Info Collectif VAN – www.collectifvan.org – Le journal arménien en langue turque, Agos, propose la reprise d’un article paru dans la presse turque. Le texte serait presque comique tant il est « grossier ». Encore une fois, on assiste à un exercice d’inversion des réalités, typique du discours négationniste. Le terme génocide arménien est bien sûr toujours accompagné de guillemets, et on apprend dans ce papier, qu’il constitue un tabou pour la diaspora arménienne…
La presse turque désigne ici, encore une fois, son candidat favori aux élections présidentielles de février 2008 en Arménie, à savoir le premier Président de la République arménienne, Levon Ter Petrossian. Il serait intéressant de connaître l’avis de l’intéressé concernant ce soutien dont il se passerait sans nul doute.
Si Ankara voulait savonner la planche de « son candidat », elle ne s’y prendrait pas autrement.
Enfin, on est rassuré de savoir que de grands démocrates comme Erdogan et Gül se préoccupent de l’établissement de la démocratie et de la lutte contre la corruption en Arménie, et qu’ils sont prêts à payer quelques millions de dollars aux Arméniens pour ça… Décidément, c’est une fin d’année faste : après AXA, Ankara…
Le Collectif VAN vous en livre la traduction.
Changer le pouvoir politique en Arménie
Agos N° 608
23 11 2007
Paru dans Referans
Le 16 11 2007
Behlül Ozkan
Les projets de reconnaissance par les Parlements européen et américain, des événements de 1915 comme étant un génocide’, se trouvent, pour Ankara, en tête des problèmes majeurs à affronter ces derniers temps.
L’atout majeur de la stratégie de la Turquie pour empêcher ces projets, est l’utilisation de sa position géopolitique. Le gouvernement de l’AKP fait d’une part des concessions aux pays européens et aux USA, et d’autre part il utilise les associations et les lobbies juifs pour contrer les attaques de la diaspora arménienne. Ces projets retardés reviennent à l’ordre du jour plus tard, mais dans des conditions plus difficiles. Le Premier ministre Erdogan ayant constaté l’inefficacité de cette politique, a fait un nouveau pas pour sortir de ce cercle infernal. Il a proposé à Erevan la création d’une commission d’historiens et l’ouverture des archives. Erevan a claqué la porte au nez d’Ankara en réponse à la proposition de bonne volonté d’Erdogan. En refusant la proposition, le Président d’Arménie, Robert Kotcharian à répondu que la priorité était l’ouverture des frontières.
Génocide’, Un Tabou
Lorsque l’on analyse l’identité nationale arménienne, on comprend pourquoi la proposition pleine de bon sens de la Turquie n’a pas trouvé d’écho. Le concept de Génocide’, plus particulièrement pour la diaspora arménienne, est un mythe qui est devenu l’élément fondateur de sa définition même, tel un tabou. Pour le coté arménien plus spécialement, la simple discussion des événements de 1915 pour savoir s’il s’agit d’un génocide’ ou non, constitue une attaque contre son identité. C’est pourquoi le sujet n’a pas vocation à discussion. Pour lui, le problème est une vérité historique’ et ce qu’il faut faire c’est faire accepter le génocide’ en utilisant des pressions politiques. Lorsque l’on cumule les arguments tels que, absence de relations diplomatiques, fermeture des frontières, définition de l’identité arménienne, en se basant sur l’opposition à la Turquie, on comprend l’impasse sans issue dans laquelle les deux pays se trouvent.
Malgré cette sombre image, les élections présidentielles en Arménie au mois de février se présentent comme une occasion importante pour faire changer la tournure de ces relations. Les deux candidats importants sont le Premier ministre Serge Sarkissian et le premier Président de l’Arménie Levon Ter Petrossian. D’après la constitution Kotcharian ne peut plus se présenter mais son associé stratégique Sarkissian, défend la poursuite de sa politique contre la Turquie, alors que Ter Petrossian défend la normalisation des relations avec la Turquie pour l’avenir de l’Arménie.
Petrossian est plus ouvert
En 1997, Ter Petrossian avait été éloigné du pouvoir par un coup d’Etat dirigé par Kotcharian. Il était accusé de trahison car il défendait une solution au Karabagh et defendait les bonnes relations avec la Turquie. Ter Petrossian maintient toujours les idées qu’il défendait il y a 10 ans. Il a rompu son silence après une longue période mais son travail semble difficile contre le couple Kotcharian-Sarkissian qui détient les ficelles de l’économie de la corruption dans le pays.
Pour que Ter Petrossian gagne contre Sarkissian qui est contre la Turquie, Ankara peut faire des pas importants.
Nous pouvons les regrouper sous trois titres :
1)Pour qu’une révolution, semblable à celle des autres pays ex-soviétiques comme l’Ukraine, la Géorgie, le Kirghizistan, réussisse, Ankara doit apporter son soutien financier aux groupes anti-Sarkissian, sous le leadership de Ter Petrossian. Sur ce point-là, l’atout détenu par la Turquie se trouve dans nos citoyens d’origine arménienne qui ont des liens économiques et moraux avec ce pays. Au lieu de les mépriser en disant « malheureusement (il est) arménien », il faut les soutenir pour changer le pouvoir politique en Arménie. Il faut créer une organisation qui soutiendrait les forces démocratiques en Arménie qui luttent contre le système de la corruption et les personnalités importantes de la communauté arménienne doivent y prendre des responsabilités. Au lieu des dépenses consacrées aux lobbies pour empêcher des projets de (reconnaissance) de Génocide’, il est évident que le soutien de quelques millions de dollars qui peut être apporté aux supporters de Ter Petrossian aura un effet considérable sur un million et demi d’électeurs.
2) Ankara, doit faire des déclarations avant les élections et dire à l’opinion publique internationale et arménienne que si les forces défendant la paix et la démocratie viennent au pouvoir, elle rétablira ses relations diplomatiques, et que les frontières pourront s’ouvrir dans le cas où Erevan ferait des concession au Karabagh. Ainsi la Turquie crée les conditions pour que les électeurs votent pour Ter- Petrossian et prépare le terrain pour l’ouverture des frontières. Lorsque l’on considère que la fermeture des frontières coûte à l’Arménie 700 millions de dollars par an, la promesse de la Turquie aura un effet important sur les électeurs.
Il faut faire des émissions en arménien
3) Le pouvoir politique actuel d’Arménie contrôle tous les médias et empêche l’opposition de se faire entendre. Pour surmonter cela, on peut commencer des émissions de télé et de radio en arménien. Ainsi on peut raconter au peuple arménien, isolé du monde, que le vote qu’il va utiliser a une importance vitale pour changer le régime politique et pour augmenter la qualité de vie dans le pays.
Lorsque l’on observe, dans la disloquation du bloc de l’Est, le poids des émissions de Radio Free Europe diffusées par les USA, on comprend l’importance de cette option.
La Turquie, doit abandonner sa politique statique et réactive, héritée de l’époque de la guerre froide, elle doit prendre l’initiative et exercer une politique proactive pour l’arrivée au pouvoir des forces demandant la paix et la démocratie en Arménie.
© Traduction S.C. pour le Collectif VAN – 04 décembre 2007 – 12:19 – www.collectifvan.org