Panorama.am a contacté Angela Elibegova, experte en géopolitique du Caucase du Sud, pour commenter les relations entre l’Azerbaïdjan et la Grande-Bretagne, ainsi que les derniers développements concernant l’Artsakh.
Comment la proclamation du nouveau roi britannique pourrait-elle affecter les relations entre Londres et Bakou, compte tenu des projets pétroliers et gaziers britanniques en Azerbaïdjan ?
Angela Elibegova : Les rapports des médias britanniques et les organisations internationales d’investigation ont révélé l’étroite amitié des élites financières et politiques d’Azerbaïdjan avec le roi Charles et le prince Andrew il y a plusieurs années. Ils ont des liens financiers assez sérieux avec les élites azerbaïdjanaises.
Le prince Andrew aime aussi très souvent se rendre à Bakou. Les médias internationaux en ont parlé en détail. La capitale azerbaïdjanaise, les enfants des oligarques, y compris la famille du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev, ont de grands projets d’affaires financières et économiques à Londres, y compris des biens immobiliers assez chers, des maisons, sur lesquels les médias britanniques se penchent souvent. En d’autres termes, les liens financiers et économiques entre les élites britanniques et azerbaïdjanaises sont assez forts.
Comment l’intérêt économique de la Grande-Bretagne a-t-il affecté la position du pays sur la question de l’Artsakh ?
Angela Elibegova : En ce qui concerne les relations entre la Grande-Bretagne et l’Azerbaïdjan, pour ce qui est des intérêts des projets pétroliers et gaziers britanniques, je dois dire qu’ils affectent définitivement les intérêts de Londres dans la région. En 1994, British Petroleum (BP) est entré sur le marché azerbaïdjanais et, grâce à la signature du « contrat du siècle », le consortium dirigé par BP a eu l’occasion de prendre une position de premier plan dans l’industrie pétrolière et gazière azerbaïdjanaise et ne prévoit pas de la quitter au cours de la prochaine décennie.
L’investissement de 100 milliards de dollars de BP dans le secteur pétrolier et gazier azerbaïdjanais signifie également qu’ils ont fait en sorte que les oléoducs et gazoducs azerbaïdjanais ne soient pas endommagés pendant les guerres, qu’aucun dommage ne soit infligé au secteur pétrolier et gazier de l’Azerbaïdjan pendant les hostilités. Les institutions européennes, en particulier la Grande-Bretagne, surveillent de près pour s’assurer que la guerre ne porte pas atteinte à leurs intérêts économiques.
Dans le contexte des développements autour de l’Artsakh, pourries-vous commenter< la décision soudaine du désormais ancien citoyen russe Ruben Vardanyan de s'installer en Artsakh.
Angela Elibegova : En ce qui concerne la décision de Ruben Vardanyan de s’installer en Artsakh, je dois dire que la chose la plus remarquable pour moi ici a été sa déclaration sur les moyens de coexistence et de dialogue avec la société azerbaïdjanaise. Je pense que nous devrions nous méfier de ces déclarations et de ces projets, car nous savons tous que l’arménophobie, en tant que politique d’État en Azerbaïdjan, non seulement n’a pas pris fin après la guerre, mais au contraire, elle s’est encore intensifiée. L’ennemi continue à préparer la guerre, en éduquant ses générations dans une atmosphère de haine envers les Arméniens.
En ce sens, c’est très dangereux pour nous : si nous propageons constamment la coexistence pacifique, alors que l’ennemi continue à préparer de nouvelles agressions et attaques, il peut émousser notre vigilance et créer des illusions qui sont loin de la réalité. Par conséquent, je ne considère pas comme réaliste toute tentative de dialogue et de coexistence pacifique sans un sérieux processus de dénazification en Azerbaïdjan.
Interview réalisée par A. Vardanyan
