Créé en marge des cérémonies du centenaire du génocide des Arméniens, le prix Aurora, qui récompense depuis 2016 des personnalités s’étant illustrées dans leur combat contre les génocides dans le monde, a été décerné le 10 juin à Erevan, à Kyaw Hla Aung, un avocat et défenseur acharné des droits des Rohingya, cette minorité musulmane de Birmanie en butte depuis des décennies à une politique d’épuration ethnique de la junte au pouvoir. La vague sanglante de répression qui avait frappé en août 2017 cette communauté dépourvue de tous droits dans une Birmanie majoritairement bouddhiste avait contraint des centaines de milliers de Rohingya à se réfugier dans le Bengladesh voisin, l’un des pays les plus pauvres de la planète d’où ils avaient émigré vers la Birmanie au siècle dernier. Cette répression avait jeté une ombre sur le processus de democratisation amorcé en Birmanie, où l’ancienne opposante et prix Nobel de la Paix 1991 Aung San Suu Kii exerce le pouvoir depuis 2015. La dirigeante birmane avait en effet indigné la communauté internationale par son indifférence face aux violences exercées par une armée birmane toujours très puissante sur la minorité musulmane, dont le président turc Erdogan avait pris la défense. Dénonçant à son tour l’indifférence de la communauté internationale face au drame des Rohingya, et plus généralement face aux sort des musulmans à travers le monde, le président turc, prompt à traquer l’islamophobie, s’était érigé en avocat des Rohyngya persécutés, tout en persécutant ses propres concitoyens d’origine kurde, tout aussi musulmans. L’attribution de ce prix doté d’un million de dollars à un éminent représentant de la minorité rohingya est donc tout à l’honneur de l’Arménie, qui a rappelé dans le même temps que les victimes de génocide méritaient d’être défendues et sauvées, quelles que soient leur confession ou ethnie.
