Non, à la Turquie

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Le 17 décembre dernier, les chefs d’États de l’Union européenne ont décidé de l’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.

Bien que ce processus de négociation soit long – puisqu’une période de 10 ans est évoquée – et que son aboutissement n’en soit pas garanti à l’avance, nous sommes nombreux en France et en Europe à éprouver une très vive réticence à l’idée même de l’ouverture de ces négociations.

Sur mon site internet www.depute-mallie.com, le 31 décembre, il y avait plus de 11 500 personnes qui avaient voté au sondage que j’ai mis en ligne pour dire à 76,56% « Non, la Turquie n’a rien à voir avec l’Europe ».

Notre réticence est d’autant plus forte que le gouvernement turc rejette toute autre possibilité que celle d’une adhésion pleine et entière à l’Union européenne et que le Premier ministre turc, monsieur Erdogan, n’a pas hésité à se répandre en menaces et exigences sur les plateaux de télévision à la veille du sommet des chefs d’État européens. Un bel exemple de négociation…

L’entrée de la Turquie dans l’Union européenne nous concerne tous, car elle aurait des conséquences négatives énormes sur la construction de l’Europe, son avenir, son identité. Selon le rapport de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, nous savons que le coût financier pour la France pour faire rentrer la Turquie serait de 3 à 5 milliards d’euros par an jusqu’en 2025 et de 25 à 33 milliards d’euros par an pour l’Union européenne. De plus, qu’en serait-il des délocalisations intra-européennes si la Turquie devenait membre de l’Union européenne, quand on connaît le coût de la main-d’œuvre dans ce pays ?

Le partenariat privilégié ne doit pas constituer non plus un échappatoire aisé, car il se heurte, comme l’adhésion, à des obstacles majeurs qu’il me paraît impossible d’ignorer :


  • Le gouvernement turc refuse toujours de reconnaître l’incontestable réalité du génocide arménien et pratique une intolérable négation de ce génocide. Le négationnisme turc est tel que l’évocation de la spoliation, la déportation, le massacre planifié et organisé en 1915 de 1.5 million d’Arméniens est aujourd’hui pénalement réprimé par l’article 305 du Code pénal turc, en particulier dans ses décrets d’application.

  • En 1974, la Turquie a envahi militairement la moitié de l’île de Chypre, aujourd’hui Etat membre de l’Union européenne. 30 ans plus tard, 40 000 hommes de l’armée turque maintiennent cette occupation et Nicosie est déchirée par la « ligne verte » (une sorte de mur de Berlin).

  • La Turquie impose un inacceptable blocus terrestre à l’Etat arménien, en fermant ses frontières. Pour m’être personnellement rendu en Arménie à plusieurs reprises, j’ai pu constater que seul un pont aérien permet un médiocre ravitaillement de ce pays.

  • La situation des droits de l’homme en Turquie ne peut pas être regardée comme compatible en l’état actuel des choses avec les valeurs de l’Europe : il est fait état de 1 383 cas de torture en 2003 et de plus de 10 000 prisonniers politiques.


Le règlement de ces 4 points devrait constituer un préalable absolu à l’entame de toutes discussions avec la Turquie et une condition sine qua non à la mise en place d’un partenariat privilégié et certainement pas d’une adhésion.
La Turquie ne peut prétendre entrer dans l’Europe puisqu’elle ne fait pas partie de l’Europe, c’est une évidence, tant sur le plan géographique qu’historique. Les 3% du territoire turc qui sont du côté européen du Bosphore ne doivent pas servir d’alibi.

La Turquie reste donc un Etat de 700 000 km2 d’Asie mineure dont les frontières touchent la Syrie, l’Irak et l’Azerbaïdjan. Faire entrer la Turquie dans l’Europe veut dire déplacer nos frontières sur les hauteurs du Kurdistan comme dans le désert irakien. Faire entrer la Turquie dans l’Europe, c’est déplacer son centre de gravité au cœur d’un des territoires les plus explosifs de la planète.

Avec ou sans préalable, j’étais, je suis et je resterai donc contre l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne et toute habileté d’arguties diplomatiques subtiles n’y change rien. C’est pourquoi, le 17 décembre, il était de mon devoir d’être à Bruxelles, parmi la communauté arménienne, avec mon écharpe de député, pour dire : NON !

raffi
Author: raffi

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