La Turquie juge les assassins de Hrant Dink

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Le procès a débuté hier, mais l’entourage du journaliste dénonce une enquête tronquée.

Par RAGIP DURAN

QUOTIDIEN : mardi 3 juillet 2007

«N ous sommes tous témoins et nous voulons la justice», clame la banderole déployée devant le tribunal par quelque deux mille manifestants pour la plupart vêtus de noir. Certains portent des pancartes «Nous sommes tous Hrant Dink, nous sommes tous Arméniens». Le directeur d’ Agos, («le sillage») principal hebdomadaire arménien de Turquie, avait été abattu par balles le 19 janvier. Sa mort avait bouleversé le pays et plus de 100 000 personnes avaient défilé pour les funérailles de cet intellectuel qui depuis des années menait bataille pour inciter ses concitoyens turcs à affronter la question du génocide arménien de 1915.

Huis clos. Le procès des assassins s’est ouvert hier devant la cour d’assises de Besiktas, sur la côte européenne du Bosphore. Ils sont dix-huit sur le banc des accusés, dont Ogün Samast, 17 ans, originaire de Trabzon (nord), chômeur proche des milieux ultranationalistes, accusé d’être l’auteur matériel du crime. Il avait reconnu les faits deux jours après son arrestation. Mais hier dès le début de l’audience, qui se déroule à huis clos en raison de son âge, il a revendiqué son «droit au silence». Il risque jusqu’à vingt-quatre ans de prison. A ses côtés Yasin Hayal, 26 ans, et Erhan Tuncel, 28 ans, les deux dirigeants du groupuscule et présumés maîtres d’œuvre du complot, encourent la prison à vie. Le premier avait été déjà été condamné pour un attentat contre un McDonald’s en 2004. Le second, considéré comme «le cerveau» de la bande, était aussi un informateur de police qui par deux fois en 2006 avait averti les forces de sécurité du projet. Mais aucune mesure n’avait été prise par les autorités de Trabzon, grand port de la mer Noire et bastion nationaliste.

«Les documents de police montrent bien que l’assassinat était préparé depuis au moins un an et que les services de renseignements étaient au courant de tous ces préparatifs», accusent les avocats et la famille de Dink, qui depuis des mois dénoncent «les évidentes carences» d’une enquête tronquée sous la pression de «certains milieux officiels».

«Il y a des hommes politiques, des militaires actifs ou en retraite qui sont directement ou indirectement impliqués dans cet assassinat», accuse Fethiye Çetin, vieille amie de Dink et avocate engagée depuis des années dans les batailles pour les droits de l’homme. Ainsi, une dizaine de gendarmes et de policiers, qui avaient posé fièrement devant les caméras avec l’assassin présumé qui tenait un drapeau turc, ont seulement été mutés. Mis en cause par les dépositions des accusés, un dirigeant de Trabzon d’un parti ultranationaliste a juste été interrogé. Tout comme un colonel en retraite dont le nom avait été cité dans les procès-verbaux.

«Dissimulation». «Les investigations sur les forces de sécurité en activité à Trabzon où le meurtre a été planifié, à Istanbul où il a été exécuté et à Ankara où les renseignements sont rassemblés n’ont pas été incluses dans le dossier de l’instruction, alors que leurs liens avec les suspects, le non-accomplissement de leur devoir, leur dissimulation de preuve et même leur apologie du crime ont été clairement établis», s’indigne Fethiye Çetin. « Ces enquêtes sont restées séparées alors qu’il faut les unir pour voir l’ensemble de l’affaire», renchérit Ayse Onal, collègue de Dink, affirmant que « des gens ont appelé au moins 30 fois sur le portable de l’assassin présumé, et [ils] n’ont été ni arrêtés ni même interrogés». Pour Human Rights Watch, l’organisation de défense des droits de l’homme, «ce procès représente un test crucial de l’indépendance de la justice turque».

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Author: raffi

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