Ankara et l’UE divergent sur les réformes à réaliser

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Fort de son triomphe aux élections législatives de juillet, l’AKP au pouvoir en Turquie a promis d’accélérer ses efforts pour intégrer l’Union européenne mais certaines réformes jugées cruciales par Bruxelles ne semblent toujours pas au coeur de ses priorités.

L’Union demande par exemple à la Turquie la suppression de l’article 301 du code pénal qui punit tout dénigrement de l’identité nationale turque et des institutions de la République. Cet article a permis de poursuivre en justice des universitaires et écrivains, dont le Prix Nobel Orhan Pamuk.

Mais le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan a clairement fait comprendre que sa priorité était la rédaction d’une nouvelle Constitution pour remplacer la loi fondamentale issue du coup d’Etat militaire de 1982, même si cela risque de lui valoir une appréciation négative lors du rapport annuel d’évaluation de la Commission européenne attendu en novembre.

« Nous ne faisons pas nos réformes pour plaire aux Européens et nous continuerons de faire ce qui est bon pour la Turquie en apportant davantage de démocratie, de prospérité et de meilleures conditions de vie », souligne le numéro deux de l’AKP Egemen Bagis.

Un autre dirigeant du parti islamiste modéré est encore plus explicite: « Le 301 ne sera pas amendé pour l’instant. La priorité est l’élaboration et la mise en oeuvre d’une nouvelle Constitution. Ensuite, nous pourrons résoudre les questions du code pénal qui n’entreront pas dans le cadre de cette nouvelle Constitution, comme le 301 », dit-il sous le sceau de l’anonymat.

BRUXELLES PRÉOCCUPÉ

Cette approche unilatérale inquiète Bruxelles, les analystes turcs pro-européens, et les défenseurs des droits de l’homme. Ils jugent qu’elle ne fera que conforter les adversaires de la candidature turque à l’UE, comme le président français Nicolas Sarkozy, et réduire le soutien à Ankara parmi les Vingt-Sept.

Jean-Christophe Filori, chargé de la Turquie au sein de la Commission européenne, s’inquiète que la réforme constitutionnelle, bien que souhaitable, ne freine les progrès sur les autres dossiers.

« Une Constitution prend du temps. Le code pénal turc et la loi sur les fondations religieuses peuvent être traités dès maintenant », a-t-il souligné la semaine dernière devant le Parlement européen.

Les députés turcs reprennent leurs travaux le 1er octobre et pourraient adopter une loi sur les fondations religieuses avant le rapport de novembre mais dans sa forme actuelle, le projet ne garantit toujours pas la restitution, réclamée par Bruxelles, de propriétés à la minorité chrétienne dans ce pays majoritairement musulman.

L’Union européenne veut aussi que la Turquie ouvre ses ports au trafic en provenance de Chypre, qu’Ankara ne reconnaît pas. Elle réclame aussi l’ouverture de la frontière avec l’Arménie et la réouverture d’un séminaire considéré comme vital pour la survie à long terme de la petite minorité grecque orthodoxe.

Mais les analystes n’attendent guère de mouvement sur ces questions sensibles, plutôt de lents progrès sur les aspects purement techniques des négociations avec l’UE.

GAGNER DU TEMPS

« Les intentions sont bonnes, mais on ne voit aucune action », déclare Cengiz Aktar, expert de l’UE à l’Université Bahcesehir d’Istanbul.

« Un groupe de décideurs au sein du gouvernement est plus que satisfait de l’ouverture de négociations avec l’UE (en 2005) mais ils pensent que le seul fait de maintenir en vie le processus suffira à continuer à faire entrer des capitaux étrangers (…). Ce n’est qu’une façon de gagner du temps. »

L’économie turque, bien qu’en forte croissance, reste vulnérable en raison de l’ampleur de son endettement.

Orhan Kemal Cengiz, directeur d’un organisme de défense des droits de l’homme, estime quant à lui que la décision de l’AKP de pousser en faveur de l’élection d’Abdullah Gül à la présidence pourrait nuire aux réformes.

« L’élection de Gül a été une grosse erreur parce que l’AKP va dépenser la plus grande part de son énergie à combattre la bureaucratie laïque. L’AKP a été le gouvernement le plus puissamment réformiste de Turquie parce qu’il était exclu (de l’élite laïque). Il essaie maintenant d’occuper le système au lieu de le changer. »

En face, le gouvernement turc et ses partisans arguent qu’l dispose de temps pour répondre aux exigences de l’UE dans un processus prévu pour durer des années.

Les dirigeants français ou allemand refusent l’entrée de la Turquie dans l’UE et Bruxelles n’a pas réussi à lever les restrictions commerciales à l’encontre des Chypriotes turcs, le gouvernement grec chypriote, le seul reconnu par la communauté internationale, menaçant de bloquer la candidature d’Ankara en représailles.

« L’UE pourrait jouer un rôle très positif en disant simplement: ‘voilà nos critères. Si vous les remplissez, vous pouvez nous rejoindre’. Au lieu de cela, on assiste à des débats sans fin pour savoir si la Turquie est européenne ou non », constate Cengiz.

raffi
Author: raffi

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