Vendredi, le président russe Vladimir Poutine a téléphoné à Robert Kotcharian, ancien chef de l’Etat arménien, à l’occasion de son 64e anniversaire.
Le Kremlin n’a donné aucun autre détail dans cette annonce officielle d’un coup de fil qui est intervenu deux semaines après la promesse faite par Kotcharian de revenir en politique activement, et ce dans l’opposition au gouvernement arménien actuel.
Le secrétaire de presse de Poutine, Dmitri Peskov, a nié tout lien entre la conversation et les récents développements politiques en Arménie.
«Comme vous le savez, Poutine et Kotcharian entretiennent depuis de nombreuses années des relations chaleureuses qui ne sont influencées par aucun événement en Arménie», a commenté Peskov à Moscou, selon les agences de presse russes. Il a précisé que les deux hommes n’avaient pas discuté de la procédure pénale engagée contre Kotcharian et deux autres anciens responsables arméniens.
Ces derniers ont été accusés fin juillet d’avoir illégalement utilisé les forces armées contre des partisans de l’opposition qui ont manifesté à Erevan à la suite de l’élection présidentielle controversée de février 2008. Huit manifestants et deux membres de la police sont morts lorsque les forces de sécurité arméniennes ont dispersé ces manifestations les 1er et 2 mars 2008.
Kotcharian, qui rejette fermement ces accusations, a été arrêté le 27 juillet. Une cour d’appel l’a libéré le 13 août, affirmant qu’il jouissait de l’immunité de poursuites judiciaires. Les procureurs ont demandé à la Cour de cassation de renverser cette décision.
Plus tard en juillet, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a dénoncé les poursuites engagées contre Kotcharian, l’ancien ministre de la Défense, Mikael Harutiunian, et l’ancien vice-ministre de la Défense, Yuri Khachatourov. Il a noté qu’elles étaient en contradiction avec les engagements pris par les nouveaux dirigeants arméniens de ne pas «poursuivre leurs prédécesseurs sur des motifs politiques».
Moscou semblait particulièrement irrité par l’affaire criminelle contre Khachatourov, qui est actuellement secrétaire général de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC). Un responsable du Kremlin a regretté le fait, selon lui, qu’Erevan avait porté un «coup colossal à l’image» de l’alliance dirigée par la Russie.
Le Premier ministre Nikol Pachinian, qui a joué un rôle clé dans les manifestations de 2008, a minimisé la critique russe le 10 août. Il a expliqué que Moscou devrait « s’adapter » aux nouvelles réalités politiques de l’Arménie.
Harutiunian, un autre général inculpé, vivrait en Russie. L’agence de presse Interfax a rapporté vendredi que Moscou avait refusé de l’extrader en Arménie au motif qu’il était également citoyen russe.
Kotcharian, qui a dirigé l’Etat du Caucase du Sud de 1998 à 2008, a annoncé son retour politique trois jours après sa sortie de prison. Vendredi dernier, il a également confirmé sa participation aux élections législatives anticipées qui auront lieu au printemps prochain.
Dans une interview avec l’agence de presse russe Sputnik, l’ex-président a de nouveau déclaré son ambition de devenir l’un des principaux leaders de l’opposition du pays. Il n’a pas exclu sa coopération avec le Parti républicain (HHK) de Serge Sarkissian, qui lui a succédé comme président en 2008 et a été évincé du pouvoir par les manifestants dirigés par Pachinian en avril dernier.
Kotcharian a par ailleurs accusé le nouveau gouvernement de nuire aux relations étroites de l’Arménie avec la Russie. Il a notamment pris en exemple la participation de Pachinian à un sommet de l’OTAN en juin.
Kocharian a rappelé à cet égard que Pachinian et ses alliés ont fortement critiqué l’adhésion de l’Arménie à l’OTSC et à un autre bloc dirigé par la Russie, l’Union économique eurasienne (UEE), avant leur arrivée au pouvoir en mai. « Dans son entourage, presque personne n’a jamais été porteur de différentes approches géopolitiques par e passé », a-t-il regretté. « Tous sont des individus qui ont reçu des subventions de l’occident, de l’OTAN. »
Pachinian a exclu à plusieurs reprises un changement majeur dans l’orientation traditionnelle de la politique étrangère de l’Arménie. Il a également nié les allégations selon lesquelles les relations russo-arméniennes se sont détériorées depuis son arrivée au pouvoir.