La Géorgie, ex-république soviétique, émerge d’une crise politique ponctuée par une élection présidentielle anticipée avec un président plus mesuré et une démocratie renforcée, estiment des analystes.
Le dernier acte n’est pas encore joué alors que des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés dimanche dans la capitale Tbilissi, protestant contre la réélection de Mikheïl Saakachvili et dénonçant des fraudes, et que des législatives sont programmées au printemps.
Mais si l’opposition se dit décidée à poursuivre ses manifestations jusqu’à ce que les résultats de l’élection présidentielle du 5 janvier soient annulés et un second tour organisé, les analystes jugent cette issue peu probable, le scrutin ayant été globalement validé par les observateurs de l’OSCE.
En continuant à mobiliser ses militants l’opposition se met en fait en ordre de bataille pour les législatives, notent les analystes.
A l’issue du prochain scrutin, le parlement géorgien pourrait devenir une instance réellement représentative et ce pour la première fois depuis la chute de l’URSS et l’indépendance de la Géorgie en 1991.
« Saakachvili est confronté à un défi très sérieux quant à son autorité, mais c’est bon pour le développement de la culture politique en Géorgie. Les développements en cours ont un caractère démocratique », estime Guiorgui Margvelachvili de l’Institut géorgien des affaires publiques.
Après des années de flottement, l’opposition s’est consolidée ces derniers mois. Lorsque M. Saakachvili a convoqué une présidentielle anticipée après la répression de manifestations en novembre, presque tous ses adversaires se sont rangés derrière la candidature de Levan Gatchetchiladzé, entrepreneur vinicole.
L’opposition a bataillé ferme contre le président sortant pendant la campagne électorale et a sérieusement érodé son assise politique. Elu avec 96% des voix en 2004, M. Saakachvili a vu son score chuter à 53,5% quatre ans plus tard.
« Le renforcement de l’opposition est peut-être un signe de maturité démocratique en Géorgie mais seulement si l’unité de l’opposition dure », estime toutefois l’analyste politique Archil Gueguechidzé.
Accusé d’arrogance pendant son premier mandat, M. Saakachvili a changé de ton. Après sa réélection, il s’est adressé à l’opposition et a suggéré la possible entrée de certains de ses dirigeants dans le gouvernement, un scénario inimaginable encore il y a quelques mois.
Il a aussi baissé le ton à l’égard de la Russie qui voit d’un très mauvais oeil sa politique d’ouverture vers l’Ouest et a imposé un large embargo économique à la Géorgie.
M. Saakachvili a regretté samedi que les relations russo-géorgiennes aient tourné au vinaigre et invité le président Vladimir Poutine à sa cérémonie d’investiture.
« Désormais, tout le monde peut voir qu’il a changé, qu’il est un homme politique plus sage et plus mûr », note Alexander Rondeli, chef de la Fondation géorgienne pour les études internationales et stratégiques.
La démocratie en Géorgie est encore loin d’être parfaite. Les observateurs internationaux ont émis de sérieuses réserves sur l’utilisation de ressources publiques par le camp présidentiel pendant la campagne et dénoncé des irrégularités le jour de l’élection.
Mais comparée à la situation chez ses voisins, l’Azerbaïdjan et la Russie, elle reste florissante: les journaux télévisés géorgiens offrent une couverture substantielle des activités de l’opposition qui peut manifester librement.
« Il ne fait pas de doute que la Géorgie est l’un des pays les plus démocratiques de l’ex-URSS. Nous vivons dans un pays libre. Il n’est pas parfait, mais il est libre », estime M. Rondeli.
