Rendez-vous était donné à 14h à Bruxelles, au rond point Schuman, place traditionnellement utilisé pour des manifestations politiques car elle se situe à quelques centaines de mètres du siège de la Commission européenne.
Dix mille citoyens européens d’origine arménienne ont répondu à l’appel de l’initiative « Européens pour l’Artsakh », composée de représentants des communautés arméniennes de toute l’Europe et de plus de 500 associations européennes issues de dix-sept pays dont deux cents rien que pour la France.
Dans le même temps, plus de vingt-quatre autres rassemblements de protestation se sont déroulés dans toute l’Europe.
Cette manifestation avait lieu avant le troisième sommet de la Communauté politique européenne, prévu le 5 octobre 2023, qui va réunir 47 pays d’Europe et prévoie une rencontre entre le Premier ministre de la République d’Arménie Nikol Pachinian et le président de l’Azerbaïdjan Ilham Aliev, avec la médiation du président du Conseil européen, Charles Michel, du président français Emmanuel Macron et du chancelier allemand Olaf Scholz.
Elle visait à rappeler que les participants condamnent la politique de nettoyage ethnique de l’Azerbaïdjan dans l’Artsakh, la complicité silencieuse de la communauté internationale, demandent des sanctions et le droit à l’autodétermination. Le crime ne doit pas payer. Tous les détails des demandes arméniennes sont à retrouver sur : https://www.armenews.com/spip.php?page=article&id_article=108466
Bien avant 14 heures, une foule se pressait sur la place dévolue à la manifestation.
Ecran géant pour que le fond puisse suivre ce qui est dit à l’avant, sono puissante, les Arméniens avaient vraiment décidé de se faire entendre.
Après l’hymne de l’Arménie et celui de l’Artsakh interprété par une chorale d’enfants, le chanteur Vicken entouré de musiciens a chanté Zartirlao, le poing levé. Le discours introductif en arménien, traduit ensuite en français effectué, les représentants des principales communautés venues à Bruxelles ont pris la parole. A commencer par Garen Tatevossian.
Le président des Arméniens de Belgique explique l’union européenne condamne l’offensive de Bakou et déplore les pertes humaines mais le véritable dialogue qui devait être mis en place entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan n’a jamais eu lieu. » Si il n’y a pas de sanctions, dit-il alors les dirigeants européens sont complices » de cette épuration ethnique. » La Russie qui était le seuil espoir sur le terrain n’a pas bougé. mais si ils ne veulent ou ne peuvent pas agir qu’ils laissent la place aux autres ! nous citoyens européens exigeons que l’UE fasse respecter ses valeurs ».
Les interventions des représentants des Arméniens des pays-bas et d’Allemagne ont suivi, chacun d’abord en arménien, puis dans la langue du pays qu’ils représentent. La délégation française, venue en nombre, a ensuite pris la parole.
Mourad Papazian, coprésident du CCAF, a rappelé que le rassemblement visait à » défendre les droits du peuple arménien et à répéter que « Nous ne lâcherons rien ». Nous continuons la lutte et allons faire nôtres les propos de Luis Moreno-Ocampo. Il faut travailler pour toutes les associations européennes s’associent au mouivement qui a débuté aujourd’hui. nous devons avoir le souffle long et non être démoralisé. Nous allons punir les Azerbaidjanais. » Puis, il a demandé à la foule de lever le poing et de prêter serment, le serment de Bruxelles, dans lequel les Arméniens promettent » de continuer le combat au nom de l’Artsakh et de l’Arménie » pour reconquérir les terres qui viennent d’être annexées.
