Nous célébrons cette année le centième anniversaire de la création de la Première république arménienne de 1918. Cet événement significatif de l’histoire de l’Arménie contemporaine a posé les bases d’une nation arménienne indépendante, avec un drapeau, un hymne national et des structures démocratiques.
C’est un sentiment de fierté que de penser à cette République, tout d’abord, car en tant qu’association de femmes, la Croix Bleue des Arméniens de France est fière que l’Arménie indépendante ait été l’une des premières république à avoir instauré le droit de vote pour les femmes il y a un siècle, et ainsi de les considérer et de les encourager à peser sur la vie politique arménienne.
C’est une place qu’elles avaient commencé à prendre, dès le début du réveil de la nation arménienne à la fin du XIXème siècle. Et même si elle ne représentaient pas la majorité des femmes, elles ont contribué à véhiculer cette image de combattante, grâce notamment à des femmes telles que Sossé Mayrig, qui après avoir perdu son mari et ses enfants dans des combats contre les turcs, ne s’est pas laissée abattre et à continuer toute sa vie à s’impliquer pour la jeunesse et la défense de la cause arménienne ; grâce à Saténig Madénian aussi qui prit part à la bataille de Khanassor et participa à la formation des premières organisations féminines.
Bien sûr nous pensons aussi à celles comme Roupina Mikaelian, qui se consacra aux réfugiés dans cette première République exsangue, avec Saténig Ohandjanian ; ou encore Natalia Amirkhanian, qui, elle, se consacra dans les villages, à l’éducation et à l’enseignement de la langue arménienne au sein de cette première république qui instaura aussi l’école obligatoire.
Toutes ces valeurs sont celles de la Croix Bleue depuis sa création et c’est pourquoi nous sommes attachées à la mémoire de ces femmes qui ont tant donné et sont trop souvent oubliées à la faveur des hommes.
Aujourd’hui, 100 ans plus tard, la condition des femmes et des réfugiés, est encore une préoccupation pour la Croix Bleue.
Mais elle doit l’être pour nous tous, Arméniens d’Arménie, de France ou d’ailleurs. En effet, nous ne pouvons oublier ni ces femmes, ni ces réfugiés de la Première République, ni oublier notre propre passé de réfugié.
Cependant, nous évoquons toujours la première république avec pincement au cur aussi. Si la situation n’avait pas été aussi dramatique au sortir du génocide et de la guerre mondiale ; si la première république n’avait pas été abandonnée par les Grandes puissances européennes, ou par ceux tentés par le bolchévisme, la nation arménienne aurait pu être le fer de lance de la région au vu du programme ambitieux du gouvernement Dachnak en place. Un projet tourné vers l’avenir, le progrès et la justice sociale.
Et nous espérons que la République d’Arménie actuelle s’en inspirera, en portant un intérêt particulier aux plus faibles, notamment aux femmes et aux personnes âgées, et instaurera enfin une réelle justice sociale pour toute la société arménienne.
Qu’elle soit l’exemple que la Première république n’a pas eu le temps d’être et qu’elle partage le slogan de nos Croix de secours dans le monde :
« Avec le peuple, pour le peuple » – Jorovourtis hèd, jorovourtis hamar
Illustration : Arpi Krikorian pour le HOM
