Une candidate verte à la municipale de Villeurbanne, serait-elle contrainte à renoncer à se présenter à l’élection au motif de ses seules origines turques? C’est la question implicite que pose depuis lundi un article paru dans Libération, édition régionale et national. Jean-Paul Bret, maire socialiste de cette ville de la région lyonnaise, et ancien président du groupe d’amitié France-Arménie, se voit reproché de s’être inquiété de la position de cette personne sur le génocide arménien. Une interrogation motivée par les engagements de cette militante dans le milieu associatif turc, qui est notoirement imprégné par le négationnisme du génocide. La postulante, placée en quatrième position sur la liste verte, est en effet notamment vice-présidente de la fédération des associations turques « cfait ». Or ni cette association turque, ni aucune autre de même nature en France, comme d’ailleurs aucun parti en Turquie, à l’exception des Kurdes, n’a reconnu ce génocide. Ces demandes d’éclaircissements, légitimés par cet état de fait, ont cependant donné lieux, climat électoral aidant, à certaines manoeuvres politiciennes visant à semer le doute sur le comportement républicain du maire.
De son coté la presse turque a révélé mardi 29 janvier 2008 que la candidate n’était ni plus ni moins que Sirma Oran la fille du professeur Baskin Oran, actuellement en France pour promouvoir la sortie d’un livre « MK – Récit d’un déporté arménien ». Dans ce livre, Baskin Oran décrypte et met en forme les souvenirs enregistrés de Manuel Kirkyasaryan (1908-1997). Baskin Oran, personnalité de la gauche turque, entretient une approche pour le moins ambigüe sur l’extermination des Arméniens dans l’empire ottoman, en prenant volontiers les devants sur la question, en tendant la main aux Arméniens, mais en ne parlant que de massacres et en refusant le terme de génocide… Une position de relativisation et de minimisation, dénoncée par l’ensemble du monde associatif arménien.
La COJEP, association turque de France, a publié de son côté un communiqué déclarant : « Le maire sortant et candidat du PS à Villeurbanne pour les élections de mars 2008, M. Jean Paul Bret a fait preuve de discrimination envers une citoyenne française issue des verts dont les parents sont originaires de Turquie sur la liste commune vert et socialistes préparée en vue des élections locales de mars 2008. Nous condamnons avec vigueur cette attitude intolérable au sein de notre République ».
Le quotidien turc Zaman cite de son côté Ali Gedikoglu, le Président de la plateforme Cojep qui dit que « l’incident à Villeurbanne n’était pas une exception, les jeunes politiciens qui sont membres du Cojep ont été constamment sous pression dans les zones où il y a une forte population arménienne. Le parti socialiste, qui a eu un appui énorme des Turcs dans le passé, a graduellement perdu cet appui en raison de ce genres de politiques discriminatoires a ajouté Gedikoglu. « j’invite les Arméniens à agir d’une façon responsable. Néanmoins, j’invite également la communauté turque qui a laissé seule notre fille [ Oran ] dans cette bagarre. »
L’indifférence de la communauté turque encourage ce genre de traitement inadéquat» a dit Gedikoglu ».
Enfin, Jean-Paul Bret a publié un communiqué dans lequel il fait notamment état de la participation de Sirma Oran à la manifestation négationniste turque du 18 mars 2006 à Lyon, dirigée contre l’inauguration du mémorial du génocide des Arméniens.
