La Troïka discréditée par le pouvoir, y-a-t-il place pour une vraie opposition en Arménie ?

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La façon honteuse avec laquelle le conseil du Parti Républicain et son Président ont, le 12 février, insulté Gagik Tzaroukian, le leader de la Troïka (coalition des trois principaux partis de l’opposition parlementaire), lui ont ordonné de quitter le champ politique et menacé d’enquête fiscale, en dit long sur la culture démocratique du pouvoir arménien.
La manifestation prévue pour le 20 février, d’abord interdite par la municipalité, puis annulée par Tzaroukian, suite à son entretien avec Serge Sarkissian, laisse encore un fois la population déçue et frustrée devant le chantage des uns et la lâcheté des autres. Les sphères proches du Kremlin et la presse russe avait diabolisé ce énième rassemblement sur la place de l’Opéra, le présentant comme le prélude à un Maïdan arménien.

La crise s’amplifie.

Ces derniers mois, le pays a vu monter:
. les violences policières contre les militants de divers mouvements (Parlement Fondateur) ou partis (CNA et PAP) à Bertzor et à Erevan,
. le mécontentement social notamment chez les ouvriers de Naïrite privés de salaire depuis 18 mois et prochainement d’emplois,
. l’exaspération des habitants de Gyumri devant l’impotence du pouvoir judiciaire face à la tuerie d’une famille entière par un soldat russe
. la grogne des cadres des petits commerçants et entrepreneurs.

Tout cela a amené le 13 février le chef modéré de la Troïka à durcir le ton par une réplique cinglante aux provocations de Sarkissian, à rappeler la dizaine de dysfonctionnements majeurs de l’État et exiger en vain la tenue d’élections législatives et présidentielles anticipées.

Excluant toute idée de partage du pouvoir et de formation d’un gouvernement de salut national, le clan au pouvoir rappelle par son comportement hégémonique et inquisiteur la période sinistre du régime stalinien.

Le pire est donc à prévoir de la part des milices privées qui avec le soutien des services de sécurité intérieure et la passivité de la justice, sont prêtes à multiplier les actions répressives en vue d’éliminer les éléments les plus actifs et courageux de la société civile.

La crise économique s’est encore accentuée en décembre 2014 avec la chute de 50% de la valeur du rouble et du baril de pétrole, ce qui a eu pour conséquences la baisse des subsides venant des travailleurs émigrés en Russie, la chute du dram et la montée spectaculaire des prix.

La population se tourne de plus en plus vers le crédit bancaire, au taux minimum de 20%. Le système bancaire montre des signes de fragilisation, alors que les importations représentent les 2/3 d’une balance commerciale en péril. Au centre même de Erevan on constate la fermeture de magasins et le licenciement de leurs employés.

Dans l’attente d’un sursaut national

Le principal ennemi du pays mais aussi du pouvoir est désormais le temps. Attendre les élections de 2018, imaginer qu’elles se dérouleront de façon régulière, et permettront un changement de politique et de personnel gouvernemental, apparait illusoire et dangereux pour ceux qui s’inquiètent du délitement du pays, de l’aggravation du climat social et de la poursuite de l’émigration de masse.
D’où proviendra-t-il donc ce sursaut national, indispensable à la pérennité de la République, au maintien de son statut de sujet indépendant de la communauté internationale, et de patrie historique des Arméniens du monde entier?
Sera-t-il issu du sein même du pouvoir, de l’opposition parlementaire, de la société civile ou de l’armée? Les deux premiers ayant perdu leur crédibilité, d’aucuns se tourneront alors vers les deux autres. L’armée reste en principe le dernier recours pour la protection de la patrie et de sa population.

Rappelons-nous de la bataille historique de Sardarabad quand la population, encadrée par des fédaïs et des officiers expérimentés, repoussa en 1918, le dernier assaut turque et permit la naissance de la première République.

Quel soutien moral attendre de la diaspora embarquée dans les commémorations du centenaire ? Va-t-elle enfin regarder le destin de son peuple tel qu’il se présente aujourd’hui, sans se laisser duper par des déclarations de complaisance ?

Robert Aydabirian

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Author: raffi

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