Le parti gouvernemental turc a déposé lundi au Parlement un amendement à un article du code pénal décrié depuis longtemps par l’Union européenne pour les restrictions qu’il apporte à la liberté d’expression, a indiqué l’agence de presse Anatolie.
Le projet du Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) concerne l’article 301 du code pénal.
L’article 301, qui réprime le « dénigrement de l’identité turque », est régulièrement critiqué par l’UE, avec laquelle la Turquie a entamé en 2005 des négociations d’adhésion, comme une atteinte à la liberté d’expression.
L’amendement devrait être débattu cette semaine en commission parlementaire avant d’être voté dans les semaines proches en séance plénière.
Il prévoit une redéfinition plus précise des termes de l’article 301, réduit la peine maximale de prison prévue de trois à deux ans et conditionne l’ouverture de poursuites à l’obtention d’une autorisation du président de la République, a-t-on souligné de source parlementaire.
La démarche attendue de longue date par Bruxelles et promise plusieurs fois, sans résultat concret par le gouvernement du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, intervient à quelques jours de la visite du président de la Commission européenne José Manuel Barroso à Ankara.
M. Barroso doit se rendre en Turquie pour une visite officielle jeudi.
Au cours de cette visite, la troisième d’un président de la Commission européenne en Turquie, le responsable européen fera le point sur les réformes nécessaires au processus d’adhésion à l’UE.
De nombreux militants ont appelé à l’abolition de cet article, mais le gouvernement a indiqué privilégier une réforme du texte pour en réduire le champ d’application.
Ainsi selon le projet proposé le « dénigrement de l’identité turque » est modifié en tant que « le dénigrement du peuple turc », une notion moins vague qui devrait empêcher les procureurs d’intenter des procès, selon les observateurs.
Des dizaines d’intellectuels, dont le prix Nobel de littérature 2006 Orhan Pamuk, ont été poursuivis au titre de l’article 301, souvent pour avoir contesté la position officielle turque sur les massacres d’Arméniens commis pendant l’empire ottoman de 1915 à 1917, sujet sensible en Turquie qui rejette catégoriquement la thèse d’un génocide.
Plusieurs d’entre eux, dont le journaliste d’origine arménienne Hrant Dink, assassiné en 2007, ont été condamnés, mais leurs peines ont été assorties de sursis. Personne n’a jusqu’à présent été emprisonné.