Erevan, avec l’AFP – L’Arménie et l’Azerbaïdjan se sont accusés mutuellement mercredi d’avoir employé des armes prohibées contenant du phosphore blanc, une munition bannie, lors de l’offensive azerbaïdjanaise contre la République du Haut-Karabakh. Et ce alors que la partie arménienne n’avait aucun intérêt militaire à utiliser ces armes interdites, qui ont notamment permis d’incendier ses positions arméniennes au sud de Chouchi, provoquant de nombreux morts et des blessures clairement identifiables sur les soldats arméniens.
Des hostilités d’envergure avaient repris fin septembre entre Bakou et des
séparatistes soutenus par Erevan dans ce territoire montagneux ayant fait
sécession de l’Azerbaïdjan au début des années 1990.
Les affrontements, qui ont fait plus de 5.000 morts, se sont soldés en
novembre par une défaite des forces arméniennes au Karabakh, qui ont dû céder face aux moyens mis en oeuvre par deux Etats incommensurablement plus riches et plus nombreux et mieux armés.
Le responsable des questions des droits humains des autorités séparatistes,
Artak Beglarian, a affirmé à l’AFP que son équipe avait réuni « des preuves
abondantes montrant que l’Azerbaïdjan avait utilisé des munitions au
phosphore » lors des six semaines de combats.
Toutefois le ministère azerbaïdjanais de la Défense a rejeté ces
affirmations, accusant sans la moindre preuve les Arméniens d’avoir employé ces armes.
« L’armée azerbaïdjanaise n’a pas de munitions au phosphore. Nous ne
pouvions pas employer ce que nous n’avions pas », a assuré avec aplomb à l’AFP un porte-parole du ministère, Vaguif Diargahly, ajoutant que « l’Arménie avait
utilisé des bombes au phosphore contre nous ».
Dans un hôpital d’Erevan, des journalistes de l’AFP ont vu des militaires
blessés présentant des brûlures graves qui, selon eux, auraient été causées
par des armes au phosphore azerbaïdjanaises.
« C’était une attaque de drone le 3 octobre. J’ai d’importantes brûlures
(…) et j’ai appris que des traces de phosphore avaient été trouvées dans mon
organisme », a témoigné à l’AFP Meroujan Kotchinian, un militaire de 19 ans.
Un autre soldat du même âge, Vardgues Ovakimian, a soutenu que ses brûlures se résorbaient lentement « car il y a eu du phosphore sur mes plaies ».
Selon la directrice adjointe de l’hôpital, Karine Babaian, ces blessures
pourraient avoir été causées par du phosphore ou un autre « agent chimique ».
En novembre, le directeur de l’Agence nationale azerbaïdjanaise de lutte
contre les mines (ANAMA), avait lui aussi rapporté l’usage de phosphore contre
les troupes de Bakou.
Les branches arménienne et azerbaïdjanaise du Comité International de la
Croix Rouge (CICR) n’ont pas souhaité faire de commentaire détaillé sur ce
sujet.
Le CICR « mène des discussions confidentielles avec les parties du conflit
concernant des allégations de violation de la loi humanitaire internationale
et des règles de la guerre », a indiqué Ilaha Gouseïnova, une représentante de
la Croix-Rouge à Bakou.