L’écrivain turc Orhan Pamuk fuit son pays

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Le Prix Nobel de littérature est devenu la cible des ultranationalistes.

Delphine Nerbollier, Istanbul

Samedi 3 février 2007

C’est en catimini, coiffé d’une casquette de baseball, qu’Orhan Pamuk a quitté la Turquie. Le Prix Nobel de littérature, cible privilégiée des ultranationalistes depuis ses prises de position sur la question arménienne, s’est envolé jeudi pour New York, officiellement pour y réaliser des activités culturelles. Mais ce départ pourrait bien être une fuite, temporaire, afin d’échapper à un climat de tension et de menaces, deux semaines après la mort du journaliste d’origine arménienne Hrant Dink. Plus tôt dans la semaine, l’auteur de Neige avait annulé deux voyages en Allemagne et en Belgique, où il était censé réaliser une série de lectures publiques et recevoir un titre de doctor honoris causa. Selon les médias allemands, Orhan Pamuk aurait différé ces déplacements en raison de «menaces sérieuses». Des informations que l’intéressé a refusé de commenter jeudi, devant l’unique chaîne de télévision présente dans le hall de l’aéroport d’Istanbul au moment de son départ.

Des menaces publiques

«La réaction d’Orhan Pamuk est très humaine, commente Vecdi Sayar, président du bureau turc de Pen International. Il a certainement peur depuis que les menaces sont devenues publiques et diffusées à la télévision. Il est très naturel qu’il fasse attention, même si son départ est exactement ce qu’attendent ceux qui le menacent.» La semaine dernière, lors de son arrivée au tribunal, l’un des complices du meurtrier présumé de Hrant Dink avait publiquement menacé l’écrivain, l’appelant à «être intelligent».

Deux semaines après l’assassinat de Hrant Dink, le départ d’Orhan Pamuk vient confirmer le malaise des intellectuels turcs. Certes, de nombreuses voix se font entendre afin d’obtenir, entre autres, l’abrogation de l’article 301 du Code pénal turc qui pénalise les insultes à l’identité turque, sur la base duquel Hrant Dink et Orhan Pamuk ont été poursuivis. Mais le moral n’est pas bon. «Le plus grand danger désormais pour la Turquie est que les écrivains et journalistes se taisent et s’autocensurent», redoute Vecdi Sayar. Erol Onderoglu, représentant de Reporters sans frontières, partage cette opinion et rappelle que depuis quelques semaines, notamment depuis la mort de Hrant Dink, les menaces à l’encontre d’intellectuels se multiplient. «Cela ressemble à une campagne d’intimidation organisée. Et, si ces menaces ne sont pas toutes nouvelles, elles sont désormais prises au sérieux par la police, qui vient d’accorder une protection à sept journalistes, académiciens et écrivains menacés.»

Deux semaines après l’assassinat de Hrant Dink, les forces de sécurité se trouvent toutefois au cœur d’une importante polémique que n’a pas calmée le limogeage du chef de la police et du préfet de Trabzon, ville d’origine du meurtrier présumé. Selon la presse turque, la police aurait été informée à 17 reprises des velléités de meurtre du principal suspect à l’encontre de Hrant Dink, tandis que la gendarmerie était accusée d’avoir transformé le principal suspect en héros, le prenant en photo un drapeau turc à la main.

© Le Temps, 2007 .

raffi
Author: raffi

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