Ara Toranian, lui aussi coprésident du CCAF, a salué les manifestants et » l’unité des enfants et petit-enfants des rescapés du génocide qui sont toujours mobilisés pour ces Arméniens qui souffrent et sont à nouveau martyrisés sur cette terre. Je voudrais aussi saluer le Parlement européen, N. Loiseau, F.X. Bellamy, tous les députés qui le 18 janvier dernier ont voté une motion demandant la levée du blocus et des sanctions contre Ilham Aliev. je ne peux pas en dire autant de l’exécutif. Quelle déception madame U. von der Leyen ! Quelle déception de vois avoir vu troquer le sang des Arméniens contre le gaz azerbaidjanais cent ans après le traité de Lausanne. Nous sommes encore dans cette tragique configuration ( …) pendant toutes les négociations, Charles Michel a essayé de faire reculer le droit à l’autodétermination des Arméniens. Monsieur C. Michel veut-il que l’on fasse la liste des pays qui se sont crées sur la décolonisation et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Alors pourquoi les Arméniens n’y ont-ils pas droit ? » » Mais le plus terrible pour le peuple arménien est le narratif et de discours de l’Azerbaïdjan repris par l’AFP et une grande partie des médias. Faut-il expliquer pourquoi les gens votent avec leur pied et quittent le haut-Karabagh ? Ils ne veulent pas vivre sous le joug permanent du panturquisme (… ) Nous savons que le régime de Bakou est structurellement faciste, anti-arménien et raciste. Alors qu’Aliev ne respecte pas son propre peuple pourquoi les Arméniens iraient-ils subir son régime autoritaire ? » Il a conclu sur les nécessaires sanctions à demander : Il faudra qu’Aliev rende des comptes, tout comme les responsables européens pour leur complicité active. »
Patrick Karam, vice-Président de la région Ile-de-France, a déclaré que la Chredo avait déposé une plainte contre Aliev pour génocide et que son association allait en déposer une seconde pour crimes contre l’humanité. » Ursula von des Leyen est complice. Elle pense qu’elle peut redevenir président de l’U.E. Il faut tout faire pour l’en empêcher ».
François Pupponi, président du Cercle d’Amitié France-Artsakh, confirme que » l’Europe a failli notamment en achetant du gaz à Bakou. Et avec l’argent de l’Union européenne, Aliev s’est ensuite procuré des armes et des bombes ». Il propose donc trois axes : sauver les Arméniens de l’Artsakh et notamment les responsables politiques. C. Michel doit obtenir le 5 octobre la libération de tous les prisonniers politiques. Deuxième point souligné : il faut sanctionner l’Azerbaïdjan et mettre en cause l’UE. Enfin, se préparer à la prochaine bataille. Aliev et Erdogan visent le Siounik. la prochain bataille sera celle de l’Arménie. le génocide a commencé en 1915, il faut tout faire pour qu’il s’arrête.
Le maire d’Arnouville, Pascal Doll, a affirmé que » la France n’a pas été à la hauteur de la situation et que l’UE est nulle ».
Le pasteur Mikaélien au nom des toutes les églises, a voulu donner un souffle d’espoir rappelant que » l’Histoire n’était pas finie. Notre peuple sera toujours là. A nous de rester mobilisés. »
Lui ont succédé les représentants de l’église apostolique arménienne.
Bernard Kouchner, entre autres ancien ministre des affaires étrangères de la France, avait aussi tenu à être présent. Dans un court message, il a enjoint la communauté internationale à » arrêter cette course contre la mort » et à faire respecter les frontières de l’Arménie notamment en renforçant les patrouilles européennes en Arménie.
Marie Toussaint, député européennes Les Verts , constate que » l’indépendance se meurt. C’est une faute morale et une tragique erreur géopolitique de l’Europe. » Une Europe qui ne dit pas non à ce qu’il se passe est de facto complice. » L’Europe a lâché les Arméniens. A se vouloir indifférente, elle montre sa faiblesse. We stand with Armenia. » Et elle conclut en demandant des sanctions économiques et commerciales contre Bakou, un envoi des forces de paix. Elle souhaite également qu’E. Macron renvoie l’ambassadrice d’Azerbaidjan en France ainsi que tous les diplomates azerbaidjanais.
Karen Melchior, député européenne du Danemark, a dit que plusieurs fois, les députés européens ont demandé à C. Michel et J. Borrel d’agir sans qu’ils ne bougent.
Daniel Salvatore Schiffer, philosophe et essayiste belgo-italien, « en tant qu’intellectuel juif » en a appelé » à Israël pour qu’il cesse d’armer l’Azerbaïdjan. je dis à Israël d’être au côté de l’Arménie. Vous avez le soutien de trente intellectuels qui veulent réveiller les consciences, accuser devant le TPI Aliev et ses complices de génocide. » » Aujourd’hui, je suis un Arménien », a-t-il conclu annonçant la sortie en janvier prochain d’un ouvrage sur le sujet.
C’est Hovannès Guevorkian, représentant du Haut-Karabagh en France, qui a conclu cette manifestation par un discours en arménien.
Reportage photos de Roger Kasparian
