Le négationniste Faurisson à nouveau traité de «faussaire»

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Le procureur reprend à son compte l’expression employée par Robert Badinter.

Par Jacqueline COIGNARD

Libération

QUOTIDIEN : mardi 3 avril 2007

Un «faussaire» de l’histoire viscéralement antisémite. Voilà ce qu’est le négationniste Robert Faurisson, selon le procureur François Cordier. Hier, devant la 17e chambre correctionnelle de Paris, le représentant de la société a complété le portrait de cet ancien maître de conférence de Lyon-III qui poursuit Robert Badinter en diffamation. S’agissant d’une audience civile, le procureur n’a pas fait de réquisitions, mais a présenté des conclusions qui reflètent son analyse du dossier, à la fin de ce procès commencé le 12 mars ( Libération du 13 mars).

Jeté. Pour s’offrir cette tribune, Robert Faurisson s’est jeté sur une phrase prononcée par l’ex-garde des Sceaux sur Arte, en novembre 2006, en toute fin d’une émission sur la liberté d’expression : «J’ai fait condamner Faurisson pour être un faussaire de l’histoire.» Ces derniers mots n’étant pas écrits en toutes lettres dans le jugement du 8 juillet 1981 qui le condamne, Faurisson s’estime diffamé.

«Grâce à ce combat douteux, il entend se voir délivrer un brevet de respectabilité. Vous rejetterez ce qui ressemble à une nouvelle tentative de mystification et d’imposture», demande François Cordier. «Ce faisant, vous direz que tous ces enfants, toutes ces femmes, tous ces vieillards, tous ces hommes qui ont été arrêtés, déportés, exterminés seulement parce qu’ils étaient juifs, tziganes ou encore malades mentaux, demeureront éternellement dans notre mémoire, qui est leur unique sépulture», termine le magistrat. Quelques applaudissements crépitent, même si ce n’est pas autorisé, même si la salle est bondée de partisans de Faurisson.

Quelques instants plus tôt, Me Henri Leclerc, l’un des avocats de la défense, avait hurlé son indignation : «On vous demande de rendre une injustice majeure au nom d’un sophisme, de condamner un juste au nom d’un faussaire !» Et de citer quelques morceaux choisis d’une conférence sur l’Holocauste, récemment donnée à Téhéran par Robert Faurisson. Entre 1933 et 1945, les Juifs européens s’opposaient aux Allemands, voilà pourquoi ils étaient traités comme une minorité hostile, d’après Faurisson. S’ils étaient persécutés, il y avait des raisons : leurs activités de guérilla. Les nazis étaient obligés de prendre des mesures de police plus ou moins dures, mais justifiées, expliquait-il à son auditoire. «Faussaire ! Menteur !» tonne Henri Leclerc. «La grand-mère de Badinter envoyée à Drancy sur une civière à l’âge de 80 ans menait une guérilla ? Et les enfants d’Izieu, tous emmenés et aucun revenu ?» interroge l’avocat.

Vider. Pour que ce procès soit aussi «de chair et de sang», l’avocat cite un long passage de Sonderkommando, un livre de Shlomo Venezia, envoyé à 20 ans à Auschwitz et employé à vider les chambres à gaz de leurs cadavres pour les brûler. «Un jour que le crématoire était plein…» lit Henri Leclerc. Mais ce témoignage, préfacé par Simone Veil, «Robert Faurisson le considère comme un roman de gare», explique Me Bernard Jouanneau, autre avocat de la défense. Mû par une obsession aux antipodes de la recherche de la vérité historique, Faurisson écarte tout ce qui contrarie son postulat : les chambres à gaz n’ont pas existé.

Pendant trois heures, Me Jouanneau démonte la méthode du faussaire déjà décrite par les historiens Annette Wieviorka, Nadine Fresco, Pierre Vidal-Naquet, Henry Rousso, Valérie Igounet… Au beau milieu de cette plaidoirie, Robert Faurisson se lève, déambule, va s’adosser tout au fond de la salle, bras croisés sur son costume à rayures. Sec vieillard de 77 ans aux petits yeux d’acier, il affiche son plaisir et son mépris. Finalement, il revient à sa place, bousculant Me Jouanneau et l’obligeant à s’interrompre pour le laisser passer.

«Prétendu génocide». Pour le procureur, les historiens cités et les avocats de la défense, cet homme se définit par son antisémitisme. Une obsession qui éclate lorsqu’il tient une de ses phrases fétiches : «Les prétendues chambres à gaz hitlériennes d’un prétendu génocide des Juifs ne forment qu’un seul et même mensonge historique ayant permis une gigantesque escroquerie politico-financière.» Henri Leclerc en vient à s’interroger : «Je me demande si cette obsession antisémite monomaniaque ne l’a pas rendu fou tant il a perdu le jugement.» Décision le 21 mai.

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Author: raffi

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