Les autorités azéries avaient convié les représentants diplomatiques de différents pays à une visite dans la ville de Shushi, rebaptisée de son nom turc de Shusha depuis que l’armée de Bakou en a repris le contrôle à la faveur de sa victoire sur les Arméniens dans la guerre du Karabagh de l’automne 2020. Présentée comme la capitale culturelle de l’Azerbaïdjan, voire du monde turcophone en 2023, l’ancienne capitale culturelle des Arméniens du Karabagh avait été l’enjeu majeur de cette guerre, qui se conclut d’ailleurs sur sa prise par les forces de Bakou le 9 novembre 2020, contraignant les Arméniens à accepter les termes d’un accord de cessez-le-feu très défavorable négocié par la Russie. Depuis, l’Azerbaidjan a entrepris des travaux, confiés en grande partie à des entreprises de la Turquie alliée, en vue de faire de Shushi la vitrine du pays, dotée d’un aéroport international dont le président Ilham Aliev, accompagné de son épouse et vice-présidente Mehriban Alieva, a visité le chantier à plusieurs reprises, entre deux inaugurations d’hôtels de luxe. Ces travaux visent à changer radicalement la physionomie de la ville qui fut l’un des foyers actifs de la culture arménienne dans la Russie tsariste et dont les nouveaux occupants s’emploient à effacer l’héritage, comme en témoignent les transformations subies par la cathédrale Ghazantchetchotz qui, au moins, n’a pas été rasée comme l’église de Ganatch Jam, pour mieux valoriser un patrimoine musulman (persan et tatar) dont témoignent deux rudimentaires mosquées que les autorités arméniennes s’étaient fait un point d’honneur à restaurer. Shusha est azérie et le restera, et c’est ce message que le président Aliev entendait adresser aux diplomates étrangers, placés devant le fait accompli d’une guerre qui a réglé la question du Karabagh selon les autorités de Bakou, et qui en ont pris acte pour certains, comme le représentant de l’Onu en Azerbaïdjan, qui avait visité Shusha il y a quelques mois, au grand dam des Arméniens. Aussi Aliev a-t-il perçu comme un camouflet le refus par les ambassadeurs de France et des Etats-Unis de se joindre aux ambassadeurs d’autres pays pour cette visite guidée de Shusha. Une absence d’autant plus remarquée que les hauts diplomates représentant des dizaines de pays avaient répondu à l’invitation du régime azéri et s’étaient rendus à Shushi ce weekend pour assister à la conférence organisée par le gouvernement azerbaïdjanais. “Nous considérons cela comme un manque de respect total pour notre intégrité territoriale”, a déclaré Hikmet Hajiyev, le conseiller en politique étrangère d’Aliyev, durant la conférence. Hajiyev a accusé les Etats-Unis et la France d’avoir fait très peu pour aider à régler le conflit du Karabagh en leur qualité de coprésidents du Groupe de Minsk de l’OSCE. “On ne sait pas s’ils ne peuvent accepter l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan ou les travaux de reconstruction engagés à Shusha”, a ajouté le diplomate azéri. L’ambassade américaine à Bakou a répondu à ces critiques lundi 29 août dans une déclaration diffusée par le service a on Monday in azerbaïdjanais de Voice of America. Elle a fait savoir que les membres de l’ambassade visitaient régulièrement “toutes les régions” de l’Azerbaïdjan, dont Aghdam, Fizuli et Zangelan, des districts dont Bakou a repris le contrôle depuis la guerre de 2020. La déclaration ne fait aucune mention toutefois de Shushi ni de Hadrut, une autre ville du Haut-Karabagh proprement dit que les forces azéries occupent depuis leur victoire sur les Arméniens. L’Azerbaïdjan affirme que sa victoire a mis fin au conflit du Karabagh. Mais les Etats-Unis et la France, qui ont pendant près de trois décennies, coopéré avec la Russie à la tête du Groupe de Minsk en vue de parvenir à une paix négociée au Karabagh, affirment que le conflit n’est toujours pas réglé et qu’il ne le sera pas tant qu’un statut n’aura pas été défini pour le Karabagh. Washington a réitéré cette position la semaine dernière en nommant un haut diplomate américain, Philip Reeker, au poste de nouveau coprésident du Groupe de Minsk. Le Secrétaire d’Etat américain Antony Blinken a indiqué que Reeker oeuvrera en vue d’ “un règlement politique durable du conflit du Haut Karabagh ». Cette initiative américaine a fortement déplu à Bakou, dont le ministère des affaires étrangères a dénoncé les tentatives américaines visant à « ressusciter » ce groupe de Minsk que l’Azerbaïdjan juge caduc, comme le processus qu’il incarne, d’autant plus dans un contexte international marqué par la guerre en Ukraine, qui a exacerbé les tensions entre l’Occident et la Russie et compromis toute chance de coopération, y compris sur le Karabagh, comme le laissent entendre depuis plusieurs mois les Russes qui accusent leur partenaires occidentaux du Groupe de Minsk d’avoir sabordé ce format de négociations. Alors que Bakou réagissait en mettant en garde les Américains contre une exclusion du processus de normalisation en cours au Sud du Caucase, l’Arménie se félicitait quant à elle vendredi de cette mesure et réaffirmait son soutien à une médiation du Groupe de Minsk dans le conflit du Karabagh. Il reste que si le processus de Minsk n’est pas tout à fait mort, d’autres formats de négociations lui mènent une rude concurrence, à l’initiative de l’Union européenne, qui arbitrera un nouveau sommet Pachinian-Aliev à Bruxelles le 31 août sous l’égide du président du Conseil européen Charles Michel, de la Russie et aussi de la Turquie, qui se réjouissait lundi, avec son allié azéri, du départ forcé des derniers habitants arméniens des villages bordant le corridor de Latchine, passé aussi sous le contrôle de Bakou.
Bakou condamne le refus des ambassadeurs français et américain de se rendre à Shusha(i)
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