Le principal assassin de Hrant Dink, célèbre journaliste turc d’origine arménienne, qui avait été condamné en 2011 à 23 ans de prison pour ce meurtre, a été remis en liberté mercredi soir pour « bonne conduite », ont rapporté les médias turcs.
Selon les chaînes privées NTV et CNN Türk et de nombreuses autres publications dont l’agence DHA et Agos, le journal où travaillait Hrant Dink,
Ogün Samast – l’auteur des coups de feu tirés contre le journaliste – a été libéré de la prison de Bolu (nord) « à 19h50″ (16h50 GMT) au motif qu' »il a été déterminé qu’il remplissait les conditions de libération conditionnelle », a précisé NTV.
Cette information n’a pas été confirmée de source officielle, ni par aucun média public.
Hrant Dink, rédacteur en chef du journal bilingue en turc et en arménien Agos, a été tué devant le siège de sa publication sur un trottoir d’Istanbul le 19 janvier 2007.
Signe du choc qu’avait suscité le meurtre de ce journaliste de 52 ans,
chantre de la réconciliation entre Turcs et Arméniens, plus de 100.000 personnes avaient défilé le jour de ses obsèques.
Ogün Samast, mineur au moment des faits, aura finalement passé seize ans et dix mois en prison.
Après sa condamnation, la famille de Hrant Dink avait réclamé pendant des
années que soient retrouvés les commanditaires du meurtre, ne croyant pas à la thèse d’un acte solitaire.
Un tribunal d’Istanbul avait finalement condamné en mars 2021 quatre personnes, dont deux anciens chefs de la police, à la prison à vie.
Selon les médias turcs, 24 autres prévenus avaient été condamnés à diverse peines de prison à l’issue de la 131e audience d’un procès dans lequel 77 personnes étaient mises en accusation.
Mais de nombreux responsables des forces de sécurité, dont d’anciens chefs
de la police d’Istanbul et de Trabzon (nord-est), accusés par la famille de Hrant Dink, avaient été acquittés pour « prescription des faits ».
Pour le chef du CHP, le principal parti d’opposition, Özgür özel, cette libération est « inconcevable ».
« C’est une injustice incroyable commise envers une importante communauté de Turquie, la communauté arménienne », a-t-il déclaré au média en ligne T24.
« Il est clair que quelqu’un a protégé Ogün Samast », a-t-il accusé ajoutant que si ce dernier « peut être libéré pour bonne conduite, alors parler de justice dans ce pays c’est vraiment manquer de scrupule ».
Joint par l’AFP, le représentant en Turquie de l’organisation Reporters sans Frontières (RSF), Erol Onderoglu, a dénoncé « une nouvelle très douloureuse pour la famille Dink et tous ceux qui ont pu connaître cet homme de paix ».
« La Turquie avait seize ans et dix mois (le temps passé en prison par l’assassin, ndlr) pour traduire en justice l’ensemble des acteurs de l’Etat responsables de la préparation de ce meurtre. Ca n’a malheureusement pas été le cas », a-t-il regretté.
Pour RSF cependant, « la libération du tueur ne doit pas marquer la fin de la quête de vérité autour de cet odieux assassinat ».
Istanbul, AFP