Haut-Karabagh (I)
M. Bruno Retailleau . – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Rien de ce qui est inhumain ne doit nous être étranger. Nous nous sentons tous israéliens (se tournant vers M. l’Ambassadeur d’Israël, en tribune), mais aussi arméniens : ce sont deux peuples liés par deux génocides.
Les plans du satrape de Bakou ont réussi sans grande opposition – si ce n’est quelques gesticulations : d’abord un blocus pour affamer une population pendant de longs mois, puis le coup de grâce pour achever le travail, avec l’exode sans retour de près de 110 000 Arméniens. Trois mille ans d’histoire et de présence arménienne effacés en trois jours !
Madame la Première ministre, cette opération de nettoyage est-elle une épuration ethnique ?
Désormais, l’Arménie est menacée dans sa souveraineté. Quelles mesures allez-vous prendre pour la protéger ? Allez-vous dénoncer l’accord scélérat de Bakou (marques d’approbation à droite)…
Mme Catherine Morin-Desailly. – Très bien !
M. Bruno Retailleau. – … signé par Ursula von der Leyen en dépit des sanctions – car nous savons que ce gaz vient en partie de Moscou ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées des groupes UC, SER et CRCE-Kanaky)
Mme Élisabeth Borne, Première ministre . – Le Sud-Caucase est touché par des événements très graves. En quelques jours, des familles ont dû quitter leurs terres ancestrales, avec l’exode de plus de 100 000 Arméniens du Haut-Karabagh.
Monsieur Retailleau, je connais votre attachement à l’Arménie et je partage votre émotion face à ce drame.
Dès le début, la France a été en première ligne. Nous avons fermement condamné l’attitude de l’Azerbaïdjan. Mme Colonna s’est rendue à Erevan le 3 octobre. Nous apportons notre plein soutien politique aux autorités arméniennes pour garantir la souveraineté de leurs frontières. Nous avons triplé notre aide humanitaire pour les aider à accueillir les réfugiés. Comme l’a dit le Président de la République à Grenade, nous voulons renforcer la coopération de l’Union européenne avec l’Arménie.
Le président azerbaïdjanais s’était engagé à ne pas utiliser la force dans le Haut-Karabagh, à Prague, en octobre 2022, lors de la première réunion de la Communauté politique européenne. Cet engagement n’a pas été tenu.
Une voix à gauche. – Le gaz !
Mme Élisabeth Borne. – Nous plaidons pour un dialogue entre les deux parties – une réunion se tiendra à Bruxelles sous l’égide de Charles Michel. Nous serons très attentifs à l’attitude du président Aliyev. Ces discussions devront déboucher sur un accord de paix respectueux du droit international.
Nous avons renforcé notre coopération de défense avec l’Arménie et autorisé la fourniture de matériels militaires.
Comme l’a dit le Président de la République hier, nous voulons échanger avec tous les acteurs pour protéger au mieux l’Arménie et appeler l’Azerbaïdjan à la responsabilité. (Applaudissements sur les travées du RDPI)
M. Bruno Retailleau. – Ne mettez pas sur le même plan le bourreau et la victime !
Le 21 février prochain, Missak Manouchian, orphelin du génocide arménien, entrera au Panthéon, accompagné de son terrible cortège : ses frères d’armes, des Français de préférence, comme le disait Aragon, mais aussi la clameur anonyme de ces vies broyées par le génocide, qui implorent la protection de la France pour le peuple d’aujourd’hui.
Dans son discours, le Président de la République célébrera le courage de Missak Manouchian. Peut-être songera-t-il avec regret à ce courage qui aujourd’hui fait tant défaut pour être à la hauteur de l’histoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, sur plusieurs travées des groupes UC et CRCE-Kanaky, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)
La France doit reconnaître que les Arméniens, et singulièrement ceux du Haut-Karabagh, sont la cible d’une épuration ethnique. Retrouvez en direct mon échange avec la Première ministre. #QAG https://t.co/ZCLE9BXu7D
— Bruno Retailleau (@BrunoRetailleau) October 11, 2023