Stepanakert ville fantôme défigurée par les bombes

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Stepanakert 6 oct 2020 avec AFP – Il aura fallu à peine deux
jours pour que Stepanakert, la capitale de la république auto-proclamée du
Nagorny Karabakh, perchée dans les montagnes caucasiennes, soit défigurée par
les bombardements azerbaïdjanais et vidée d’une grande partie de sa population.
Mardi, après une nuit et une matinée pluvieuse sans explosions, Stepanakert
faisait penser à une ville fantôme. Ses quelques habitants encore présents,
pour la plupart des personnes âgées, s’aventuraient prudemment hors des abris
pour constater les dégâts ou se ravitailler.
Il y a 72 heures encore et malgré la reprise des hostilités
arméno-azerbaïdjanaises le 27 septembre, la vie suivait presque normalement
son cours pour les 55.000 personnes vivant dans la vitrine de la République
arménienne d' »Artsakh » proclamée en 1991 et étroitement liée à l’Arménie
voisine face à l’Azerbaïdjan.
Malgré les combats sur le front à une trentaine de kilomètres de là, la
population se déplaçait encore quasi normalement sur les artères chamarrées de
cette cité proprette au petit charme provincial, connue pour la fierté de ses
habitants, son air frais, ses pommes grenades, sa vodka locale et le « jangyl »,
un délicieux pain aux herbes.
Puis, vendredi, sont tombées les roquettes et les bombes. Une pluie de
projectiles, souvent bien difficiles à identifier. La ville en porte désormais
les stigmates, avec en certains lieux des bâtiments effondrés, des magasins
soufflés et des façades ravagées.
En au moins deux endroits, roquettes ou missiles, n’ayant apparemment pas
explosé, sont fichés dans le sol jusqu’à la garde.

– « 500 kilos ! » –

Sur l’avenue des combattants de la liberté, la principale artère de
Stepanakert, une grande partie des devantures des commerces a été soufflée. Un
immeuble cubique et sans âme, typique de l’ère communiste, mais surtout voisin
du ministère local de la Défense, a été particulièrement touché, comme en
témoignent les fenêtres béantes et les véhicules éventrés sur le parking.
Sur une colline du quartier de Sasountsi Davit, la route goudronnée et une
maison à étages ont été pulvérisées, laissant un cratère large d’une dizaine
de mètres et des fragments d’asphalte gros comme des pastèques éparpillés sur
le reste de la chaussée.
Ses occupants, un quinquagénaire et son vieux père, sont des miraculés :
« on était en train de prendre le thé, on a à peine eu le temps de descendre à
la cave », s’étonne encore le fils, Vazguer Badassian, bien incapable
d’identifier l’engin – d' »au moins de 500 kilos » – qui a provoqué pareille
tornade.
En contrebas, c’est l' »Artsvaberd », le fameux magasin local de meubles et
de canapés, qui a été saccagé, peut-être par la même explosion.
Toutes les vitres des alentours ont évidemment été réduites en miettes. Les
bris de verre sur le sol cassent sous les pieds, les rideaux s’agitent au vent
de fenêtres explosées.
Un vieillard s’avance prudemment au milieu des débris, parmi lesquels
quelques éclats d’acier tranchants de shrapnels. « J’en pleure encore quand je
vois ces destructions », raconte, presque en sanglots, Jamal Tadevossian, 83
ans.
« Ici, nous connaissons les bombardements », ajoute le vieil homme, bravache,
« nous vivons sur ces terres arméniennes depuis des siècles, jamais ces Turcs
musulmans ne nous feront partir », lance-t-il.
L’appartement de sa belle-soeur était situé deux étages au-dessus du
magasin de meubles, mais « par chance elle était à l’abri avec nous, dans la
cave de notre immeuble ».

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– Perruches et vélos –

Dans la cave en question, au coin de la rue, trois vieillards emmitouflés
dans des couvertures sont assis dans la pénombre autour d’une table de bois,
contemplant religieusement une chandelle, au milieu de vélos poussiéreux et
d’un amoncellement de cartons. Le plus âgé est mutique, son bonnet enfoncé
jusque sur les yeux et sa béquille au côté.
Une assiette de confiseries, un pot de confiture d’abricot et un thermos
pour le thé sont posés sur un plateau à fleurs, parfaitement arrangés. La
nourriture est préparée et réchauffée dans une cuisine aménagée autour d’un
simple poêle à bois dans un atelier de mécanique au rez-de-chaussée.
Profitant de l’accalmie, on monte à l’appartement familial, trois étages
plus haut, pour prendre un vêtement chaud ou un peu de victuailles dans le
réfrigérateur. Une bonne âme a descendu la cage des deux perruches, qui
regardent, l’air interrogateur, les allées et venues dans l’abri.
En cette matinée sans bombardements, quelques voitures, toujours conduites
par des hommes en civil ou en uniformes militaires, sillonnent les rues
souvent à grande vitesse, ignorant la signalisation.
Fin de répit en début d’après-midi, les sirènes d’alerte résonnent de
nouveau et chacun retourne se terrer dans son abri.
hba/alf/bds

La rédaction
Author: La rédaction

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