Des centaines de Turcs ont manifesté mercredi en direction de l’ambassade et du consulat des Etats-Unis pour protester contre une résolution américaine qualifiant de génocide la mort de centaines de milliers d’Arméniens en Turquie en 1915.
Les membres de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants doivent se prononcer sur ce texte mercredi. La secrétaire d’Etat Condoleezza Rice et son collègue à la Défense Robert Gates les ont appelés à voter contre.
Les membres du parti des travailleurs (gauche) ont protesté contre cette résolution devant l’ambassade américaine à Ankara, scandant des slogans hostiles aux Etats-Unis, a-t-on appris de source diplomatique.
Cité par l’agence de presse officielle Anatolie, Nusret Senem, un responsable du parti, a affirmé que cette « accusation de génocide était un mensonge international, impérialiste et historique ».
Les manifestants ont ensuite abandonné sur le trottoir plusieurs livres, écrits, selon eux, par des historiens et hommes politiques arméniens affirmant que le génocide n’a pas eu lieu.
Environ 200 personnes se sont également rassemblées devant le consulat américain à Istanbul, selon la chaîne de télévision privée NTV. Le groupe s’est dispersé après avoir lui aussi laissé des livres.
Craignant des représailles, l’ambassade des Etats-Unis a demandé mardi à ses ressortissants de ne pas s’exprimer sur la mesure, qui a toutes les chances d’être approuvée à la chambre des représentants.
Le président turc Abdullah Gul a écrit à son homologue américain George W. Bush pour l’avertir qu’un vote du Congrès reconnaissant le génocide arménien porterait préjudice aux relations entre les deux pays. Dans son courrier, il brandit la menace de « graves problèmes » dans les relations bilatérales si ce projet de loi devait être adopté, selon les services de la présidence turque.
Les représailles turques pourraient prendre la forme d’un blocage des voies d’accès à l’Irak et à l’Afghanistan via la Turquie. La base aérienne d’Incirlik, site stratégique utilisé par les Etats-Unis, pourrait quant à elle être fermée. Selon Robert Gates, environ 70% des cargaisons aériennes américaines pour l’Irak passent par la Turquie.
L’adoption d’un texte comparable en 2001 par le Parlement français avait entraîné des tensions bilatérales et l’annulation d’accords militaires entre Paris et Ankara.
Les relations entre les deux pays se sont encore détériorées après le vote, l’automne dernier, d’une autre loi sanctionnant la négation du génocide arménien.
