L’opposition inflige un camouflet au parti Contrat civil lors des municipales

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Comme lors des précédents scrutins, l’abstention a été très forte, aux élections municipales qui se déroulaient dans plusieurs villes d’Arménie, dont la deuxième du pays, Gyumri, ce dimanche 17 octobre, mais elle a profité cette fois à l’opposition, qui a infligé un camouflet au parti Contrat civil du premier ministre Nikol Pachinian, qui n’a pu, malgré les pressions exercées, avoir raison du maire emprisonné d’une municipalité de la province frondeuse du Syounik. Le contrôle de cette province du sud du pays, dont les frontières sont menacées, depuis un an, par l’armée azérie, était l’un des grands enjeux de ce scrutin, qui se déroulait dans sept autres municipalités dans tout le pays. Dans la plupart d’entre elles, les électeurs ont voté suivant un mode de scrutin proportionnel, pour des partis appelés à constituer des conseils municipaux qui, à leur tour, devront élire les maires des villes concernées. La ville vers laquelle se tournaient tous les regards durant ce scrutin était Goris, chef lieu du Syounik et les villages environnants qui constituent une entité administrative unique. Son maire sortant, Aruch Aruchanian, avait été arrêté en juillet pour des chefs d’accusation qu’il avait rejetés comme politiquement motivées. Les deux adjoints d’Aruchanian avaient été eux aussi arrêtés en août mais libérés depuis. Cette arrestation s’inscrivait dans le cadre d’une épreuve de force avec N.Pachinian qui, marteau au poing, avait martelé durant sa campagne pour les législatives anticipées du 20 juin qu’il écraserait les maires de la région et des autres régions du pays qui avaient pris position pour l’opposition. Reconduit à la tête du gouvernement à la faveur de ces législatives, il avait mis ses menaces à exécution, renforçant la fronde dans cette région du Syounik où les provocations militaires persistantes de l’armée azérie ont renforcé le sentiment d’insécurité de ses habitants. Aruchanian, qui dirige la municipalité depuis 2017, n’a à ce jour été reconnu coupable d’aucun crime et a donc pu se présenter aux élections pour briguer un nouveau mandat. Le maire de 30 ans est affilié à la principale formation d’opposition représentée au Parlement, l’alliance Hayastan dirigée par l’ex-président Robert Kotcharian. Mais il a préféré s’allier à une alliance plus modeste pour participer aux municipales. Selon les premiers résultats du scrutin, cette alliance portant le nom Aruchanian aurait remporté 62% des suffrages, le parti Contrat civil au pouvoir n’en recueillant que quelque 36%. Son candidate, Vladimir Abunts, a reconnu sa défaite, en déclarant dans la soirée même du scrutin, devant les journalistes : “Je ne m’attendais pas à un tel résultat, car durant la campagne, nous avions la conviction que nous allions gagner”. Les électeurs n’ont manifestement pas cédé aux intimidations du pouvoir, qui avait déployé des policiers devant le QG du parti d’opposition. Cette présence policière massive le jour des élections a été désignée, par l’alliance Aruch Arushanian comme une tentative du gouvernement d’ intimider ses partisans, mais le parti au pouvoir n’était pas en reste, accusant cette formation politique d’utiliser son influence dans la ville et la région pour dissuader les électeurs de voter en faveur du candidat du parti au pouvoir. Des éléments des unités spéciales des forces de police avaient été envoyées depuis Erevan pour mener une perquisition dans le QG de campagne de l’alliance d’opposition à Goris, qu’ils ont occupé pendant plusieurs heures. Un avocat de l’alliance a faiot savoir qu’ils suspectaient le père du maire sortant et directeur de sa campagne, Gagik Aruchanian, d’achat de votes. Allégations qu’il a récusées avec véhémence. Plus d’une vingtaine de partisans d’Aruchanian, qui s’étaient rassemblés au siège de l’alliance après la fermeture des bureaux de vote, ont exprimé leur joie à l’annonce par Menua Hovsepian, un maire adjoint de Goris libéré de prison la semaine dernière, des premiers résultats du scrutin. “Le peuple de Goris s’est exprimé [pour ] la dignité, le Syounik et le pays”, a commenté M.Hovsepian. Le nouveau conseil municipal de Goris devrait sans doute réélire A. Aruchanian au poste de maire. Reste à savoir si les tribunaux arméniens accepteront de le libérer jusqu’au verdict de son procès.

Le vote était d’autant plus suivi au Syounik que la région est éminemment stratégique depuis que la guerre de l’automne dernier a fait ressurgir l’ancienne frontière soviétique avec l’Azerbaïdjan dans les régions au sud-ouest du Karabagh jusque là contrôlées par les Arméniens. Les maires de la quasi-totalité des villes et villages de la région rendent Pachinian responsable de la défaite de l’Arménie dans cette guerre de 44 jours à laquelle a mis fin le 9 novembre 2020 un cessez-le-feu négocié par la Russie, et exigent depuis sa démission. Certains de ces maires avaient appelé leurs partisans à empêcher Pachinian de visiter le Syounik. La plupart des maires du Syounik ont rallié l’alliance de Kotcharian lors des législatives anticipées de juin remportées par le Contrat civil. Trois d’entre eux avaient été arrêtés peu après le scrutin. L’un de ces maires, Mkhitar Zakarian, dirigeait une autre municipalité regroupant les communes de Meghri et d’Agarak et plusieurs villages de cette région au sud de Goris. Le parti de Pachinian a été battu là aussi, mais par le parti Hanrapetutyun (République), une formation pro-occidentale qui est officiellement dans l’opposition mais apporte son soutien au gouvernement arménien sur certaines questions. Le parti au pouvoir l’a toutefois emporté dans deux autres communes, plus modestes et rurales, du Syounik. Mais c’est à Gyumri qu’il s’est vu infliger le plus sévère camouflet. L’homme d’affaires natif Samvel Balasanian, qui dirige depuis neuf ans la deuxième ville du pays dont il est lui-même natif, ne cachait pas ses liens avec l’ancien gouvernement arménien, qui avait aidé à sa réélection en 2016. Si S.Balasanian ne briguait pas personnellement un nouveau mandat de maire, il était bien présent dans ces élections municipales, auxquelles participait un parti portant son nom, qui avait été créé pour l’occasion. En tête de liste, cette formation présentait l’un des proches du maire sortant, Vardges Sanosian. L’alliance Balasanian a recueilli 36,6 % des voix lors d’un scrutin marqué par un taux d’abstention record, de l’ordre de 76%. Le Contrat civil est arrivé en deuxième position, avec près de 30 % de suffrages. Trois autres forces politiques, dont le Parti républicain d’Arménie anciennement au pouvoir de l’ex-président Serge Sarkissian, qui est la deuxième force de l’opposition après l’alliance Hayastan au Parlement arménien, ont été relégués loin derrière, obtenant à peine les 4% leur permettant de siéger au conseil municipal. L’alliance Balasanian est désormais le maître du jeu à Gyumri, mais elle n’a pas fait savoir si elle entendait passer une alliance avec le parti de Pachinian ou les autres groupes d’opposition pour élire le futur maire de la ville.

Garo Ulubeyan
Author: Garo Ulubeyan

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