Aucune loi sur le génocide rwandais

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Pourquoi le PS s’est-il acharné à faire voter une loi punissant la négation du génocide arménien seulement et pas le génocide rwandais, alors que le même PS était au pouvoir en France? Selon plusieurs observateurs internationaux, sans oublier des commissions citoyennes françaises, l’Etat français s’est rendu complice d’un génocide au Rwanda en 1994, alors que le même PS était au pouvoir…

Quelle importance pour quel génocide ?

Le PS français a réussi de faire passer à l’Assemblée une loi qui punit la négation du génocide arménien d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 euros. Sûrement que la communauté arménienne composée de 500 000 hommes et femmes est soulagée après des années de combat. Mais combien d’Arméniens français se sont posé des questions sur les motivations du PS ? Et combien de Français ? Qu’est-ce que le PS essaie de faire croire à l’opinion publique, interne et internationale, par cet élan d’humanisme ? Qu’il se soucie du combat des Arméniens ? Et pourquoi en cette période de campagne préélectorale exactement ? Il est vrai que la communauté arménienne compte 500 000 hommes et femmes, donc des voix en perspective…

A voir les conditions dans lesquelles le texte a été voté, on se rend compte qu’il ne faisait pas l’unanimité : 106 députés ont voté pour, 19 contre, et 4 se sont abstenus. Ce qui signifie qu’il n’y a eu que 129 parlementaires qui ont participé au scrutin sur les 577 députés qui siègent normalement à l’Assemblée ! Et en regardant les raisons qui ont poussé les uns et les autres à voter ou à ne pas voter le texte ou même à s’absenter à l’Assemblée, on ne peut s’empêcher de se poser des sérieuses questions sur l’éthique des hommes politiques français d’aujourd’hui. Et sur l’indifférence quasi totale de l’opinion publique sur les questions de même nature que le génocide arménien.

Pour Christophe Masse, député PS et rapporteur de la proposition de loi, il s’agit de « donner une force contraignante » au texte qui reconnaît le génocide arménien, adopté en janvier 2001.

Pour Jacques Chirac : « Dans la République, il n’y a pas d’histoire officielle. Ce n’est pas à la loi d’écrire l’histoire. L’écriture de l’histoire, c’est l’affaire des historiens. » Le président de la République (UMP) a clairement fait savoir sa position sur la question en déclarant que cette proposition de loi « relevait de la polémique ». Jean-Louis Debré, le président de l’Assemblée, est allé encore plus loin en n’occupant pas le perchoir le jour du vote.

Les détracteurs du PS accuseront ce dernier de visées électoralistes en proposant cette loi controversée. Et les antichiraquiens dénonceront sa timidité et ses sympathies aux pays musulmans en général. Mais s’il y a une question que les vrais humanistes devraient se poser, c’est bien celle-ci : pourquoi diable le PS n’a-t-il pas proposé une loi condamnant la négation de tous les génocides reconnus comme telles par l’Onu ? Et pourquoi Chirac a osé déclaré à Erevan : « Tout pays se grandit en reconnaissant ses drames et ses erreurs » ? N’oublions pas que Jacques Chirac est le seul chef d’Etat qui n’a pas officiellement reconnu le rôle de son pays dans le génocide rwandais. Bill Clinton et Guy Verhofstadt l’ont fait, tout à leur honneur. Le PS pour sa part était au pouvoir en 1994 et par les alliances douteuses de Mitterrand, la France s’est retrouvée impliquée activement dans la formation des miliciens qui ont massacré près d’un million d’innocents au Rwanda. Douze ans après le génocide rwandais, à quoi sont en train de jouer les hommes politiques français ? Chirac empresse les Turcs de bien vouloir grandir leur nation en reconnaissant ses drames et ses erreurs alors que lui a toujours refusé de reconnaître les responsabilités françaises dans le génocide rwandais. Même si c’est la gauche qui était au pouvoir, personne n’a oublié que c’est Alain Juppé qui était ministre des Affaires étrangères à l’époque. Celui-là même qui vient de redevenir maire de Bordeaux après une année d’inéligibilité pour les causes que nous connaissons tous. Celui-là même qui a osé déclarer que si c’était à refaire, il ferait la même chose pour le Rwanda. Ultime affront aux survivants du génocide rwandais.

Dans ce pays civilisé qu’est la France, je ne risque pas la censure en écrivant que la France s’est rendue complice du génocide rwandais qui visait la destruction totale des Tutsis. Je ne prétends pas que la République française ait partagé avec tel ou tel gouvernement rwandais l’intention de détruire tout ou partie du groupe formé par les Tutsis. En droit, cependant, il n’est pas nécessaire que les autorités françaises aient eu cette intention pour qu’elles soient  » complices « .

La complicité n’implique pas l’intention spécifique qu’a l’auteur principal de commettre le génocide. Une simple connaissance de l’intention générale et spécifique de l’auteur principal rend l’Etat français coupable de complicité de génocide. Car la France savait. La France qui était dirigée par Mitterrand, le président PS. Ce PS qui veut maintenant punir les négationnistes du génocide arménien !

Il a été jugé que « la présence d’une personne en position d’autorité en un lieu où un crime est en train d’être commis ou en un lieu où il est connu que des crimes sont régulièrement commis peut générer une forme d’approbation… qui s’assimile à l’aide et à l’encouragement. Ce n’est pas la position d’autorité qui est importante en elle-même, mais plutôt l’effet d’encouragement qu’une personne en position d’autorité peut susciter au regard de ces évènements. » (jugement TPIR du 15 juillet 2004 dans l’affaire Ndindabizi).

Si des livres comme ceux d’Onana ou de Péan apparaissaient sur le génocide arménien, ils seraient taxés de négationnisme pour sûr, et peut-être par certains députés de la gauche et de la droite. Et ne croyez pas que des intellectuels turcs ne soient pas capables de nier le génocide arménien avec des arguments qui paraissent solides…

Combien d’auteurs et pseudo auteurs se font publier en français avec des œuvres qui nient à mots couverts le génocide rwandais ? Et maintenant le rapport du juge Jean-Louis Bruguière, qui dévie clairement de son objectif, qui est de faire la lumière sur les responsables de l’attentat qui a coûté la vie au président Juvénal Habyalimana. Aucun article sur AgoraVox à propos de ce rapport controversé sur lequel le président Paul Kagame s’est fondé pour couper les relations diplomatiques avec Paris.

Les Arméniens vivant en France sont en grande majorité de la deuxième et de la troisième génération, ils n’ont pas connu le génocide mais ils sont naturellement solidaires des souffrances de leurs parents et ont lutté activement pour que le génocide arménien soit reconnu en France et sa négation, punie par la loi. Comme les descendants des survivants de l’Holocauste, le combat de leurs parents est le leur. Pour un génocide du début du XXe siècle, pourquoi a-t-il fallu tout ce temps pour que le PS se fasse le champion de la loi sur la négation du génocide arménien ? Qu’en est-il des autres génocides ?

A ce rythme, la négation du génocide rwandais sera peut-être punie vers 2100…

par Daddy Youssouf Ruhorahoza Consultant Audiovisuel et Producteur Télévision basé à Kigali/Rwanda.

daddy@dr.com

raffi
Author: raffi

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