Pour le maintien de Mgr Norvan Zakarian

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La crise économique touchant depuis quelques années la planète se double pour sa partie arménienne d’une grave crise morale qui affecte quasiment tous les secteurs de la nation. On ne dressera pas ici la liste de toutes ses manifestations. Elles sont de notoriété publique, depuis les suspicions permanentes sur la régularité du système politique jusqu’aux divers classements plus ou moins médiocres de l’Arménie dans l’ensemble des études consacrées au respect des règles démocratiques (corruption, transparence, justice, libertés, etc.). Ce climat se traduit dans la mère patrie par une émigration massive de la population et se répercute en diaspora par une certaine atmosphère de morosité. La désillusion étant à la hauteur des espoirs placés dans l’indépendance arménienne qui, aux prises à maintes difficultés internes comme externes, peine à satisfaire aux attentes qu’elle avait suscitées. La demande de démission qu’a envoyée Mgr Norvan au Catholicos lundi 1er juillet s’inscrit clairement dans ce contexte de désenchantement. Même si telle n’était pas son objet, elle vient rappeler la confusion d’un paysage politique générale qui n’épargne même pas l’Eglise apostolique, censée pourtant être le pilier de la nation, un garant de sa stabilité.

Depuis quelques années, une succession d’affaires révèlent les fissures et les doutes d’une institution fragilisée par le processus de réformes auquel elle s’est astreinte. Entre restructuration, mise en cause des rentes de situations et dissidence, scandale financier et polémique, son actualité, depuis Etchmiadzine jusqu’à Nice en passant par Moscou ou Paris, ne cesse de défrayer la chronique. Mais jamais encore, jusqu’à ce jour, ces événements n’avaient projeté au-devant de la scène une personnalité de l’envergure du Primat du diocèse arménien de France. Son initiative, bien que discrète – mais pouvait-elle le rester longtemps ? – est d’autant plus surprenante que Mgr Norvan Zakarian n’a rien d’un trublion. Outre son prestige moral et sa force tranquille, ce prêtre, tout dévoué à son sacerdoce et à sa foi, incarne aussi la fidélité à Etchmiadzine. Ce qui lui sera d’ailleurs parfois reproché. Faut-il donc que la situation ait été tendue pour entraîner une telle décision de sa part ! 

Très peu d’informations circulent sur les circonstances qui ont motivé son geste. Sans entrer dans le jeu des rumeurs qui font bien évidemment état de désaccords avec le Catholicos sur différents sujets, cette initiative suppose pour le moins un certain climat de tension. Même si les milieux officiels de tout bord s’accorderont au moins sur une chose : en diminuer la portée ; le linge sale se lavant comme il se doit, en famille. Il n’empêche que le fait n’est pas ordinaire, et que sa révélation, qui a filtré au corps défendant des principaux intéressés en France comme en Arménie, en dit long quant à la gravité d’un malaise général qui touche jusqu’à l’église.
Les conséquences de la situation ainsi créée sont en tout cas multiples. Dans un premier temps, elles risquent d’apporter de l’eau au moulin de la dissidence qui ne manquera pas d’en tirer argument pour justifier de ses choix. Elles pourraient également fragiliser le processus de réformes en cours, pour la réalisation desquelles le Primat du diocèse avait pourtant pesé de tout son poids. Mais surtout, elles accentuent la crise de confiance à l’égard des pratiques d’une hiérarchie religieuse qui dans sa volonté revendiquée de modernisation, peine visiblement à trouver le meilleur équilibre entre autorité et autoritarisme, vitesse et précipitation, directivisme et centralisation. L’enfer étant pavé, comme on le sait, de bonnes intentions. 

La balle est en tout cas aujourd’hui dans le camp du Patriarcat d’Etchmiadzine qui dispose encore de la possibilité de refuser cette demande, de tenter une conciliation et de convaincre Mgr Norvan de remplir son mandat jusqu’à son terme. Un tel positionnement procéderait d’une volonté d’écoute et d’apaisement. Elle viendrait contredire les critiques qui imputent la crise de l’église à une dérive caporaliste favorisée par le processus de réformes. Elle pourrait également donner un signal d’ouverture, de dialogue et de confiance et renverser la vapeur en substituant une dynamique de fusion à la logique d’effritement qui semble jusqu’à maintenant prévaloir.
Une chose est certaine, Mgr Norvan Zakarian qui jouit en France d’un grand ascendant moral, sera très difficile à remplacer. Son prestige, son autorité naturelle en font incontestablement le meilleur rempart d’Etchmiadzine et le meilleur garant de l’unité de l’église. Quant à son éventuel départ, qu’à Dieu ne plaise, il ne pourrait qu’affecter les liens entre la communauté et cette institution religieuse historiquement constitutive de son identité. Ce qui n’est en principe ni dans l’intérêt du démissionnaire, ni dans celui de sa hiérarchie.

Ara Toranian

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Author: raffi

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