Le gouvernement arménien de N. Pachinian s’est engagé à mieux répartir les fruits d’une croissance qu’il affirme pouvoir soutenir, sans se risquer d’ailleurs à des prévisions chiffrées, mais jusqu’à présent, ses mots d’ordre de justice sociale, martelés lors de son grand rassemblement pour le 100e jour de mandat du premier ministre, semblent relever de l’incantation. Pour renforcer ses assises politiques et maintenir à flots une machine économique quelque peu ébranlée par sa révolution de velours, quoi qu’il en dise, N. Pachinian a dû ménager la caste des oligarques, tout en promettant la fin des monopoles qui entretiennent un climat malsain, propice à une corruption qu’il s’est engagé à éradiquer, dans le milieu des affaires.
Mais la tâche n’est pas aisée, et la loi sur une réforme controversée du financement des retraites, mise en œuvre par son prédécesseur S. Sarkissian, qu’il a fait voter en juin, a provoqué les premières grandes déceptions sur le terrain social. N. Pachinian a toutefois voulu regagner du terrain en promettant des baisses d’impôts majeures, qui profiteront à la plupart des travailleurs ainsi qu’à certaines petites entreprises.
Le premier ministre a ainsi indiqué que son gouvernement allait mettre en œuvre “des changements très nets” dans le Code des taxes et impôts d’Arménie, dans un clip vidéo posté sur sa page Facebook mercredi 22 août. “Je peux d’ores et déjà dire que nous allons opter pour une simplification de la législation fiscale et une réduction des impôts sur le revenu des salariés”, a indiqué le premier ministre. N.Pachinian n’a toutefois pas donné les détails de cette nouvelle taxation ni les tranches concernées dans le programme prévu par le gouvernement, se contentant de dire que “plusieurs scénarios” étaient encore à l’étude, mais aucun ne semble envisager la supression de la principale taxe prélevée aux petites entreprises opérant dans le pays.
En vertu de la législation arménienne, les sociétés affichant un chiffre d’affaires annuel allant jusqu’à 115 millions de drams (237 000 $) sont exemptées de la TVA reversée par les plus grosses compagnies. Elles doivent juste s’acquitter d’une “taxe de reversion” équivalant à 2 % de leurs revenus. N.Pachinian a promis de mettre en place une nouvelle taxe “symbolique” pour les petites entreprises réalisant un chiffre d’affaire annuel de 24 millions de drams au plus. Ces entreprises, les plus modestes, n’auraient donc plus à s’acquitter, ou presque, de cette taxe de solidarité, a expliqué N. Pachinian. Davit Ananian, le chef du Comité des revenus de l’Etat (SRC) d’Arménie, s’est montré plus prudent devant les journalistes le lendemain sur les baisses d’impôt dont la question du financement reste en effet posée. Il a en effet indiqué que le manque à gagner en terme budgétaire restait à évaluer.
N. Pachinian entend faire bien mieux et plus vite que ses prédécesseurs, qui s’étaient employés à améliorer la collecte des taxes et impôts et à traquer les contrevenants. Si la lutte contre la corruption mise en place par N. Pachinian depuis son accession au pouvoir porte ses fruits, et s’il se fait fort de restituer au peuple les sommes qui auraient été confisquées par des hommes d’affaires peu scrupuleux appelés à rembourser à l’administration fiscale, avec force amendes, les sommes dues pour des revenus non déclarés, il n’est pas sûr que cela suffise à financer une politique économique encore imprécise, misant sur la hausse des dépenses publiques qui devraient permettre au nouveau pouvoir de préserver sa popularité. Le déploiement avec force publicité, de détachement aux frontières de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, de policiers qui se verront accorder une prime s’inscrit dans le cadre de cette politique de dépenses publiques.