Je suis né dans les gorges
Dans les jours sombres de la Catastrophe.
Ma mère me berçait sur son sein;
Mon berceau aussi est perdu.
J’ai ouvert des yeux, j’ai vu la famine.
Dieu a dit: c’est un sacrifice !
Avant même d’être monté sur un cheval de bois,
Je suis tombé du cheval de la destinée.
Je suis resté orphelin et inculte,
Déjà tombé hors de l’enfance.
Du gouffre du chagrin au trône altier,
C’est miracle que je sois arrivé à toi.
Il s’en est fallu de peu que de la Catastrophe
La patte ne m’attrape à la gorge.
Elle a enterré des myriades des nôtres;
Comment ne me suis-je pas perdu ?
Je ne me suis pas troublé dans mon chagrin,
Mon rossignol n’est pas devenu serpent.
Mon âme larme et or,
Je suis un concentré de mon peuple.
Maintenant, à mon peuple innocent
Sont redevables Dieu et le monde !
Le dédommagement de la Catastrophe
Sera exigible tôt ou tard.
Elles s’embrasseront bien vivantes
Ces nations criminelles aussi.
Monde, ne t’occupe pas de moi,
Prends soin de mon peuple vivant.
Je crains qu’envers lui
Tu restes redevable…éternellement !
Hovannès Chiraz – Traduction Louise Kiffer
Extrait d’un groupe de poèmes intitulé: Visht Amanoria – Chagrin de Nouvel An