L’explosion des cités, après l’affaire du voile, rappelle les difficultés inhérentes à la gestion des contradictions entre la société française et son émigration musulmane. Faut-il s’étonner de ces manifestations de violence qui ont contraint le gouvernement à décréter le couvre-feu dans certaines zone « sensibles » du pays ? En fait, le paradoxe émanerait plutôt de l’absence de troubles, tant il apparaît que la situation des « jeunes des banlieues » collectionne tous les ingrédients d’une déflagration. Au plan social d’abord, avec une population au ban de la société, désuvrée, ghettoïsée, en butte au racisme. Au plan politique ensuite, avec les plaies mal cicatrisées du colonialisme, l’identification à la situation au Proche-Orient et le prosélytisme d’un monde musulman en ébullition. Même si tous ces éléments ne sont pas conscientisés, ils constituent le soubassement de ces petits foyers insurrectionnels qui n’attendent désormais plus qu’une force structurée pour les transformer en une véritable flambée révolutionnaire.
Certes, il ne fait nul doute qu’en l’état actuel, le gouvernement parviendra à contrôler la rue. Pour autant, cela ne réglera pas automatiquement tous les problèmes, lesquels interpellent l’ensemble des couches de la société française, et en premier lieu ses composantes identitaires. C’est le cas, parmi beaucoup d’autres, des Arméniens. Leur « intégration modèle », aux antipodes de ceux qui brûlent des voitures et défient les forces de l’ordre, ne signifie en effet pas qu’ils n’ont pas leur mot à dire sur les changements qui sont en train de se concocter. Comme Français de base, au nom de la défense de l’Etat et du bien commun. Mais aussi comme partie prenante d’une collectivité originale qui a son histoire, ses intérêts, sa dignité, son développement à défendre, à l’instar de toutes les entités, qu’elles soient syndicales, culturelles, sexuelles ou religieuses.
Quel apport original la parole arménienne pourrait-elle apporter à ce débat ? Il y a d’abord sa contribution à la défense d’un certain nombre de principes de base : le respect du droit à la différence dès lors qu’il ne se heurte pas aux valeurs des droits de l’homme et qu’il est compatible avec la cohésion républicaine. Il y a aussi l’axiome de l’égalité des citoyens devant l’Etat, auquel s’ajoute, corollaire indispensable, celui de la défense des libertés individuelles par rapport au groupe d’appartenance, toujours tenté, lui, de les assujettir. Forts de leur expérience spécifique, les Arméniens sont habilités à proposer à l’état des réformes visant à protéger les minorités quand des fléaux comme le racisme ou le négationnisme les atteignent dans leur dignité. Ces mesures doivent également pouvoir trouver des applications intelligentes dans l’éducation nationale, à travers des initiatives visant à favoriser la connaissance de l’autre, notre voisin de palier, avant même que de donner à connaître les mécanismes ayant entraîné la formation du massif jurassien. Elles doivent parallèlement donner aux gens les moyens d’accéder d’une manière harmonieuse à leur culture d’origine, s’ils le souhaitent, plutôt que de chercher à imposer le nivellement.
Bref, les idées, les projets et les chantiers ne manquent pas. Mais face à la complexité des enjeux qui se profilent, les pouvoirs publics seraient bien inspirés de régler les problèmes tels qu’ils se posent avant que d’envisager de s’en créer d’autres. A cet égard, la question de l’intégration multirisque de la Turquie demanderait à être traitée avec plus de rigueur et de courage politique que ce n’est actuellement le cas. Sauf à considérer bien sûr, comme le disait un certain politicien de la IIIe République, qu’il n’est de problème si complexe que l’absence de solution ne finisse par résoudre.
L’explosion des cités
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