Situation dans la région de Syunik/ Des centaines d’habitants de la région de Syunik, désormais frontalière avec l’Azerbaïdjan, ont bloqué l’autoroute principale jeudi pour protester contre le redéploiement des troupes arméniennes en raison des nouvelles frontières. Les manifestants ont déclaré que les forces azerbaïdjanaises seraient désormais stationnées dangereusement près de leurs communautés. Les redéploiements de troupes ont également soulevé des questions sur la sécurité de l’autoroute reliant Kapan à Goris, car certains de ses tronçons chevauchent la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan de l’époque soviétique. Ils ne sont pas sûrs que la partie frontalière de la route ne sera pas bombardée comme elle l’était déjà dans les années 90. Le Maire de Kapan, Gevorg Parsyan, a également exprimé de sérieuses inquiétudes. Selon le Maire, vendredi à 17 heures, toutes les positions militaires de la ville de Kapan seraient remises à l’Azerbaïdjan. D’après lui, Kapan resterait ainsi sans défense car les forces armées azerbaïdjanaises seront à 1 km des zones résidentielles de Kapan. Le Maire de Kapan a aussi exigé la démission de Pachinian. L’Ombudsman arménien a déclaré que le gouvernement devait expliquer aux citoyens la situation en matière de délimitation des frontières dans le sud de l’Arménie. Selon lui, les habitants des villages situés près de la nouvelle frontière doivent comprendre quelles seront leurs conditions de vie. Il a indiqué qu’il s’était rendu dans la région de Syunik pour voir la situation sur place et que les préoccupations des habitants de Goris, Kapan et d’autres communes de Syunik concernant la démarcation de la frontière étaient fondées. Le gouverneur de Syunik a parlé aux manifestants et a essayé d’apaiser leurs craintes déclarant que les risques de sécurité pouvaient être minimisés. La presse rappelle que le Président de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, a déclaré à plusieurs reprises, y compris lors du défilé militaire du 10 décembre (cf. revue du 10 au 11 décembre 2020), que le Zangezur (région de Syunik), comme Erevan, étaient des « terres historique de l’Azerbaïdjan ».
Des soldats de la paix seront déployés dans certaines sections de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan/ Sans donner de détails, le Ministère arménien de la Défense (MDD) a annoncé que davantage de gardes-frontières russes seraient déployés sur « certaines sections de la frontière de Syunik ». Selon le MDD, le Ministre, Vagharshak Harutyunyan, s’est rendu jeudi à Syunik où il a rencontré les officiers du contingent russe de maintien de la paix dans le Haut-Karabakh et a discuté de la garde de la route Goris-Stepanakert, du plan de déploiement des gardes-frontières russes à la frontière arménienne avec l’Azerbaïdjan, ainsi que des opérations de recherche des personnes disparues au combat dans la guerre du Karabakh. Le Ministre a aussi tenu une réunion de travail avec le commandant de l’unité militaire, le gouverneur de Syunik et le commandant régional des troupes frontalières. Ils ont discuté des questions liées à la démarcation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et du déploiement des unités militaires et des gardes-frontières dans les nouvelles lignes frontalières.
Déclarations du Président russe lors de sa conférence de presse annuelle/
Sur la position de la Russie dans le conflit
« Nous avons toujours considéré, depuis de nombreuses années, que les sept districts occupés autour du Haut-Karabakh devaient être rendus à l’Azerbaïdjan. Le statut du Haut-Karabakh lui-même devrait rester inchangé, c’est-à-dire que le statu quo devrait être fixé. Mais avec la création obligatoire de la possibilité de communication entre le Haut-Karabakh et l’Arménie, pour laquelle le corridor dit de Lachine était censé être créé » a déclaré Poutine. Selon lui, la position de la Russie a toujours été qu’il était nécessaire de parvenir à des accords sans effusion de sang. D’après lui, c’est également de cette manière que la position de Moscou s’est construite au sein du groupe de Minsk de l’OSCE.
