La nouvelle médiatrice arménienne, Kristine Grigorian, ne voit aucun conflit d’intérêts dans le fait de porter devant la Cour constitutionnelle, la semaine prochaine, une loi qu’elle a elle-même présentée au Parlement en tant que vice-ministre de la Justice il y a six mois.
L’affaire concerne la criminalisation des insultes graves adoptée par le Parlement l’été dernier.
En vertu des amendements au code pénal arménien adoptés l’été dernier, toute personne insultant des fonctionnaires et des personnalités publiques risque de payer de lourdes amendes ou d’aller en prison pour une durée maximale de trois mois.
Des membres de l’opposition et des militants des droits de l’homme ont critiqué les autorités pour avoir adopté cette mesure, la décrivant comme une atteinte à la liberté d’expression.
L’ancien médiateur Arman Tatoyan a porté l’affaire devant la Cour constitutionnelle, insistant sur le fait que la loi est inconstitutionnelle.
M. Grigorian a repris le bureau de M. Tatoyan en février et doit maintenant présenter l’affaire lors de l’ouverture des débats le 22 mars.
S’adressant aux journalistes vendredi, 18 mars, Mme Grigorian a insisté sur le fait qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts dans son implication dans l’affaire de l’autre côté maintenant.
« Selon notre législation, c’est le gouvernement qui présente sa position. J’ai présenté le point de vue du gouvernement en tant que co-rapporteure », a-t-elle expliqué.
Mme Grigorian a ajouté qu’elle n’allait pas retirer les demandes soumises à la Haute Cour par son prédécesseur. « Mais nous avons des perceptions ambiguës et des problèmes de pratique », a-t-elle ajouté.
M. Tatoyan a refusé de commenter le degré d’impartialité de son successeur dans la poursuite d’une affaire contre des amendements qu’elle a elle-même défendus au Parlement il y a seulement quelques mois. Il s’est contenté de souligner l’importance d’une présentation correcte de l’affaire contre la criminalisation des insultes graves qui, selon lui, est devenue un moyen de protéger les fonctionnaires et les hommes politiques des critiques.
La Cour constitutionnelle n’a pas suspendu l’effet de la loi, bien qu’elle ait accepté d’examiner la requête de Tatoyan.
Depuis l’adoption des amendements l’été dernier, environ deux douzaines d’affaires pénales ont été portées devant les tribunaux en vertu de l’article du code pénal relatif aux « insultes graves ». La plupart de ces affaires concernent le Premier ministre Nikol Pachinian, qui a fait l’objet de critiques virulentes, principalement de la part des nationalistes et des conservateurs, depuis la défaite de l’Arménie dans la guerre contre l’Azerbaïdjan au sujet du Haut-Karabakh en 2020.
Un certain nombre d’organisations internationales, dont l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, ont appelé l’Arménie à dépénaliser les « insultes graves ». L’organisme américain de surveillance de la démocratie Freedom House a déclaré à plusieurs reprises que l’adoption et l’application de la loi controversée mettaient en évidence une « dégradation manifeste des normes démocratiques » en Arménie.
Les autorités arméniennes ont défendu cette loi controversée. Le procureur général Artur Davtian a déclaré au début du mois que la loi était nécessaire pour « réduire ou neutraliser l’ampleur et l’impact des discours de haine. »
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