Dans son édition en date du lundi 28 janvier 2008 le quotidien turc Yeni Safak affirme que l’objectif du gang Ergenekon était un affrontement entre turcs et kurdes tandis que le quotidien Sabah a indiqué pour sa part que le président turc désirait une résolution de tous les assassinats non élucidés. Le journaliste Yildirim Turker dans le quotidien Radikal est plus septique . Dans un article intitulé « Ergenekon’un ahlaký » il soutient que c’est seulement un acte de « saignée » et les accusés ont été probablement sacrifiés après un accord entre le gouvernement et les militaires pour apaiser le peuple au moment de l’anniversaire de la mort de dink et qu’en réalité personne n’a intérêt à se débarrasser de l’état profond et implication à découvrir qui se cache derrière le meurtre de Hrant Dink.
Selon le quotidien Posta le général à la retraite Veli Kucuk était entré en contact via Muhammed Yüce un ancien sergent de l’armée avec le Colonel à la retraite Fikri Karadag lui demandant de trouver un tueur à gages pour faire le travail. Fikri Karadag est le chef de l’Association ultranationaliste pour l’Union des Forces Patriotiques (VKGB), dont certains des anciens chefs sont déjà sous les verrous pour crimes de vol et d’extorsion. C’est pourquoi au moins deux membres du VKGB ont été mis en examen par rapport à l’enquête sur Ergenekon à Diyarbekir. Le tueur à gages qu’ils ont trouvé a été identifié par la police comme Selim A. Le gang Ergenekon aurait également trouvé 2 millions de YTL – la rétribution promise à Selim A. et un revolver Glock pour l’assassinat. Selim A. a été capturé après la découverte par la police du plan suite à l’écoute de conversations de téléphone. La Police aurait trouvé des preuves liant le gang* Ergenekon à l’assassinat de Necip Hablemitoglu, abattu en 2002 après que les habitants de la région sz Bergama se soient opposés à la prospection d’or près de leurs maisons.
Tous les journaux turcs ont salué le procureur Zekeriya Oz, qui mène l’enquête sur le dépôt d’armes
d’Umraniye pour son courage. Le quotidien Taraf affirme que le procureur a pourtant plusieurs fois été menacé par Oktay Yildirim et Muzaffer Tekin anciens membres des forces armées turques actuellement emprisonés.
Taraf cite un policier qu’il parle de lui comme « un kamikaze ». La même source a déclaré au quotidien : « Il n’aurait pas été capable de prendre en charge l’enquête jusqu’ici sans preuves solides. Le chef de la Police d’istanbul Celalettin Cerrah s’est même arrêté quand il a vu les noms vers qui l’enquête menait mais Oz ne s’est pas arrêté. M. Oz est un lutteur et il croit en la suprématie de la loi. Le procureur a conduit un très long processus d’enquête. Il a passé des jours et des nuits au département de la police ».
Le chef du Bureau Spécial « Ozel Buro » a aussi été arrêté dans le cadre de l’opération. L’homme nommé Erkut Ersoy, qui a fondé une organisation appelée le Groupe de renseignements du Bureau Spécial – qui selon Ersoy lui-même a donné des renseignements à certaines agences d’état depuis 1998 – a été arrêté jeudi 24 janvier. Erkut Ersoy est connu pour être un bon ami de Fikri Karadag. Cette organisation unique est une unité de renseignements privée dont les employés rassemblent des informations comme des officiers de services secrets réguliers. Dans une précédente interview avec la presse, Erkut Ersoy avait déclaré que 756 personnes d’une grande variété de domaines, étudiants, docteurs, ménagères et avocats ont travaillé avec le Bureau Spécial. Erkut Ersoy a dit que son organisation était semblable aux « Forces Blanches » une unité spéciale composée de personnel civil sous le Département Spécial de la Guerre dans l’Etat Major turc. Erkut Ersoy a aussi prétendu que son groupe était composé de l’Etat Major et des services secrets turcs ( MIT) aussi bien que de policiers. Il a déclaré « les agents du Bureau Spécial disent qu’ils se battent contre chaque organisation terroriste, en particulier le parti des Ouvriers du Kurdistan (PKK) et contre les allégations de génocide arménien ». Cette structure unique était selon Ersoy pas une alternative aux propres sources des services secrets de l’état turc. « Nous ne sommes pas des rivaux, nous ne désirons pas non plus prendre leurs devoirs. Seulement nous soutenons les instutions de l’Etat lié à la sécurité. Nous les aidons à achever certaines choses plus rapidement et obtenons des résultats. Certaines personnes ont peur de s’approcher directement à la police pour de multiples raisons. Nous agissons comme des intermédiaires. Bientôt nous fonderons une ligne pour dénoncer les crimes. Tout notre travail est fait avec la connaissance des propres agences de renseignements de l’état. Ils nous protègent. Nous n’aurions pas été capables de faire cela autrement ».