Sur les acteurs internationaux
« La Russie espère vraiment que les médiateurs internationaux agiront et commenceront réellement à aider les personnes qui ont besoin d’aide, et avant tout les réfugiés qui retournent au Haut-Karabakh. Nous espérons que non seulement la Russie, mais aussi les organisations internationales comme l’UNICEF, l’UNESCO et le Programme alimentaire des Nations unies enverront une aide humanitaire » a déclaré Poutine. Poutine a également constaté qu’Ankara s’était rangé du côté de Bakou dans le conflit.
Sur la violation du cessez-le-feu
Commentant la situation dans le district de Hadrut, Poutine a déclaré qu’il y avait eu une violation du cessez-le-feu depuis la signature de la déclaration. Il a exprimé l’espoir que cela resterait « un cas isolé » et que les parties pourraient s’asseoir à la table des négociations avec la médiation de la Russie ou du groupe de Minsk de l’OSCE. Il a déclaré que les parties au conflit devraient s’arrêter là où elles étaient au moment de la déclaration trilatérale. Quant aux questions techniques liées à l’infrastructure, selon Poutine, elles doivent être traitées avec calme au cours du processus de négociation. Il a ajouté que la déclaration trilatérale offre toutes les possibilités pour cela, car elle dit qu’après le cessez-le-feu, la prochaine étape devrait être la normalisation complète de la situation dans la région avec l’ouverture du potentiel économique et infrastructurel, y compris les routes et les chemins de fer. « Cela s’applique au Nakhitchevan ainsi qu’aux communications entre le sud et le nord de l’Arménie » a déclaré Poutine.
Sur la présence russe au Karabakh
Selon lui, les soldats de la paix russes au Karabakh pourraient prolonger leur mandat sur le terrain si l’Arménie et l’Azerbaïdjan sont tous deux d’accord. La Russie peut aussi augmenter le nombre de soldats de la paix au Karabakh si toutes les parties au conflit le jugent nécessaire. Poutine a noté que non seulement des soldats de la paix se trouvent au Haut-Karabakh, mais aussi des employés du Ministère russe des urgences et du service des gardes-frontières du Service fédéral de sécurité russe.
Sur le conflit et ses racines
Selon Poutine, la situation autour du Karabakh est beaucoup plus complexe que les simples postulats juridiques internationaux. « Du point de vue du droit international, j’en avait également parlé, tous ces territoires font partie intégrante de la République d’Azerbaïdjan. L’Arménie elle-même n’a pas reconnu l’indépendance du Haut-Karabakh, et en ce sens, compte tenu de cette circonstance, du point de vue du droit international, le Haut-Karabakh lui-même est aussi l’Azerbaïdjan » a déclaré Poutine. « Les racines [du problème] se trouvent dans un conflit ethnique qui a commencé à Soumgaït et s’est ensuite étendu au Haut-Karabakh. Chaque partie a sa propre vérité. Les Arméniens du Haut-Karabakh avaient autrefois pris les armes pour protéger leur vie et leur dignité ». Selon Poutine, la situation au Haut-Karabakh avait échappé au contrôle et était tendue depuis des années, mais il est peu probable que les événements soient causés par des interférences extérieures.
L’aide russe au Karabakh/ Selon le Ministère russe de la Défense, le système électrique du Haut-Karabakh, dont la régulation a été assistée par les soldats de la paix russes, a été complètement restauré. En outre, les soldats de la paix russes ont livré des colis humanitaires de nourriture et de produits de première nécessité à plusieurs centaines de familles du village de Khnapat, dans la région d’Askeran. Selon le Ministère russe des situations d’urgence, les trois premiers des 54 wagons transportant au total 1 200 tonnes d’aide humanitaire sont arrivés au Karabakh.
