu aujourd’hui une cause universelle.

Comment un virus a-t-il pu achever cette force de la nature, dont l’allure juvénile qui défiait le temps avait fait oublier qu’il était dans la tranche d’âge « à risque ». Cette disparition est inacceptable. Et pourtant, elle ressemble au destin de Patrick Devedjian, qui s’est échiné tout au long de sa vie publique à éveiller les consciences. Dans un dernier acte, il nous rappelle combien le coronavirus est mortel. Mais aucun Covid ne viendra jamais à bout de la mémoire de cette personnalité exceptionnelle et de l’admiration qui lui est due.

Bouleversé, comme l’ensemble du monde arménien, la rédaction est de tout coeur avec sa famille et ses proches auxquels elle présente ses condoléances.

Ara Toranian

La rédaction
Author: La rédaction

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