Turquie : les faux-semblants de l’inauguration de l’église arménienne d’Aghtamar

Se Propager
arton51452

Info Collectif VAN – www.collectifvan.org – Info Collectif VAN – www.collectifvan.org –

Le Collectif VAN vous propose la traduction d’un article paru en anglais dans le journal turc Zaman du 17 février 2007. L’Etat turc, qui depuis 90 ans, efface méthodiquement toutes les traces de la civilisation arménienne sur les territoires où cette dernière avait prospéré durant 4000 ans, s’attèle à une opération marketing de grande ampleur, avec la restauration de l’église arménienne d’Aghtamar, sur une île du lac de VAN.

Comme à l’occasion des obsèques de Hrant Dink le mardi 23 janvier 2007, la diaspora arménienne et la République d’Arménie, sont de nouveau instrumentalisées avec une invitation qui risque d’être, une fois de plus, un « faux grossier ». Attila Koç, Ministre turc de la culture, a réfuté le fait que cette restauration puisse être une tentative de « contrer les affirmations de génocide ». Pour le croire, il faudrait que l’opération déclenchée à l’occasion de l’inauguration, ne soit pas un « one shot », et que la Turquie se penche enfin sur son passé, en réhabilitant l’histoire de la minorité arménienne dans l’historiographie officielle turque, en lui attribuant à nouveau la place qui a toujours été la sienne dans l’histoire, place qui est systématiquement occultée dans les ouvrages scolaires, historiques, universitaires et touristiques… Et bien sûr en reconnaissant le Génocide arménien de 1915 et ses 1 500 000 victimes arméniennes, mais aussi assyriennes. Les réponses du Ministre turc de la Culture, et le durcissement ultra-nationaliste turc depuis 1 mois, nous laissent hélas peu d’espoir d’une évolution en ce sens…

Lorsqu’on rappellera qu’Atilla Koç avait initialement prévu l’inauguration de l’église d’Aghtamar le 24 avril 2007, (date qui correspond à la rafle de 600 intellectuels arméniens de Constantinople, prélude au génocide de 1915), on sera tenté de penser que, pour la Turquie moderne, le chemin vers la sagesse est encore très long…

Après le tollé que ce choix avait provoqué – tant du côté arménien (protestation officielle du Patriarche Mesrob II) que du côté des nationalistes turcs et même du parti au pouvoir, le gouvernement avait joué une fois de plus les provocateurs cyniques pour « initiés » en choisissant le 11 avril qui, comme l’avait souligné Hrant Dink dans l’un de ses derniers articles, d’Agos* correspondait en réalité au 24 avril dans l’ancien calendrier ottoman…

En choisissant le 15 avril, troisième date finalement retenue pour ces « festivités », l’Etat turc veut présenter un visage prétendûment pacifié à l’Union européenne, véritable « cible » de ce « cinéma » politico-médiatique.

Collectif VAN

Zaman, 17 février 2007. Extraits.

La diaspora arménienne invitée à l’inauguration d’une église

La Turquie a invité des membres de la diaspora arménienne et des dignitaires religieux à l’inauguration en avril d’une vieille église arménienne restaurée, mais le Ministre de la culture Atilla Koç prend soin d’écarter toute connotation politique, disant que la restauration a eu simplement lieu dans le cadre des efforts entrepris par la Turquie pour faire revivre le patrimoine culturel dont elle a hérité.

L’église d’Akhtamar, située sur une île face à la rive sud du lac de Van en Anatolie orientale, doit être inaugurée le 15 avril une fois terminée la rénovation en cours. La Turquie a déjà dépensé 3 millions de livres (environ 2 millions de dollars) pour restaurer l’église, a déclaré Koç dans un entretien accordé au journal Today’s Zaman. Koç a réfuté le fait que la restauration puisse être une tentative de contrer les affirmations de génocide. « Nous réparons les lieux de cultes non seulement des religions monothéistes mais aussi polythéistes », a dit le ministre. « Nous les considérons comme un patrimoine dont nous avons hérité. Nous les considérons comme notre richesse. » Le ministère du tourisme de Koç a déjà invité des personnalités importantes de la diaspora arménienne, ainsi que des chefs religieux arméniens, et projette d’envoyer des invitations aux ministres de la culture de la République d’Arménie et de pays ayant une forte population arménienne comme le Liban, l’Ukraine, la Russie et les Etats-Unis. « Nous allons recevoir 200 invités de marque », a-t-il dit à Zaman. Nous les emmènerons à Van par avion de la Turkish Airlines spécialement affrété.
L’église du Xe siècle est pratiquement tombé en ruines au cours des événements de la Première Guerre mondiale, qui selon les Arméniens équivaut à un génocide de la population arménienne de l’Empire ottoman. La Turquie rejette catégoriquement ces affirmations. Bien que Koç dise que la rénovation procède du respect de l’héritage culturel de la Turquie, l’inauguration de l’église peut servir d’incitation supplémentaire à apaiser les tensions entre Turcs et Arméniens après les obsèques du journaliste assassiné Hrant Dink à Istanbul, qui ont attiré 100 000 personnes brandissant des panneaux où l’on pouvait lire « nous sommes tous Arméniens ». Dans ce long entretien, Koç a également répondu à des critiques sur une nouvelle campagne de promotion du tourisme où l’initiale T du mot Turquie est remplacée par des silhouettes humaines. Il a dit que c’était juste une question de goût, et que ce qui plaît aux uns peut déplaire aux autres. Il a aussi ajouté que son ministère était déterminé à continuer les efforts destinés à supprimer les fermes d’aquaculture dans les zones touristiques, et a rejeté les accusations d’après lui « absurdes » qui prétendent que la Turquie est devenue « un paradis du tourisme bon marché. »

Combien a coûté la restauration de l’église d’Akhtamar?