Ufuk Uras, député et chef du parti de la Liberté et de la Solidarité (ODP) a déclaré que l’opération Ergenekon est une réaction face à la consolidation de la démocratie et de la suprématie de la loi en Turquie.
« Inactiver de tels gangs qui forment une partie de l’état profond est un essai pour la démocratie et l’autorité de la loi » a dit le député Uras dans une déclaration écrite. « Comme notre histoire nous l’a montré si de tels pas pour dénicher des éléments hors-la-loi sont retardés, les problèmes deviennent plus grands. La révélation du gang de Susurluk était un premier pas, mais seuls quelques tueurs à gages ont été punis » a noté Uras.
Bülent Orakoglu l’ancien chef des services secrets de la police nationale et auteur d’un livre essayant de déchiffrer les liaisons entre les éléments de l’état et les renégats a déclaré qu’il s’attendait à une telle opération à cause de la détention récente de gens impliqués dans les gangs. « Mais ce n’est pas une simple organisation. Elle a des connexions et à l’intérieur et à l’extérieur de la Turquie. Ils ont de l’argent. … Ils ont organisé des attaques mortelles, contre des Chrétiens ou d’autres, quand le gouvernement essayait de prendre des mesures positives conformément à la démocratie » dit-il.. Il a ajouté que ces personnes utilisent le nationalisme et parfois même la religion pour légitimer leurs attaques et reçoivent la sympathie de gens qui ne se sont pas joints à l’organisation.
« Quand le public verra que ceux-ci sont de sales gens qui emploient le nom du pays, le drapeau et la fierté nationaliste pour leur propre avantage, ils n’auront plus de sentiment de compatission envers eux. Et ils seront finis quand nous commençerons à voir les arrestations de plus en plus de gens qui ont infiltré les militaires, la bureaucratie, les forces de sécurité et même les médias ».
Le journaliste Avni Ozgürel, un journaliste qui a étudié des réseaux de l’ombre a dit qu’il attendait l’acte d’accusation avant d’affirmer ses espoirs d’un nettoyage de l’état profond : « j’aimerais voirde quoi ils ont été accusés et s’ils seront punis pour ces accusations avant de faire un commentaire. Nous avons vu de telles détentions dans le passé, mais les accusés sont sortis après quelques jours ».
Les suspects ont été présentés vendredi devant un tribunal de Besiktas d’Istanbul tandis qu’un qu’un autre général à la retraite Zekeriya Oztürk a été arrêté.
Selon plusieurs témoins 700 kilos d’explosifs ont été trouvés dans un fourgon à Istanbul appartenant à ce gang.
Dans une déclaration publiée vendredi, Nusret Gürgoz, avocat de la partie civile dans le meurtre du journaliste arménien Hrant Dink, a dit que la récente opération de police contre Ergenekon avait donné de l’espoir pour une découverte des forces réelles derrière le meurtre de Dink.
« Nous sommes pleins d’espoir maintenant que l’Opération Ergenekon a eu lieu. Si la lumière se fait sur le meurtre de Hrant Dink, cela pourrait être un début pour les autres ».
Un grand nombre de documents montrant clairement la structure hiérarchique du groupe a aussi été saisi dans les récentes opérations. Le manifeste de l’organisation et des diagrammes organisationnels montrant la hiérarchie du groupe, des plans pour le futur et les listes d’agences que l’organisation projettait d’infiltrer figurent parmi les documents aux mains du Procureur Zekeriya Oz. Selon Hürriyet quelques membres du réseau Ergenekon ont été dans le passé des membres actifs du Hezbollah.
Des 33 personnes arrêtés vingt ont été libérés dont Fuat Turgut, l’avocat de Yasin Hayal suspecté d’avoir commandité le meurtre de Hrant Dink et Guler Komurcu éditorialiste au quotidien Aksam.
« Je m’estime extrêmement offenser pour avoir été accusé d’activités terroristes après avoir travaillé comme avocat dans des affaires contre des terroristes » a déclaré l’avocat Fuat Turgut à sa sortie.
Veli Kucuk et Kemal Kerincsiz ont été inculpés et écroués samedi. Les chefs d’accusation frappant les deux hommes n’ont pas été immédiatement précisés. L’enquête est menée dans le cadre d’une loi qui restreint la couverture médiatique de tels événements.
