Angela Merkel et Recep Tayyip Erdogan s’affrontent sur l’intégration des Turcs d’Allemagne

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« Je le répète : l’assimilation est un crime contre l’humanité. » Loin de désarmer, le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a réitéré, mardi 12 février devant le Parlement turc, les propos provocateurs qu’il avait tenus dimanche en Allemagne, devant 20 000 personnes réunies à Cologne. Ces déclarations, qui ont suscité des sympathies dans la communauté turque, ont provoqué un tollé dans la droite allemande et relancé outre-Rhin le débat sur la politique d’intégration des immigrés.

Dès lundi 11 février, la chancelière Angela Merkel avait contre-attaqué : « En ce qui concerne la compréhension de l’intégration du premier ministre turc, nous ne sommes pas encore au bout de la discussion. (…) L’intégration suppose qu’il y ait une disposition à s’adapter au mode de vie d’un pays. » Plusieurs représentants des unions chrétiennes CDU-CSU ont mis en garde le premier ministre turc contre une ingérence dans les affaires intérieures allemandes. Certains, à l’instar du président de la CSU, Erwin Huber, ont profité de la polémique pour redire leur réticence à l’égard de l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, que soutient le parti social-démocrate SPD.

CITOYENS DE SECONDE CLASSE

« Il a touché une corde sensible, les Turcs ont peur de se faire assimiler », explique Kenan Kolat, président de la communauté turque d’Allemagne, qui compte 2,7 millions de personnes, dont un million possèdent la nationalité allemande. Secrétaire général du Conseil central des musulmans, Aiman Mazyek renchérit : « Beaucoup de migrants turcs ont l’impression qu’on attend d’eux qu’ils renoncent à leur identité culturelle. » Selon Kenan Kolat, les débats récurrents sur la maîtrise de la langue allemande, la réduction des cours de langue turque et le durcissement récent des conditions du regroupement familial ont contribué à créer ce climat. Les discussions, au sein de la CDU, sur le concept de culture dominante en 2003 et l’emploi du terme d' »assimilation » par l’ancien ministre de l’intérieur Otto Schily (SPD) en 2002 ont aussi marqué les esprits.

Les Turcs d’Allemagne se sentent encore considérés comme des citoyens de seconde classe. Même si rien ne prouve, à ce stade de l’enquête, qu’il s’agisse d’un acte criminel, l’émotion suscitée par l’incendie d’un immeuble à Ludwigshafen, où neuf personnes d’origine turque ont trouvé la mort le 3 février, a fait resurgir le malaise. « Il faut que Mme Merkel s’occupe plus de nous, qu’elle vienne nous voir comme M. Erdogan l’a fait », réclame M. Kelat.

L’Allemagne a mis longtemps à accepter l’idée que ses immigrés étaient là pour rester. Il a fallu attendre l’arrivée au pouvoir en 1998 de la coalition « rouge-verte » dirigée par l’ex-chancelier Gerhard Schröder pour changer les choses. La politique d’intégration a connu un tournant avec la réforme du code de la nationalité en 2000, introduisant le droit du sol sous certaines conditions, suivie de l’adoption d’une nouvelle législation sur l’immigration en 2005.

Les résultats ne sont pas encore à la hauteur du problème. En 2005, 17,5 % des jeunes étrangers ont quitté l’école sans aucun diplôme contre 7,2 % pour les jeunes Allemands. Les conditions d’accès au marché du travail se sont aggravées. La part des jeunes issus de l’immigration qui obtiennent une place en apprentissage a baissé de 34 % à 23 % entre 1994 et 2003. « Même ceux qui sont qualifiés sont victimes de discriminations », affirme M. Kolat.

La droite chrétienne a fini par se convaincre de la nécessité d’un changement. Aujourd’hui, la CDU parle elle aussi de l’Allemagne comme d’un « pays d’intégration ». Sous l’égide de Mme Merkel, un plan national d’intégration a été adopté en juillet 2007 et certaines régions gouvernées par la droite multiplient les initiatives. Néanmoins les vieux clichés persistent, comme le montre la campagne électorale aux relents xénophobes menée en janvier par le ministre-président de Hesse, Roland Koch (CDU).

Cécile Calla

LE MONDE

Article paru dans l’édition du 14.02.08.

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Author: raffi

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