L’Arménie continuera de faire pression sur la Russie pour qu’elle extrade un ancien haut responsable arménien faisant l’objet de poursuites pour corruption, a déclaré vendredi le procureur général Artur Davtian.
Mihran Poghosian, ancien responsable d’un organe de l’État chargé de l’exécution d’actes judiciaires, a été arrêté en avril dans la région de la Carélie, dans le nord de la Russie, peu après avoir été inculpé par les forces de l’ordre arméniennes pour avoir détourné au moins 64,2 millions de drams (132 000 dollars) de fonds publics.
Poghosian, qui était une personnalité influente au sein de l’ancienne direction arménienne, a demandé aux autorités russes de lui accorder l’asile, affirmant que les accusations portées contre lui étaient motivées par des considérations politiques. Il a été libéré avant que les procureurs russes refusent formellement de l’extrader.
Ils auraient cité une disposition d’une convention signée par la Russie, l’Arménie et une douzaine d’autres anciennes républiques soviétiques en 1993. Un signataire de la convention peut rejeter les demandes d’extradition susceptibles de porter atteinte à sa souveraineté et à sa sécurité nationale ou de contredire sa législation nationale.
Davtian a expliqué que la partie arménienne n’était pas satisfaite de cette explication. « Nous poursuivons les discussions avec nos collègues [russes], a-t-il commenté à la presse. Étant donné que cette affaire pénale est dans une phase assez active, je n’exclue pas à cet égard que nous aurons [des preuves de] nouveaux crimes, plus graves encore. »
« Nous espérons que nos collègues adopteront une approche légale et juste, pour ainsi dire », a-t-il prévenu.
Les enquêteurs ont déjà porté de nouvelles accusations pour corruption contre Poghosian. Le Service spécial d’enquête (SIS) a affirmé en septembre que l’homme de 43 ans avait blanchi en 2015 pour un montant de 1,2 million de dollars en espèces, acquis grâce à l’entrepreneuriat illégal et à l’évasion fiscale. Il a ajouté que l’argent avait été transféré à une société arménienne lui appartenant sous la forme de prêts sans intérêts.
Selon une déclaration du SIS, l’un de ces «prêts», d’une valeur de 690 000 dollars, a été transféré du compte bancaire d’une entreprise enregistrée au Panama.
Citant des documents divulgués connus sous le nom de Panama Papers, un site web d’investigation arménien a rapporté en avril 2016 que Poghosian contrôlait trois entreprises fantômes enregistrées dans l’État d’Amérique centrale. Poghosian a rejeté le rapport à l’époque. Il a toutefois démissionné peu de temps après de la tête du Service arménien pour l’exécution obligatoire des actes judiciaires (SMEJA).
En 2017, Poghosian a été élu au Parlement arménien sur la liste du parti républicain du président Serge Sarkissian.
Deux autres anciens responsables arméniens inculpés après la Révolution de velours de l’année dernière se cachent également en Russie. L’un d’entre eux, Vahagn Harutiunian, est un ancien haut responsable du SIS qui a mené une longue enquête criminelle sur les violences postélectorales de 2008 à Erevan.
Harutiunian a été inculpé pour destruction des preuves de la responsabilité d’anciennes autorités arméniennes dans des affrontements meurtriers entre les forces de sécurité et des manifestants de l’opposition. Il a fermement nié les accusations.
Il a été révélé jeudi que l’ancien enquêteur du SIS avait informé le Procureur général Davtian qu’il retournerait en Arménie si les autorités annulaient un mandat d’arrêt délivré à son encontre. Le procureur en chef a déclaré vendredi que son bureau examinait la demande de Harutiunian.