Nous avons dépensé 3 millions de livres turques. Les vieilles mosquées d’Anatolie sont restaurées par la Direction générale des fondations, alors que les églises et les synagogues le sont par notre ministère. Nos projets de restauration ne se limitent pas aux lieux de culte des trois religions monothéistes. Des lieux considérés comme sacrés par des religions polythéistes ont aussi été restaurés. En ce qui concerne les restaurations, la Turquie est devenue un chantier.

Combien d’églises et de synagogues ont-elles été restaurées?

Entre 2005 et 2006 nous avons restauré 10 églises. Ces projets incluent le monastère Sainte-Marie de Giresun, Ani Pehir de Kars, l’église Çameli de Karaman, le monastère Saint-Nicolas de Mustafa Pacha à Ürgüp, le monastère Sümela de Trabzon, le musée Sainte-Sophie de Trabzon, l’église d’Akhtamar à Van, l’ancienne église de Akdaðmadeni, l’église arménienne de quartier de Merzifon à Amasia et l’église de Tigrane l’Honnête à Kars**.

Y aura-t-il d’autres projets concernant des monuments arméniens?

Nous allons lancer la restauration des ruines d’Ani à Kars. Ani a des caractéristiques intéressantes. Il y a huit mosquées et huit églises, avec des dates de construction parallèles. Musulmans et chrétiens ont vécu en paix côté à côte pendant des années. A ce jour, aucun projet n’a été mis en oeuvre par rapport aux ruines d’Ani. Nous serons les premiers à nous occuper de cette question.

Pour la première fois, vous avez invité des représentants de la diaspora arménienne. Qui d’autre comptez-vous inviter?

Nous avons invité les ministres de la culture des pays de l’UE. Nous allons aussi inviter les ministres de la culture de Russie, d’Ukraine, d’Arménie, du Liban, de Syrie, de Géorgie, des USA et du Canada, qui comptent d’importantes populations arméniennes. Nous avons invité des personnalités de la disapora arménienne, des chefs religieux et des représentants d’organisations culturelles. Nous recevrons 200 hôtes de marque.

Il y a des gens qui disent que la restauration d’Akhtamar et d’Ani est une contre-attaque envers les affirmations de génocide. Qu’en dites-vous?

Non, cela n’a rien à voir avec les allégations de génocide. Nous réparons aussi les lieux de culte des religions polythéistes. Nous les considérons comme un patrimoine dont nous avons hérité. Ces terres ont connu des centaines de nations et de gouvernements. Nous prenons soin de tout ce qu’ils nous ont légué. Il y a plus de 600 composantes dans ce mélange culturel. Parmi elles les Arméniens, les Juifs et les Grecs. Nous les considérons comme notre richesse. e ministère est en train de préparer un inventaire de nos atouts culturels, mais nous avons constaté que les musées ont été pillés. Sans inventaires, vous ne savez pas si vous avez été pillé.
Pour découvrir si une pièce historique a été volée ou non, nous devons nous tourner vers nos inventaires et faire des inspections. La dernière inspection au musée d’Afrodisias a eu lieu en 1955. Autrefois les musées dépendaient du ministère de l’éducation, qui recrutait des enseignants pour s’occuper des musées. Nous ne savons même pas si les objets répertoriés par eux comme étant dans les musées existent ou non. Aujourd’hui nous avons une chance de faire la différence entre les vrais et les faux objets et d’identifier ce qui a été volé.

17.02.2007

ERCAN YAVUZ, ALI ASLAN KILIÇ ANKARA

© Traduction : Collectif VAN

raffi
Author: raffi

La rédaction vous conseille

A lire aussi

Sous la Présidence d’Honneur de M. Nicolas DARAGON, Maire de Valence, Président de l’Agglomération, Vice-Président de La Région, L’UGAB Valence-Agglomération

Le ministère des Affaires étrangères de l’Azerbaïdjan a de nouveau accusé l’Arménie de ne pas avoir fourni de cartes des

Lors de la séance plénière de l’Assemblée nationale de la semaine prochaine, l’opposition parlementaire, les factions « Hayastan » (Arménie)»

a découvrir

Se connecter

S’inscrire

Réinitialiser le mot de passe

Veuillez saisir votre identifiant ou votre adresse e-mail. Un lien permettant de créer un nouveau mot de passe vous sera envoyé par e-mail.

Retour en haut