La marche du deuil au Panthéon militaire de Yerablur aura lieu le 19 décembre à 13 heures/ Nikol Pachinian a déclaré que le 19 décembre à 13 heures, la marche pour pleurer les martyrs de la guerre aura lieu de la place de la République au Panthéon militaire de Yerablur. En même temps, la presse rend compte des déclarations des membres de familles des soldats décédés qui ne souhaitent pas que Pachinian se rend au Panthéon le qualifiant de traitre. Ils comptent bloquer son accès au Panthéon le 19 décembre. Rappelons que ce jour la débute les 3 jours de deuil national en l’honneur des victimes de la guerre (cf. revue du 15 décembre 2020).
Kocharyan est à Moscou pour une visite privée/ L’ancien Président, Robert Kocharian, s’est rendu jeudi à Moscou dans le cadre d’une « visite privée de trois jours ». Son cabinet n’a donné aucun détail sur le voyage. En même temps, les médias russes ont indiqué que le conseil d’administration d’une grande entreprise russe, AFK Sistema, dont Kocharyan est membre du conseil d’administration depuis 2009, tiendra une réunion régulière vendredi.
Le gouvernement approuve des programmes d’aide supplémentaires pour les réfugiés du Karabakh/ Le gouvernement a approuvé jeudi deux programmes d’emploi temporaire pour les résidents du Haut-Karabakh qui ont fui en Arménie en raison de la guerre. Il s’est notamment engagé à créer des emplois dans les travaux publics pour les réfugiés qui restent dans le pays. Ils pourront travailler jusqu’à trois mois et recevoir 8 000 drams (15 dollars) par jour. Le gouvernement proposera également de financer des stages rémunérés pour les réfugiés sans emploi désireux d’acquérir une expérience professionnelle dans de nouveaux domaines. Il versera à chaque stagiaire 100 000 drams (191 dollars) par mois et indemnisera leurs employeurs de toutes les taxes qui en résultent. Selon le Ministre du travail et des affaires sociales, Mesrop Arakelyan, il s’agit de programmes à court terme qui n’encouragent pas le travail permanent, parce que des programmes d’encouragement à l’emploi à plus long terme sont prévus au Karabakh. Le gouvernement a également annoncé une aide financière de trois mois aux familles d’Arménie et du Karabakh qui accueillent temporairement des Arméniens du Karabakh ayant perdu leur maison. Elles recevront respectivement 30 000 et 45 000 drams (57 et 85 dollars) pour chaque personne accueillie.
Sur les soldats/ Le vice-premier ministre, Tigran Avinian, a déclaré que les données sur les personnes capturées dans le village de Khtsaberd étaient en cours de vérification. Selon l’armée de défense du Karabakh, les corps de 9 soldats arméniens ont été retrouvés dans la zone proche des postes militaires de Hin Tagher-Khtsaberd. « Les opérations nécessaires sont actuellement menées pour découvrir les circonstances du décès des militaires et pour les identifier ».
Autres développements/ Le vice-président du Parlement, Alen Simonyan, a déclaré que les citoyens d’Arménie devraient avoir la possibilité de prendre une décision et que « nous irons aux élections quand nous serons prêts ». A la question de savoir quand les élections auront lieu, il a répondu qu’elles devraient avoir lieu « le plus tôt possible, quand ce sera possible techniquement et physiquement ». Le 17 décembre, le Ministre arménien des Affaires étrangères, Ara Ayvazyan, a rencontré la vice-premier ministre et Ministre des Affaires étrangères belge, Sophie Wilmès, lors d’une visite pour participer à la réunion du Conseil de partenariat Arménie-UE. Le leader du parti d’opposition parlementaire « Arménie lumineuse », Edmon Marukyan, est parti en Russie « pour un bref voyage ». Le conseil municipal de Clamart (France) a adopté une résolution reconnaissant la souveraineté du Karabakh. La ville française de Sarcelles a aussi adopté une résolution sur la situation au Karabakh. L’Ombudsman de l’Arménie, Arman Tatoyan, a publié une déclaration, notant que les plus hautes autorités d’Azerbaïdjan continuent à prêcher ouvertement la haine et l’animosité envers les Arméniens.
Rédaction : Lena Gyulkhasyan
Ambassade de France