Ces mouvements néonazis qui prospèrent en terre russe

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LAURE MANDEVILLE.

LE FIGARO

Publié le 16 août 2007

Le mystère de la vidéo de l’exécution de deux non-Russes et l’émergence d’une piste nationaliste dans l’attentat contre un train relancent le débat sur la xénophobie.

LA SCÈNE d’horreur dure 2 minutes 42 secondes. Sur fond de drapeau nazi, deux hommes bruns à la peau mate, dont l’un serait tadjik et l’autre caucasien du Daguestan, sont exécutés. L’un est décapité avec un couteau-scie. L’autre est abattu d’une balle tirée de près. Avant de mourir, ils ont le temps de répéter par deux fois qu’ils sont exécutés par des « national-socialistes russes ». Masqués de noir, leurs bourreaux, visiblement professionnels, crient « Gloire à la Russie ».

Meurtre authentique ? Mise en scène ? Ou les deux ? Alors que la police affirmait, hier, à la surprise générale, privilégier la piste d’extrémistes nationalistes russes dans l’attentat à la bombe qui a visé lundi le train Moscou-Saint-Pétersbourg, ce brusque retour en force du thème néonazi suscite bien des interrogations en Russie. Le pouvoir poutinien a-t-il fini par perdre le contrôle des forces du nationalisme et de la xénophobie anticaucasienne, qu’il a contribué à déchaîner ? Ou le soudain activisme des milieux néonazis cache-t-il un jeu politique complexe, destiné à rebattre les cartes avant les élections de 2008 ? Bref, à susciter artificiellement l’émergence d’un rempart centriste, incarné par la ligne de Vladimir Poutine, contre les extrémistes de tout poil ?

Les opposants visés

Depuis le 12 août, date de l’apparition de la macabre vidéo sur le site Livejournal.com, la police russe tente d’en retrouver les auteurs. Hier, un homme de 24 ans de la région de Krasnodar a avoué être responsable de la diffusion du film, qu’il aurait reçu par mail. Il a été aussitôt inculpé. Depuis deux ans, cet adepte des mouvements néonazis diffuse des documents appelant à la haine raciale. Son aveu ne permet pas de confirmer l’authenticité de l’enregistrement, qui fait l’objet d’une enquête. Mais il replace au centre de l’actualité la puissante vague xénophobe qui monte des profondeurs de la société russe.

Mardi, un groupuscule néonazi inconnu, nommé Brigade opérationnelle du parti national-socialiste de Russie, a d’ailleurs revendiqué l’exécution filmée, dans un mail envoyé au site indépendantiste tchétchène Kavkaztsentr. Les auteurs y annoncent qu’ils « déclarent la guerre aux colonisateurs noirs » et « aux fonctionnaires de la Fédération russe qui les soutiennent ». Ils veulent « chasser tous les Caucasiens et tous les Asiates de Russie ». Le groupe clandestin demande aussi la démission du président Poutine et le transfert du pouvoir à un gouvernement formé par « la société national-socialiste de Russie ». Renseignements pris, cette étrange société existe et dispose d’un centre de presse à Moscou… Elle a démenti tout lien avec la vidéo et le groupe qui la revendique, sans renier ses convictions néonazies.

Nul ne s’en étonne vraiment en Russie, où les groupes d’extrême droite prolifèrent en toute impunité. Ils disposent de réseaux politiques, d’appuis dans la police et de sites Internet, où les adresses des ennemis supposés de la nation russe sont mises en ligne. La journaliste Anna Politkovskaïa, assassinée en octobre, avait figuré sur ces listes.

« La vidéo de cette exécution est peut-être la première hirondelle de cette fameuse terreur russe qui finira par venir si on ne prend pas en compte les revendications de la population », a averti hier Alexandre Belov, fondateur du Mouvement contre les migrations illégales, qui a été mêlé à des pogroms contre des populations non russes ces derniers mois.

Depuis un an, le Kremlin, affirmant lutter contre la vague xénophobe, a fait passer au Parlement une batterie de lois anti-extrémistes. Mais selon les défenseurs russes des droits de l’homme, cette législation sert surtout à épingler les opposants pro-démocratie. Les milieux démocratiques estiment que le pouvoir continue de faire preuve d’une grande indulgence vis-à-vis des néonazis, car l’idéologie nationaliste, en créant un ennemi imaginaire, justifie le verrouillage de la scène politique. « Dès qu’apparaît le diable nationaliste, Poutine et ses hommes paraissent très attirants », notait, il y a deux ans, l’opposant Garry Kasparov.

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Author: raffi

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